ENTRETIEN. "Le potentiel imaginaire de la Seine est quasiment sans limite", se félicite Thierry Reboul, directeur des cérémonies de Paris 2024
Le directeur exécutif de la marque, des événements et des cérémonies de Paris 2024 dévoile pour franceinfo: sport les grands principes de la cérémonie d'ouverture prévue sur la Seine.
Les Jeux olympiques de Paris 2024 sont déjà demain. Lundi 13 décembre, l'organisation a officialisé que la cérémonie d'ouverture se produira sur la Seine, entre le pont d'Austerlitz et celui d'Iéna, le 26 juillet 2024. Thierry Reboul, directeur de la marque, des événements et des cérémonies de Paris 2024, livre en exclusivité pour franceinfo: sport les principes fondateurs de cette cérémonie inédite.
Franceinfo: sport : Comment l'idée de cette cérémonie d'ouverture sur la Seine est-elle apparue ?
Thierry Reboul : L’idée de faire une cérémonie hors du stade est dans l’air du temps depuis un moment. Les Jeux olympiques de la jeunesse de Buenos Aires en 2018 ont été les premiers à passer à l’acte. Puis, quitte à la faire hors du stade, quel était le lieu le plus ambitieux, spectaculaire, populaire pour faire cela ? La première fois que j’ai posé l’idée sur le bureau de Tony Estanguet, c’était le 18 juillet 2019. Ca faisait quelques mois qu’on travaillait dessus. Ensuite, on a enclenché une série d’études complémentaires pour creuser tous les grands sujets sur lesquels on devait avoir des réponses : comment on amène les athlètes, comment on les répartit, à quelle vitesse le cortège doit aller, combien de temps cela prend, quand arrive le premier bateau, le dernier, comment faire pour débarquer les 10 500 athlètes au Trocadéro.
Puis la dernière phase, celle qui a duré une année, était d’étudier avec les différents acteurs impactés qu’il n’y avait pas, dans leur domaine, de points bloquants qu’on n'aurait pas vus.
"Ce sont des dizaines de réunions de travail, des heures d’études pour arriver à la signature d’une convention qui donne les grands principes et acte définitivement la faisabilité de ce projet."
Thierry Reboulà Franceinfo: sport
Quelles sont les principales contraintes logistiques, artistiques et sécuritaires ?
Même si on a déjà illustré ce que ça pourrait être, la partie créative n'est pas aboutie. Ce n’est pas celle qui est la plus bloquante car il suffit de se balader sur les six kilomètres pour voir que le potentiel imaginaire est quasiment sans limite. Sur le côté logistique, on a étudié la question des bateaux, de la vitesse, des quais d’embarquement et de débarquement. Le deuxième sujet a été organisationnel : comment fait-on tout ce qu'on a à faire dans un temps imparti ? Et le troisième point, c'est l’aspect sécurité pour vérifier avec l’ensemble des services qu’on savait sécuriser dans de bonnes conditions. On est arrivés à un partage de responsabilités : les quais bas sont sous la responsabilité des organisateurs, les quais hauts sous la responsabilité de l’Etat.
Quel est l'objectif de cette cérémonie sur la Seine ?
Comment faire pour qu’un maximum de gens et en grande partie gratuitement assistent à la cérémonie : voilà le bénéfice fondamental de cette cérémonie. Le point de départ de tout, c’est de savoir si on peut passer de 60 000 personnes qui ont payé des billets chers et qui sont des privilégiés, à 600 000 dont l’essentiel aura un accès gratuit.
Même si la partie artistique sera travaillée à partir de 2022, savez-vous déjà quelle histoire Paris 2024 souhaite raconter ?
Créativement parlant, on a regardé si en posant un certain nombre d’idées, cela générait bien l’imaginaire que l'on cherchait. Mais ce n’est pas à proprement parler la création de la cérémonie d’ouverture. Aujourd’hui, on valide un lieu qui est totalement nouveau, révolutionnaire. Et à partir de là, on s’attachera à écrire l’histoire que l’on veut raconter, c’est la prochaine phase. Pour que ça fonctionne, il faut qu’on soit mobiles, qu'on n’hésite pas à utiliser tel endroit ou tel élément pour raconter une histoire complète. On aura une mobilité avec les bateaux sans savoir véritablement ce qu’on va mettre dessus. Et on va pouvoir aller déguster, picorer un certain nombre d’endroits pour projeter sur un musée, organiser quelque chose sur les toits, dans les airs.
"Pour que ce spectacle soit total, on va devoir mélanger tous ces éléments pour qu’il atteigne sa pleine dimension. On a tous les symboles de la France sous la main pour nourrir l’histoire que l’on veut raconter."
Thierry Reboulà Franceinfo: sport
L'idée est d'avoir un spectacle non seulement sur l'eau mais aussi sur les ponts, les berges ?
Il faut réfléchir en cinq dimensions : vertical, horizontal, en l’air, sur terre, sur l’eau. On a le potentiel d’en faire sans doute l’un des plus grands spectacles au service d’un message précis.
Selon les visuels, des artifices sur l'eau pourraient être utilisés ?
Lorsqu’on traverse ce fleuve, on traverse des siècles d’histoire. L’histoire vous entoure, partout. On veut mettre en face une incroyable modernité créative et artistique. Parce qu’on pense que c’est le dialogue entre les deux qui crée un spectacle étonnant. On n’a pas besoin de rajouter trop d’histoire à l’histoire, elle est déjà là. Rajoutons la modernité, l’avant-garde française dans la création pour obtenir un cocktail incroyable.
Savez-vous comment l'embarquement des athlètes s'effectuera ?
Oui, en l’état actuel du projet, mais ce n’est pas gravé dans le marbre. On sait très bien que des choses vont bouger. On a cartographié tous les quais, on les connaît mètre par mètre, c'est pour cela qu’on sait exactement combien de mètres sont nécessaires pour embarquer et débarquer. On sait sur le papier quel pays arrive où et à quel moment, et comment on l’achemine à la zone d’embarquement ou au Trocadéro.
Peut-on imaginer un bateau par délégation ?
On a 206 pays, il est prévu 162 bateaux donc majoritairement oui, et dans un certain nombre de cas, on mettra deux pays sur un bateau. Le nombre de bateaux est acté sur le principe. Demain, quand cela va s’affiner en regardant le nombre d’athlètes pays par pays, on sera susceptible d'en enlever ou d’en ajouter quelques uns.
Comment les répétitions pourraient-elles se dérouler ?
C’est un des gros sujets sur lequel on a déjà réfléchi et auquel on va s’attaquer dans le détail à partir de 2022. On va vraisemblablement s’inspirer d’événements comme le 14 juillet. Il y a des répétitions qui se font sur site, mais jamais entièrement pour garder un effet de surprise. Si des gens voient des éléments, ils ne pourront pas avoir une visibilité globale. Donc des répétitions sur la Seine, le soir ou la nuit, toujours par morceau. On va aussi réfléchir au fait de pouvoir faire des répétitions hors Paris. La Seine est grande et on va se mettre en quête de lieux qui ressemblent au parcours choisi.
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