JO 2022 : Perrine Laffont et Antonin Guigonnat, grands champions et youtubeurs à succès
En parallèle de leur carrière internationale, la skieuse de bosses et le biathlète développent des contenus vidéo sur la plateforme qui rencontrent un véritable succès.
Quand Perrine Laffont et Antonin Guigonnat ont préparé leurs valises pour les Jeux olympiques de Pékin (du vendredi 4 au 20 février), ils ont sans nul doute vérifié à plusieurs reprises qu'ils avaient bien leurs skis... et leur téléphone portable. Ils entendent briller lors de l'événement chinois, tout en partageant ces moments avec leurs fans sur YouTube.
La skieuse de bosses, qui dispute la finale olympique dimanche, et le biathlète remplaçant de l’équipe de France possèdent en effet tous les deux une chaîne en vue sur la célèbre plateforme. Perrine Laffont est suivie par environ 20 000 abonnés, contre la moitié pour Antonin Guigonnat.
"Je ne pensais pas que ça marcherait autant"
"J’ai toujours eu une appétence pour la vidéo. A chaque fin de saison, je faisais des petits best of, le montage me plaisait déjà", explique Perrine Laffont. Même son de cloche du côté du biathlète : "J’ai commencé il y a une dizaine d’années, se remémore le biathlète. J’ai toujours été précurseur dans le matériel : une GoPro, un drone, un stabilisateur..."
A l’ère des youtubeurs ou des streameurs, la championne olympique à Pyeongchang (Corée du Sud), a sauté le pas en septembre 2018 en publiant son premier vlog. Les fans adhèrent au concept (la vidéo compte aujourd’hui plus de 33 000 vues). Moins d’un mois plus tard, un deuxième vlog, qui s’intéresse à la préparation physique de la championne est mis en ligne. A ce jour, il a été vu 128 000 fois. "Je ne pensais pas que ça marcherait autant. C’est aussi les sombres côtés de YouTube : il ne faut pas chercher à comprendre", rigole la skieuse.
De son côté, Antonin Guigonnat a fait revivre ces derniers mois une chaîne YouTube dépourvue de contenus depuis huit ans. Après deux premières vidéos de randonnée, il a publié début novembre un contenu sur le stage de préparation de l’équipe de France de biathlon. "En arrivant en Norvège, je filmais un peu tout ce qu’il se passait. Le soir, j’ai mis ça en ligne, raconte-t-il. Même les techniciens et les coachs ont regardé et en discutaient. Cela a créé une bonne ambiance de voir que ça vivait bien dans le groupe." Pour lui aussi, les clics et les "j'aime" décollent rapidement. Sa première vidéo a été visionnée plus de 28 000 fois. "Je ne m’attendais pas à ce que ça marche autant, mais je savais qu’il y avait une base de gens qui allaient regarder."
"On surfe un peu sur la vague de l’industrie du film de ski", observe Perrine Laffont. Dans le ski freestyle, les vidéos font en effet partie du décor et de la culture. La Française a même sorti son premier court-métrage en novembre. Autre raison qui explique le succès des champions vlogueurs : leurs contenus proposent des images exclusives.
"Je pense que ça ne pourrait pas être fait par un média. Je peux amener quelque chose que personne ne peut faire, même pas la personne qui est chargée de faire des images au sein de l‘équipe puisque des barrières naturelles s'installent."
Antonin Guigonnat, biathlète remplaçant aux JO de Pékinà franceinfo sport
Avec son IPhone ou son appareil photo, "en mode documentaire animalier", le champion du monde 2021 de relais simple mixte nous permet de capter des moments de vie authentique au sein du groupe. On prend ainsi le petit-déjeuner avec Quentin Fillon Maillet, on partage un trajet avec Fabien Claude, Simon Desthieux ou les techniciens. Antonin Guigonnat nous emmène dans sa chambre avec Emilien Jacquelin qu’on aperçoit (une seule fois, promis) les fesses nues au réveil. On va aussi avec lui à la ferme, à Hochfilzen (Autriche) pour voir les animaux.
"Un peu plus d'intime"
"Je me suis dit que les gens souhaiteraient avoir un peu plus d’intime sur la préparation par exemple", souligne pour sa part Perrine Laffont. Cette dernière partage, au fil des épisodes, ses vacances, son alimentation, ou quelques sorties promotionnelles pour ses partenaires. "L'avantage, c'est que c'est nous, sans masque, dans notre état naturel", apprécie son coéquipier Benjamin Cavet. "Des moments sont plus compliqués que d’autres à filmer, j’essaie de partager le plus possible." Son avant-dernière vidéo revient notamment sur les coulisses de sa violente chute lors de la Coupe du monde à l’Alpe d’Huez en décembre, moment le plus difficile de sa saison.
Perrine Laffont comme Antonin Guigonnat ont dû cependant faire face à une certaine méfiance de l’entourage. "Au début, ça me prenait beaucoup de temps et les entraîneurs étaient un peu inquiets, avoue la championne du monde en titre de ski de bosses. Ils ne voulaient pas que je perde trop d’énergie, ils souhaitaient que je la garde pour le ski. Maintenant, je les sollicite même pour filmer." "Mes coachs n’accepteraient jamais de porter la caméra", se bidonne, en revanche, le natif d’Ambilly.
Les deux champions assurent que leur passion pour la vidéo leur apporte une grande aide dans la poursuite de leurs objectifs de performance. "Je perds peut-être de l’énergie mais ça me permet surtout de débrancher, d’oublier le biathlon", souligne Antonin Guigonnat. Une déconnexion jamais superflue quand les athlètes enchaînent les manches de Coupe du monde, cloîtrés en équipe pendant de longues semaines, parfois à plusieurs centaines de kilomètres de leur famille. "Ce projet parallèle me permet de ne pas être la tête dans le guidon, focalisée seulement sur la compétition", explique Laffont.
"C’est important de couper pour l’équilibre émotionnel, on peut ensuite aborder les compétitions avec détachement."
Perrine Laffont, championne olympique en ski de bossesà franceinfo sport
Si le moment n’est pas encore venu de prendre leur retraite sportive, l’idée d'une reconversion dans la vidéo pourrait-elle séduire le biathlète et la skieuse ? "Comme dans ma vie, j’avance un peu au jour le jour, je ne sais même pas si je vais faire ça tout l’hiver, répond le vice-champion du monde 2019 en mass start. Après ma carrière, est-ce que j’arriverai à en tirer un revenu en attirant des sponsors autour du sport ? Ce sont des questions que je me pose, mais que je laisse en suspens tant que je suis en compétition."
Le message n’est pas différent chez l'Ariégeoise de 23 ans : "Cela dépendra de quand et comment je vais arrêter. Je ne m’y projette pas trop. J’ai encore pas mal de travail à faire dans le ski." A commencer par un second titre olympique à aller chercher, dimanche.
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