JO de Paris 2024 : du kayak cross aux airs "d'Intervilles", au break, les Jeux olympiques deviennent-ils un show ?

Quatre sports, le surf, le skateboard, le break et l'escalade ont été ajoutés aux JO de Paris. Des disciplines qui se veulent modernes et spectaculaires.
Article rédigé par franceinfo: sport
France Télévisions - Rédaction Sport
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Les quarts de finale du kayak cross féminin, le 5 août 2024, sur le stade nautique de Vaires-sur-Marne. (BAPTISTE AUTISSIER / AFP)

"On se croirait sur Mario Kart." Comparé au célèbre jeu vidéo, tout comme à l'émission de télévision Intervilles, le kayak cross a fait une entrée remarquée dans le programme olympique... ou plutôt sur Twitter, le 2 août. A l'image d'autres sports récemment arrivés aux JO, comme le breaking ou l'escalade de vitesse, le kayak cross a placé le spectacle au cœur de Paris 2024 et n'a pas manqué de faire réagir. Tony Estanguet, le président du Comité d'organisation des Jeux olympiques et paralympiques (Cojop) avait vu juste, en affirmant sur franceinfo en septembre 2021, avoir intégré à Paris des "disciplines qui cartonnent sur les réseaux sociaux". Mais est-ce vraiment dans l'ADN des Jeux olympiques de miser sur des sports tendances et spectaculaires ? 

Pour l'historien Eric Monnin, vice-président à l'Olympisme au sein de l'université de Franche-Comté, rien d'incohérent. Les Jeux olympiques modernes, fondés par le baron Pierre de Coubertin en 1894, "ont toujours évolué avec la société". C'est même ce qui les différencie des Jeux antiques. "Eux ont la particularité d'être morts parce qu'ils sont restés comme ils étaient", explique le directeur du Centre d'études et des recherches olympiques universitaires (Cerou). Depuis 1894, les sports présents aux JO n'ont ainsi jamais cessé de se renouveler. Entre 1900 et 1920, le tir à la corde était, par exemple, au programme, tout comme le tir aux pigeons en 1900, lors d'une édition parisienne - organisée dans le cadre de l'Exposition universelle - qui devait "produire du spectacle, de la fête", confiait à franceinfo l'historien spécialiste des Jeux olympiques, Sylvain Bouchet, en février 2024.

"Une évolution logique" rythmée par des enjeux économiques

" Aujourd'hui, il faut que le sport soit de l'entertainment (divertissement), affirme de son côté Magali Tezenas du Montcel, spécialiste du marketing du sport. C'est une évolution logique des choses car on ne regarde plus le sport aujourd'hui comme il y a quelques années." Face à d'autres formes de divertissements comme le cinéma ou la musique, avec lequel il est en compétition, le sport se doit aussi "d'adopter les codes de l'entertainment", poursuit la directrice générale de l'association interprofessionnelle Sporsora.

Derrière, se cachent aussi des enjeux économiques. A travers l'intégration de sports spectaculaires et modernes - rendue possible grâce à l'adoption de "l'agenda 2020" en 2014, qui permet à chaque pays hôte de proposer des sports additionnels - le Comité international olympique (CIO) cherche à "intéresser les jeunes [...] en adaptant le programme olympique aux goûts actuels et aux nouvelles tendances". Une stratégie qui permet "d'élargir mais surtout différencier son audience et ainsi d'attirer des diffuseurs et de nouveaux sponsors", explique l'économiste du sport Jean-François Brocard. D'après Magali Tezenas Montcel, les revenus du CIO reposent, en plus, à "60% sur les droits de diffusion et à 30% sur les droits de marketing du programme des partenaires olympiques", niveau le plus élevé de parrainage olympique. 

Reste cependant à trouver un équilibre, avec un programme qui ravit à la fois les fans de sport et un public plus large. L'annonce de la présence du surf, du skate, de l'escalade et du breaking à Paris, aux dépens notamment du karaté, avait fait quelque peu polémique en 2021. Steven Da Costa, champion olympique de karaté à Tokyo, avait partagé sa colère auprès de l'AFP, considérant qu'on s'éloignait "totalement des valeurs des Jeux olympiques". "On parle d’argent, d’audience, on ne parle plus de sport", avait-il alors estimé. A Los Angeles, en 2028, le cricket "T-20", le squash, le flag football, la crosse et le baseball-softball ont été intégrés au programme olympique.

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