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La Chine, nouvel eldorado du foot ?

Nicolas Anelka est pressenti à Shanghaï pour un dernier contrat lucratif. De là à dire que la Chine, c'est l'avenir du foot, il y a un grand pas.

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Des supportrices du club chinois de Guangzhou Evergrande de Canton encouragent leur équipe lors d'un match amical contre le Real Madrid, le 3 août 2011.  (VICTOR FRAILE / GETTY IMAGES)

L'attaquant français Nicolas Anelka, abonné au banc de touche à Chelsea, s'est vu proposer 10,6 millions d'euros de salaire annuel par le Shanghaï Shenhua. Le club de la plus grosse ville chinoise aurait aussi l'intention d'approcher Jacques Santini et Jean Tigana pour entraîner l'équipe, d'après China Daily. La Chine est-elle en train de devenir une destination habituelle pour les footballeurs ? Pas encore.

Le tout début de l'argent roi 
Tout a commencé quand le propriétaire du Guangzhou Evergrande, basé à Canton, a voulu, en 2012, faire de son club le nouveau Chelsea. Un recrutement ambitieux et onéreux à base d'internationaux chinois et de bons joueurs sud-américains a lancé la course à l'armement dans le foot chinois. Ce n'est pas anodin si le Shanghaï Shenhua embraye dans la chasse à la star. D'autres clubs détenus par de riches industriels chinois pourraient également suivre le mouvement. Ce qui permettra peut-être d'arrêter les scandales qui émaillent l'actu du foot chinois, plus nombreux que les exploits ou les beaux matchs. 

Une corruption endémique
Le championnat chinois est gangrené par la corruption. Les joueurs locaux payés 300 euros par mois constituent une cible facile pour les parieurs soucieux de mettre toutes les chances de leur côté en arrangeant les matchs. Cette année, c'est une dizaine d'arbitres qui ont été convaincus de corruption. Du coup, 200 arbitres chinois ont eu droit à cinq jours de stage dans un "camp d'éducation et de rectification contre la corruption", décrit la Revue de Pékin

L'arbitre chinois Lu Jun, ici lors d'un match de Coupe du monde entre les Etats-Unis et la Pologne, le 14 juin 2002 à Taejon (Corée du Sud), a été impliqué dans une affaire de corruption. (SHAUN BEST / REUTERS)

"La corruption est présente à tous les niveaux du jeu, explique l'auteur d'un livre sur le foot en Chine à CNN. C'est représentatif du problème plus large [qui sévit] dans la société chinoise, mais c'est plus visible." Le championnat chinois a été refondu plusieurs fois pour tenter de faire le ménage. Sans succès tant les mafias sont puissantes. Le journaliste canadien Declan Hill accuse même les parieurs chinois d'avoir truqué le match Brésil-Ghana du Mondial 2006 dans son livre Comment truquer un match de foot

Peu d'intérêt des locaux
Quelque 180 millions de personnes suivent le foot chinois, d'après CNN. Le chiffre peut paraître énorme mais les signes extérieurs de footballitude chez les Chinois sont liés aux championnats étrangers. 

Promenez-vous dans les grandes villes du pays et vous trouverez des boutiques de l'Inter Milan à Shanghaï et d'Arsenal à Pékin. Mais vous seriez bien en peine de dégotter un vendeur de maillots de clubs locaux ou de croiser des gens qui en portent dans la rue.

Des fans dans le magasin-restaurant de Manchester United à Hong-Kong (Chine), le 25 août 2011.  (JEROME FAVRE / GETTY IMAGES)

Les gros championnats européens ont même adapté leurs horaires au marché asiatique en organisant des matchs à midi pour avoir le prime time dans l'empire du milieu grâce au décalage horaire. Sans parler de certains clubs anglais qui traduisent en chinois le sponsor inscrit sur le maillot des joueurs. 

Le championnat chinois cru 2011 a commencé en avril. Des entreprises nationales ont investi des sommes colossales dans le foot sans que cela donne de résultats. C'est une société d'immobilier qui paye le salaire conséquent du sélectionneur national et qui est devenu sponsor du championnat pour aider à construire des infrastructures. Mais rien ne dit que l'argent investi soit allé aux bonnes personnes.

Le niveau reste faiblard
Le niveau général n'atteint pas des sommets, loin de la Corée de Sud ou du Japon, dont les clubs font des parcours autrement plus intéressants en Ligue des champions asiatique. Soixante-douzième nation au classement FIFA, la Chine n'a guère fait parler d'elle si ce n'est quand elle a battu la France, en juin 2010 à La Réunion, juste avant le sinistre Mondial français en Afrique du Sud. Aujourd'hui la Chine rappelle les péripéties de l'équipe olympique lors des JO de Pékin de 2008, un parcours qui n'a rien à envier à celui des rugbymen anglais qui se sont montrés, au Mondial de Nouvelle-Zélande, adeptes de sexe tarifé, d'humour gras et de lancers de nains.

Du coup, la pratique du football ne perce pas. La Chine compte moins de pratiquants occasionnels que l'Angleterre, selon Globaltimes.cn

Un supporter chinois déçu après la défaite de la Chine contre la Corée du Nord en demi-finale de la Coupe d'Asie féminine, à Chengdu, en Chine, le 27 mai 2010. (ZHANG WEI / AFP)

Des Français à l'export, mais pas des vedettes
Depuis les années 90, on a régulièrement vu des Français dans le championnat chinois. Cédric Sabin, que vous avez peut-être découvert au cours de la finale de la Coupe de France 1996 entre Nîmes et Auxerre, a joué un an au Shaanxi Chan Ba. Et il n'a pas perdu au change avec la Ligue 2 française, a expliqué son avocat dans So Foot en 2010. " 350 000 dollars pour une seule saison avec maison, chauffeur et interprète ! Ça fait rêver, hein ? Alors qu’il gagnait quoi à Vannes ? 15 000… En plus, là-bas, y'a rien, c’est mortel ! Ici, en Chine, Cédric joue devant 60 0000 spectateurs et parcourt l’Asie." D'autres joueurs assez connus comme Nicolas Ouédec, ex-gloire du FC Nantes, Wilfried Gohel, l'ex-attaquant du Sporting Bastia aux faux airs de Brad Pitt, et Christian Perez, ex-Nîmes Olympique, ont fait un passage par le championnat chinois.

Basket 1- Foot 0
D'autres sports, comme le basket, le badminton ou le tennis de table, mènent la vie dure au football, tant en terme d'intérêt que de pratique. Le basket a réussi sa mue grâce au charisme de la star Yao Ming, le géant passé par Houston. Mais aussi grâce à la qualité du championnat local, calqué sur le modèle de la NBA américaine.

Ainsi, s'inspirant du Miami Heat et autres New York Knicks, les équipes chinoises portent des noms tels que les Canards de Pékin, les Fusées de l'armée ou les Esturgeons du Fujian. La saison régulière et les éliminatoires sont bâtis selon la même structure que le championnat américain. Et en raison de la grève qui frappe ce dernier en ce début de saison, certaines stars américaines ont rejoint les parquets chinois.

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