Paris 2024 : nombre de contrôles, nations ciblées... Sept questions sur le programme antidopage des Jeux olympiques

Article rédigé par Anaïs Brosseau
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 5 min
Une session de formation de contrôleurs antidopage pour les Jeux olympiques de Paris a été organisée au printemps 2023 à Saint-Denis. (FRANCK FIFE / AFP)
De l'ouverture à la fermeture du village olympique, la lutte antidopage sera gérée par l'International Testing Agency (ITA). Indépendante, l'institution conservera les échantillons durant dix ans.

Du 24 juillet au 11 août, 10 500 athlètes vont se disputer les podiums des 329 épreuves au programme des Jeux olympiques de Paris. Pour garantir l'intégrité des compétitions – et éviter la redistribution tardive de médailles gagnées par des tricheurs – des milliers de contrôles urinaires et sanguins seront menés durant l'événement. Franceinfo: sport vous détaille les contours du programme antidopage.

Qui est responsable du programme antidopage ?

En amont des Jeux olympiques, les agences nationales antidopage et les fédérations sportives internationales se chargent de tester les athlètes. Durant la quinzaine olympique, cette responsabilité pèse sur le Comité international olympique (CIO). Depuis les JO de Tokyo, en 2021, le CIO délègue l'organisation et réalisation des contrôles à l'International Testing Agency (ITA), autorité indépendante créée en 2017 à la suite du scandale de dopage d'Etat russe.

Comme à chaque édition, le comité d'organisation (Cojo) doit financer le matériel et les infrastructures et mettre à disposition le personnel nécessaire. Pour l'assister dans cette mission, il a décidé de s'appuyer sur deux prestataires : l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) et le Laboratoire antidopage français (LADF). 

Combien de contrôles seront menés ?

L'ITA projette de réaliser 6 000 tests, de l'ouverture à la fermeture du village olympique. Lors des précédents Jeux d'été, ceux de Tokyo en 2021, 30% des athlètes avaient été testés. Concernant les athlètes français, l'AFLD va mener 12 000 contrôles sur l'année 2024. "Le nombre pourra évoluer en fonction des besoins, selon les risques et les suspicions", précise Benjamin Cohen, directeur général de l'ITA. Les contrôles pourront être notifiés aux athlètes lors des compétitions ou en dehors (dans les hôtels, sur les sites d'entraînement...). Des stations de contrôle seront installées dans la quasi-totalité des sites des épreuves.

Des contenants pour recueillir un échantillon urinaire lors d'un contrôle antidopage. (FRANCK FIFE / AFP)

Des tests urinaires et sanguins seront réalisés. Autre méthode utilisée : le contrôle à partir d'une goutte de sang séchée. Moins intrusif et plus rapide, ce procédé consiste à venir piquer avec une mini-aiguille l'épaule ou le doigt du sportif. A partir des échantillons obtenus, le laboratoire pourra également, si besoin, mener des tests génétiques pour détecter certaines formes de dopage.

"L'ITA choisira qui contrôler, le moment et le type de contrôle, dira si des analyses spécifiques doivent être réalisées. Elle enverra ses ordres au centre de coordination et de commandement antidopage. Le Cojo et l'AFLD traiteront ces demandes en trouvant un préleveur et donnant l'ordre de mission", complète Jérémy Roubin, secrétaire général de l'AFLD.

Comment sont choisis les sportifs contrôlés ?

Le travail de l'ITA débute un an avant les JO. "On répertorie les athlètes susceptibles de se qualifier. On regarde le nombre de contrôles auxquels ils ont été soumis. Et on fournit des recommandations aux agences antidopage nationales", décrit Benjamin Cohen. Ces préconisations s'appuient sur "une analyse des risques" menée par l'institution indépendante basée en Suisse.

Entrent en jeu le type de sport (les disciplines d'endurance ou de force, comme l'athlétisme ou l'haltérophilie, sont plus à risques que celles de précision, comme le tir), l'origine géographique et le passé de chaque athlète. "Pour classer les délégations, on considère l'indice de perception de la corruption de Transparency International, l'historique de dopage du pays, le développement de son agence nationale antidopage", énumère le directeur général de l'ITA. Durant les JO, l'agence investira davantage de ressources sur les sports, délégations et athlètes les plus à risques.

Pour cette édition, l'ITA pourra aussi compter sur les pouvoirs d'enquête et d'investigation, renforcés en 2021, de l'AFLD, et les relations nouées par l'agence avec moult acteurs (les douanes, l'Oclaesp, qui est le service de police compétent pour la lutte contre le trafic de produits dopants, l'administration fiscale...). "On doit pouvoir faire ouvrir des valises à l'aéroport en cas de suspicion. Cela reste novateur", assure Benjamin Cohen.

Combien de personnes sont mobilisées ?

Le programme antidopage des Jeux olympiques va mobiliser un millier de personnes. La fonction centrale est occupée par les préleveurs. Ils accompagnent les sportifs dans l'intégralité du processus de prélèvement, mais sans rien toucher eux-mêmes pour éviter toute contestation future. Ils seront 300, dont un tiers travaille déjà pour l'AFLD.

Tous les préleveurs auront reçu une certification de niveau international auprès de l'ITA. Pour renforcer l'effectif français, cette dernière et l'AFLD ont recruté et formé 31 nouveaux préleveurs en 2023. Une partie d'entre eux restera dans le vivier de l'agence française après les JO.

A leurs côtés seront présents 500 chaperons, sélectionnés dans le bataillon de volontaires, qui notifient l'athlète de son contrôle, lui expliquent ses droits et obligations et l'accompagnent jusqu'à la salle de contrôle. Plusieurs dizaines d'entre eux ont déjà officié pour l'AFLD. "Cela permet au Cojo de disposer de personnes expérimentées sur lesquelles s'appuyer", glisse Jérémy Roubin.

Enfin, le laboratoire comptera jusqu'à une centaine de personnes et une trentaine d'experts de l'ITA se rendront à Paris.

Sous combien de temps tomberont les résultats ?

Le résultat tombera très vite "pour maintenir l'intégrité du sport", promet le directeur général de l'ITA. "En principe, selon les standards internationaux, le résultat doit être connu sous vingt-et-un jours. Pendant les Jeux, le processus est accéléré afin que le résultat soit divulgué sous vingt-quatre heures", indique Benjamin Cohen. A Paris, le délai pourrait s'allonger jusqu'à quarante-huit heures "au vu du budget serré", justifie le patron de l'autorité internationale indépendante de contrôle. Lors des Jeux de Tokyo, six contrôles s'étaient révélés positifs.

Que se passe-t-il en cas de résultat positif ?

Après un premier processus de vérification, l'athlète a le droit de demander l'analyse de son échantillon B et d'y assister. La procédure prend quelques heures. "Si le résultat de l'échantillon B confirme le contrôle positif, l'athlète est suspendu provisoirement. Puis, un juriste de l'ITA présente de manière indépendante l'affaire devant le Tribunal arbitral du sport [TAS]", expose Benjamin Cohen. Pour permettre une étude rapide des dossiers, une chambre ad hoc du TAS prendra ses quartiers cet été à Paris. De quoi permettre aux juges de statuer sous vingt-quatre à quarante-huit heures, contre plusieurs mois habituellement.

Que deviennent les échantillons ?

Le code mondial antidopage autorise l'ITA à conserver les échantillons pendant dix ans. Ils seront réanalysés en cas de suspicion ou d'avancées technologiques dans la détection de substances interdites. "En général, si le budget nous le permet, juste avant la fin du délai des dix ans, on lance une large campagne pour tout réanalyser", précise le directeur de l'ITA. Les classements de Paris 2024 pourraient donc évoluer jusqu'en 2034.

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