JO 2024 : message sur Israël, excuses, sanction… Retour en cinq actes sur l'exclusion d'Emilie Gomis de son poste d'ambassadrice

Article rédigé par franceinfo
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L'ex-basketteuse Emilie Gomis, lors de la cérémonie des Sportel Awards, le 5 octobre 2021 à Monaco. (ARNOLD JEROCKI / GETTY IMAGES EUROPE)
L'ex-basketteuse a démissionné de son poste d'ambassadrice des Jeux olympiques de Paris. Une mission qu'elle occupait depuis novembre 2021.

Une story Instagram qui lui aura coûté son poste. L'ex-basketteuse française Emilie Gomis a dû quitter, mercredi 10 janvier, ses fonctions d'ambassadrice de Paris 2024, selon un communiqué du comité d'organisation des Jeux olympiques. Elle avait été choisie en novembre 2021 dans le cadre du label Terre de Jeux pour promouvoir la mobilisation de tous les territoires de France autour des Jeux olympiques de Paris. Une mission qui prend fin après une polémique déclenchée le 9 octobre et un message posté sur ses réseaux sociaux. Franceinfo vous résume cette affaire en cinq actes.

1 Elle s'exprime sur la guerre entre Israël et le Hamas

Le point de départ de cette affaire a lieu deux jours après les attaques meurtrières perpétrées par le Hamas le 7 octobre dernier. Emilie Gomis publie une story sur son compte Instagram, suivi par plus de 15 000 personnes. On y voit des cartes de France de 1947, 1967 et 2023, sur lesquelles le drapeau tricolore recouvrant l'Hexagone est progressivement remplacé par le drapeau israélien. L'illustration est assortie de cette question : "Que feriez-vous dans cette situation ?"

Ce message reste en ligne pendant 24 heures, avant que l'ancienne basketteuse ne le supprime. Un geste qui ne suffit pas à désamorcer la polémique : le comité d'organisation des Jeux olympiques et paralympiques (Cojo) saisit le comité d'éthique. En effet, la charte d'éthique de Paris 2024 préconise aux membres et aux salariés de l'organisation de respecter "un devoir de réserve dans leur expression publique".

2 Elle présente ses excuses mais ne convainc pas

Près de deux mois après, le 30 novembre, la sportive présente ses excuses sur le réseau social X : "Ma story du 9 octobre a suscité de nombreuses réactions et une émotion que je comprends. Je m'excuse auprès de ceux qui se sont sentis blessés. En ces moments difficiles, mes pensées vont à toutes les innocentes victimes touchées par les guerres et actes barbares qui se multiplient dans le monde. Les accusations d'antisémitisme auxquelles je fais face sont en totale contradiction avec les valeurs qui m'ont été inculquées et celles que le sport m'a enseignées".

La réaction du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) ne se fait pas attendre : quelques jours plus tard, il déclare que ce "message d'explication n'a en rien apaisé" la polémique. Il réclame dans la foulée que la joueuse soit "démise de ses fonctions d'ambassadrice de Paris 2024". On apprend par ailleurs que le président du Crif s'est entretenu quelques jours plus tôt avec Amélie Oudéa-Castera, la ministre des Sports, "pour lui dire son indignation".

3 Le comité d'éthique préconise son exclusion

Les excuses d'Emilie Gomis ne suffisent pas non plus au comité d'éthique de Paris 2024, qui préconise son exclusion lundi 11 décembre. Un simple avis, censé aider le comité d'organisation à statuer définitivement sur son cas. L'instance le justifie par le fait que la publication du 9 octobre "fait clairement référence à des événements concernant l'Etat d'Israël et la Palestine, en particulier la bande de Gaza, notamment le plan de partage de la Palestine par l'Organisation des Nations unies en 1947, la guerre des Six jours et le vote de la résolution 242 du Conseil de sécurité des Nations unies en 1967". Le comité va même plus loin, considérant que ce message peut suggérer "que la France de 2023, dont la carte est dominée par l'étoile de David, est, elle aussi, 'envahie par les Juifs'".

Le lendemain, Emilie Gomis réagit via ses avocats, dans un long communiqué. Elle y reconnaît "un post empreint de maladresse", mais explicite sa volonté d'"alimenter un débat d'intérêt général sur la problématique de la colonisation". En outre, elle s'estime "déshonorée et diffamée par les accusations d'antisémitisme dont elle est victime" et fait savoir qu'elle "n'entend pas démissionner de ses fonctions". Surtout, elle s'indigne de n'avoir été "à aucun moment invitée à s'exprimer".

4 Elle réitère ses excuses dans "L'Equipe"

La contre-offensive de la sportive se poursuit samedi 23 décembre dans une interview accordée à L'Equipe. Dénonçant une "chasse aux sorcières", l'ex-basketteuse affirme qu'elle n'a "en aucun cas (...) voulu légitimer ce qu'avait fait le Hamas". Elle ajoute : "Ce 9 octobre, j'ai réagi avec émotion, ma story a été blessante pour certains, je le reconnais. Je réitère mes excuses." Des excuses qu'elle déclare avoir également adressées à la ministre des Sports, Oudéa-Catésréa, dans une lettre envoyée plus tôt. 

Mais là encore, Emilie Gomis ne convainc pas. Fin décembre, David Lappartient, le président du comité de déontologie du comité national olympique et sportif français (CNOSF), décide de proposer la radiation de l'ancienne basketteuse pour "atteinte avérée aux principes éthiques". Elle est alors évincée de la commission des athlètes du CNSOF, selon les informations de l'hebdomadaire Le Point.

5 Emilie Gomis quitte définitivement ses fonctions

Quinze jours plus tard, la sentence tombe. L'assemblée générale de Paris 2024, réunie mercredi 10 janvier, "a estimé que cette publication contrevenait à son devoir de neutralité et ne lui permettait plus de pouvoir exercer sereinement ses missions", explique un communiqué. "Emilie Gomis, dans un souci partagé d'apaisement et de responsabilité, a souhaité présenter sa démission de son mandat de membre du conseil d'administration et d'ambassadrice du label Terre de Jeux 2024 à Paris 2024, qui en prend acte", précise le document.

Après avoir entendu Emilie Gomis et ses avocats, "les membres du conseil d'administration et de l'assemblée générale ont ainsi pu constater qu'Emilie Gomis condamnait les attentats du 7 octobre en Israël, toute forme d'antisémitisme ou de discrimination, contraires à ses valeurs. Emilie Gomis a également partagé ses regrets concernant sa publication et présenté ses excuses." Le comité d'organisation salue également dans son message "le parcours remarquable d'Emilie Gomis en tant qu'athlète, mais aussi ses engagements au service de la promotion de l'activité sportive de la jeunesse et des valeurs du sport et de l'olympisme".

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