Cet article date de plus de deux ans.

JO-2024 : "Le budget de base n'est pas très sincère", estime un économiste

Selon Jean-Pascal Gayant, l'enveloppe prévisionnelle de 7 milliards d'euros est sous-évaluée et ne tient pas compte de l'inflation. Une augmentation des prix qu'il est toutefois difficile d'anticiper.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Emmanuel Macron et Elisabeth Borne ont réuni une partie du gouvernement lors d'une "réunion de chantier" au sujet des Jeux olympiques de Paris-2024, lundi 25 juillet 2022 à l'Elysée. (LEWIS JOLY / POOL)

À presque deux ans jour pour jour de la cérémonie d'ouverture des JO de Paris 2024 (du 26 juillet au 11 août 2024), Emmanuel Macron organise lundi 25 juillet un "point d'étape" avec les ministres et responsables. Le chef de l'État a souhaité discuter des deux défis principaux : le budget et la sécurité de l'évènement. Jean-Pascal Gayant, professeur de sciences économiques à l'université du Maine et économiste du sport, estime sur franceinfo que "le budget de base n'est pas très sincère" et qu'il va se creuser en raison de l'inflation.

franceinfo : À quel point est-on en retard sur les travaux préalables au JO ?

Jean-Pascal Gayant : On est toujours en retard au moment de terminer les travaux - c'est d'ailleurs une des causes du dépassement systématique des enveloppes - sauf que, contrairement à une bibliothèque ou à une piscine municipale où on a toujours six mois ou un an de retard à la livraison et où ça n'a pas d'importance, quand il s'agit des Jeux olympiques, il faut démarrer à la date prévue. Ça veut dire qu'il faut mettre les bouchées doubles pendant trois à quatre mois : on travaille de nuit, en heures supplémentaires et cela coûte toujours plus cher que prévu, même si on s'y met maintenant et même si on s'y est mis déjà depuis plusieurs années.

De quelle manière ce retard se traduit-il sur le budget des JO ?

Le problème, c'est qu'il y a un budget de base qui n'est pas très sincère. On a d'un côté le budget du comité d'organisation local qui est un budget de maintenance de 3,9 à 4 milliards d'euros et de l'autre il y a le budget de la société de livraison des équipements publics qui donne 3,4 milliards. Ce sera très difficile de tenir la parole puisque si on fait le total, on est à 7 milliards d'euros alors que les JO précédents ont tous été au-delà des 10 milliards.

On voit très mal comment, avec un périmètre équivalent et un nombre d'athlètes qui croît d'olympiade en olympiade, on pourrait revenir de 10 milliards ou plus à 7 milliards. Encore moins avec l'inflation.

Jean-Pascal Gayant, économiste

à franceinfo

Si on raisonne sur une inflation de 9 % ou 10 % cette année et peut-être encore au moins 5 % ou 6 % l'année prochaine jusqu'à 2024, on arrive à 20% de plus en tout. Donc, si on parle de 7,4 milliards et qu'on rajoute 20 %, on voit tout de suite qu'on a 9 milliards : c'est un petit peu ce que disent depuis le début les gens qui connaissent bien cette mécanique des Jeux olympiques et qui disent "le budget, il est très sympathique, mais globalement, il y sera supérieur." Après, il faut voir qu'il y a une surchauffe inflationniste qui n'était pas anticipable au moment de l'attribution des Jeux.

Côté sécurité, il manquerait encore 10 000 à 15 000 agents sur les 20 000 à 25 000 nécessaires à l'été 2024. Comment évaluez-vous ce retard ?

On est en retard dans le sens où il sera toujours difficile de former le personnel nécessaire : c'est compliqué, la sécurité, compliqué de trouver des gens qui ont le bon profil et c'est compliqué de les former rapidement. À Londres [les JO d'été de Londres en 2012], on a eu un surcoût de la sécurité qui a été lié à cela aussi, même si c'était une situation où il y a eu des attentats juste après l'annonce de l'attribution. Il y a eu aussi des sociétés privées, mais il a fallu compléter avec des militaires. Peut-être qu'on en arrivera à la même chose. Il y a évidemment des forces de police et de gendarmerie qui seront présentes pour sécuriser les JO-2024, mais on a besoin d'un appoint conséquent et cet appoint est très compliqué à faire et coûte cher. On sait déjà qu'on aura du mal à avoir exactement le nombre de gens compétents et formés au moment du début des Jeux. La cérémonie d'ouverture sera un défi énorme, mais je crois qu'il y a aussi un travail à faire tout au long des Jeux, sur des choses très nouvelles comme des attaques de drones, par exemple.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.