Paris 2024 : comment les athlètes se sont préparés au marathon le plus dur de l'histoire des Jeux olympiques

Les coureurs et coureuses vont affronter, samedi et dimanche, un dénivelé jamais vu sur un marathon de championnat. Habitués à des tracés roulants, ils ont dû adapter leur entraînement.
Article rédigé par Anaïs Brosseau
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Hassan Chahdi au milieu d'un peloton de coureurs, lors du marathon des Mondiaux 2023, à Budapest (Hongrie). (ATTILA KISBENEDEK / AFP)

Quinze kilomètres de mise en bouche, puis un copieux plat de côtes, suivie d'une vertigineuse descente, avant de conclure par une dizaine de kilomètres plutôt roulants pour rejoindre l'arrivée aux Invalides. Révélé en octobre 2022, le parcours du marathon olympique n'a pas tardé à faire réagir. En cause, son dénivelé inédit : 436 m de grimpette et presque autant de descente (438 m). 

Pour se qualifier aux JO, les athlètes ont couru après des minima relevés (2h08'10 pour les hommes, 2h26'50 pour les femmes), en privilégiant les parcours les plus plats possibles. Mais une fois la sélection en poche, ils ont dû revoir leur préparation et leur stratégie pour ce qui pourrait être le marathon le plus dur de l'histoire des Jeux olympiques.

Le parcours du marathon olympique. (PARIS 2024)

"Il va falloir s'entraîner différemment, avec du renforcement, des côtes, du travail de long effort sur du dénivelé", détaillait au printemps la détentrice du record de France (2h24'12), Méline Rollin. L'Ardennaise n'était d'ailleurs pas mécontente de sortir des schémas habituels pour sa troisième prépa marathon en dix mois, après ceux d'Amsterdam en octobre 2023 et de Séville en février.

Sorties longues avec des côtes

Comme la majorité de l'équipe de France, à l'instar de Nicolas Navarro, Mekdes Woldu ou encore Mélody Julien, Méline Rollin a passé un mois entier à fouler les sentiers des hauteurs de Font-Romeu, dans les Pyrénées. Là-bas, marathoniens et marathoniennes ont multiplié les séances de côtes. Ponctuel dans le cadre de la préparation d'un marathon roulant, ce travail s'est transformé en passage obligé. Le but recherché : faire en sorte que les olympiens puissent avaler, avec le moins de dégâts possibles, les cinq kilomètres d'ascension à Ville-d'Avray, avec déjà 15 kilomètres à vive allure dans les jambes, puis la redoutable côte des Gardes, 900 m de pente avec une inclinaison maximum de 13,5%, placée juste avant le 30e kilomètre. 

"Un marathon, ça commence toujours autour du 30e et là, on aura l'enchaînement (des côtes) dans les jambes. Si on est cramé en bas de la descente, le retour vers les Invalides va être très, très long", rappelait en conférence de presse Nicolas Navarro, 12e à Tokyo. Ce familier du dénivelé, lui qui s'entraîne sur les routes vallonnées entre Var et Bouches-du-Rhône, a prévu de "rester prudent sur les deux premiers tiers de la course".

Apprendre à courir en descente

Tout aussi difficile, la descente qui suit la côte des Gardes comporte "un passage très délicat à 13,4% pour arriver à Issy-les-Moulineaux au 32e kilomètres", indiquait Alain Blondel, manager athlétisme au sein de Paris 2024, lors de la présentation du tracé. Souvent négligées par les marathoniens amateurs, les descentes ont également fait l'objet d'un travail spécifique. 

"Il y a une adaptation à faire dans la foulée. En général, il faut plutôt raccourcir sa foulée dans les montées, et dans les descentes trouver plus d'aisance. Les positions du bassin et des épaules sont aussi très importantes."

Félix Bour, marathonien de l'équipe de France

en conférence de presse

Avec deux Marseille-Cassis à son actif, course réputée pour son dénivelé, le marathonien tricolore était bien conscient de l'importance de s'entraîner en descente. "Ce sont des petits détails qui peuvent jouer si tu ne t'y es pas préparé et si tu ne l'as pas bossé à l'entraînement." Avec parfois l'adoption d'une nouvelle foulée, le danger est de voir poindre des douleurs sur des muscles autrefois moins sollicités.

Le danger de la blessure

"Il faut trouver le juste milieu entre le qualitatif et travailler musculairement autrement. Il ne faut pas basculer du côté de la blessure", insiste Lahcen Salhi, responsable du suivi de coureurs du 10 000 m au marathon à la Fédération française d'athlétisme. Pour optimiser au mieux l'entraînement, ce dernier pointe aussi l'importance de la diététique et du travail pour déterminer les apports (tant en hydratation qu'en alimentation) nécessaires sur ce parcours atypique. Avec la cellule d'optimisation de la performance, le staff tricolore a ainsi tâché d'aider ses athlètes à trouver la bonne allure, la bonne foulée et les bons ravitaillements, selon leurs propres qualités.

"J'en ai parlé avec des athlètes belges et norvégiens, ils ne font pas un entraînement uniquement basé sur le travail de côtes. Il faut pouvoir récupérer aussi. L'important, c'est d'avoir la meilleure fraîcheur possible le jour J", complétait Morhad Amdouni, en conférence de presse, trois jours avant le marathon. Le détenteur du record de France (2h03'47) s'est d'ailleurs fait mal lors d'une séance de repérage du tracé du marathon olympique. 

"J'ai testé la côte des Gardes, c'est là que je me suis blessé. Ce sont les aléas de ce sport. Stratégiquement, on a fait de petites erreurs." 

Morhad Amdouni, marathonien français

en conférence de presse

Sa blessure s'est aggravée lors d'un ultime entraînement, vendredi 9 août, et il a été contraint de déclarer forfait. Remplaçant car également auteur des minima, Hassan Chahdi a dans la foulée été sélectionné pour le remplacer. Plusieurs membres de l'équipe de France ont fait le choix de placer, à la fin du printemps, une séance ou un footing sur les portions les plus pentues du tracé.

En ne mettant pas un orteil sur le parcours olympique, Félix Bour a lui choisi de ne "pas se mettre d'idée dans la tête". Le coureur a privilégié la préparation mentale. "Je sais comment aborder les difficultés, cela ne me fait pas peur, assure-t-il. Là, j'ai essayé de bosser pas mal sur les émotions. Le public va aider les Français, c'est quelque chose qu'on n'a pas forcément l'habitude de gérer." A défaut de courir à leur place, les spectateurs, attendus nombreux sur les portions de côtes, pourraient leur donner un second souffle.

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