Infographies Paris 2024 : le fort débit de la Seine, trouble-fête pour la cérémonie d'ouverture ?

Le débit du fleuve est l'un des plus forts de ces dernières années, et pourrait obliger les organisateurs de la cérémonie d'ouverture des Jeux à s'adapter.
Article rédigé par Brice Le Borgne
France Télévisions
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A moins de 10 jours de la cérémonie d'ouverture, le débit de la Seine est encore élevé. (JULIEN BIEHLER / DPPI MEDIA / AFP)

A une semaine du début des festivités, il n'y a pas que la qualité de l'eau de la Seine qui est scrutée de près par les organisateurs de Jeux olympiques et paralympiques. Son débit aussi, très élevé pour la saison. Trop élevé ? Il pourrait encore baisser d'ici à la cérémonie d'ouverture, le 26 juillet, mais les équipes d'organisation ont d'ores et déjà anticipé différents points sur lesquels la navigation pourrait être adaptée. 

Le trop fort débit a déjà perturbé les préparatifs. Trois répétitions, prévues en avril, mai et juin ont été annulées, et d'autres ont dû se faire en formation réduite. Début juillet, le débit de la Seine, mesuré au niveau du pont d'Austerlitz, a été le plus fort de ces quinze dernières années. Il a oscillé autour de 500 m3/seconde, plus de trois fois la moyenne sur cette période, en raison de fortes précipitations depuis plusieurs semaines. Météo-France estime un excédent de pluie de 40% depuis le 1er janvier par rapport aux normales. A la même période l'été dernier, il dépassait à peine les 100 m3/s. 

Depuis la mi-juillet, le débit du fleuve dans la capitale a commencé à diminuer, mais les précipitations prévues à Paris et plus à l'est de la capitale conduisent les organisateurs à rester vigilant. Si le débit s'avérait encore trop fort le jour J, la vitesse des bateaux augmenterait, et le minutage précis de la cérémonie d'ouverture, calculé et répété depuis des semaines, tomberait à l'eau. Ainsi, si la vitesse des bateaux passait de 9 à 12 km/h par exemple, les embarcations pourraient mettre une dizaine de minutes en moins pour parcourir les 6 km prévus lors de la parade.

"Quand le débit est fort, les bateaux sont un peu plus ballotés, notamment en aval des ponts", ajoute Ghislain de Richecour, PDG des vedettes du pont Neuf, qui prêtera huit bateaux pour la parade. Le chef d'entreprise, dont les pilotes ont l'habitude de naviguer avec des débits comparables en hiver, semble serein. "La seule complexité, c'est de respecter les timings prévus, les espacements entre les bateaux et le rythme de la parade. On est dans une zone tendue, mais maîtrisable", juge-t-il.

Rester en dessous des 500 m3/s

Autre difficulté : si la Seine est trop haute, les bateaux les plus grands, dont certains transportant des délégations lors de l'événement, pourraient ne pas pouvoir passer sous les ponts de la capitale. Difficile de savoir lesquels exactement, mais ils ne seraient qu'une poignée selon Marc Guillaume, préfet d'Ile-de-France, cité par Le Monde. Sodexo Live, qui gère notamment 22 bateaux prêtés par les entreprises Yachts de Paris, Batobus et Bateaux parisiens pour la cérémonie, indique à franceinfo que tous ses bateaux passent sous les ponts. "Certains devront faire preuve d'une attention particulière à quelques endroits du parcours, où les ponts sont un peu plus bas. Selon les conditions météo, certains devront passer bien au milieu, mais nous sommes habitués et préparés à cela", rassure la société. Son Paquebot, qui doit accueillir la délégation française, possède deux hautes cheminées, mais qui sont rétractables, "permettant ainsi au bateau de passer sous tous les ponts", souligne Sodexo Live.

Le 4 juillet, alors que le débit n'avait pas encore commencé à redescendre, Thierry Reboul, directeur des cérémonies au comité d'organisation, envisageait auprès de l'AFP "une adaptation" de l'événement si le débit se situait entre 300 et 500 m3 (en gris dans le graphique ci-dessous). "Ce qu'il faut éviter c'est d'être au-dessus de 500 m3/s", précisait-t-il. Parmi ces modalités d'adaptation, le directeur mentionne la possibilité d'"enlever les bateaux qui sont les plus hauts". Et si le débit retrouve un niveau supérieur à 500 m3 ? Paris 2024 n'a pas répondu à nos questions, mais ce scénario, symbolisé en jaune ci-dessous, semble s'éloigner.

La réduction récente du débit profite d'une météo plus sèche sur Paris et sur les départements de ses affluents, en amont. Mais plusieurs jours de pluie sont pour l'instant prévues sur ces zones, notamment le week-end du 20 juillet et en début de semaine suivante. Les nappes phréatiques sur ces territoires, qui alimentent aussi les cours d'eau en été, sont aussi à un niveau "haut", d'après le dernier bulletin de situation du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM). 

Autre variable influençant le débit du fleuve : le taux de remplissage des réservoirs en amont de la capitale, qui est actuellement très élevé. Les trois plus importants, le lac du Der (Marne), le lac d'Orient (Seine), et le lac Amance (Aube) sont remplis à un taux compris entre 94 et 99% de leur capacité normale. Bien plus qu'au même moment l'an dernier, en raison des fortes pluies stockées au début du mois. Il ne leur reste donc qu'une faible marge de manœuvre en cas de fortes précipitations, même s'ils disposent d'une capacité supplémentaire, utilisée exceptionnellement en cas de forte crue. 

Le contexte est tendu, et l'établissement public Seine Grands Lacs, qui gère les quatre réservoirs, explique devoir jongler entre plusieurs impératifs. Faire de la place, notamment dans le lac du Der (le plus volumineux), et "reconstituer une capacité de stockage pour faire face à une nouvelle crue importante", détaille à franceinfo Baptiste Blanchard, directeur général. Mais sans toutefois vider les réservoirs trop rapidement pour ne pas trop gonfler le débit de la Marne, qui se jette dans la Seine. "En prévision des Jeux olympiques, nous avons atténué ces restitutions", explique le spécialiste. 

Reste qu'il peut exister jusqu'à huit jours de délai pour qu'un changement dans le débit de ces réservoirs se fasse resentir à Paris. Et qu'en fonction des précipitations sur toute la zone, le flux en sortie de ces quatre lacs ne pourrait avoir qu'une influence limitée sur le débit dans la capitale. Autant d'inconnues qui pourraient être surveillées de près, et pas seulement pour la cérémonie d'ouverture : un fort débit pourrait également être problématique pour les épreuves de triathlon (30 et 31 juillet, 5 août) et natation-marathon (8 et 9 août), prévues dans le fleuve.

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