Témoignages Paris 2024 : "La grande désillusion" des particuliers qui espéraient louer leur appartement à des prix vertigineux

Article rédigé par Audrey Abraham
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
La plateforme Airbnb rappelle que "les hôtes fixent librement leur prix." (AUDREY ABRAHAM / RADIOFRANCE)
En Île-de-France, de nombreux appartements mis à la location à des tarifs excessifs pour la période des Jeux olympiques n'ont pas encore trouvé preneurs.

S'il y a bien un avantage sur lequel les Franciliens misaient avec l'organisation des Jeux de Paris 2024, c'est l'opportunité de louer (ou de sous-louer) leur appartement à prix d'or à des visiteurs, le temps de leur absence dans la capitale. Certaines prédictions leur promettaient même de pouvoir multiplier par dix le tarif de la nuitée. Nombreux sont ceux à s'être transformés en agents immobiliers le temps de quelques semaines : inscription sur les plateformes de locations, petites annonces sur les réseaux sociaux... Mais à moins de trois mois du début de la compétition, le fantasme de gains mirobolants s'éloigne peu à peu.

Chloé, 29 ans, a mis son appartement à la location en mars dernier pour la période du 27 juillet au 11 août. Un deux-pièces, d'une quarantaine de mètres carrés dans le 10e arrondissement de Paris, pour "300 euros la nuit." C'est un peu plus du double du tarif auquel elle le loue certains week-ends de l'année. Mais depuis la publication de son annonce, elle n'a reçu aucune sollicitation, pas même une demande de renseignements : "Ça n'a pas pris du tout."

"Des prix délirants"

Alors Chloé a diminué le prix : "On l'a baissé petit à petit : d'abord de 50 euros, puis de 100 euros... Je crois que maintenant il est à 180 euros la nuit. Donc on est proche du prix que je pratique d'habitude mais on n'a toujours aucune demande." Et la jeune femme n'ira pas plus bas : "Je ne vais pas brader mon appartement. J'ai un prix de base et je n’ai pas envie de le baisser plus que ça." Autour d'elle, le constat est le même : "J'ai plein d'amis qui sont dans cette situation. Je pense qu'il fallait s'y prendre plus tôt, quand il y avait encore l'engouement de Paris 2024, que les gens ne se disaient pas que ça allait être le bazar et mal organisé..."

Vincent* et sa femme, un couple de jeunes retraités, sont dans la même situation : "Aucune demande, aucune touche, rien du tout. C'est la grande désillusion." En octobre dernier, ils ont mis à la location leur appartement d'une centaine de mètres carrés dans le 7e arrondissement, à deux pas de la Tour Eiffel. "C'est le lieu idéal et malgré ça, la demande n'est pas là. On nous faisait miroiter la poule aux œufs d'or, en nous disant que les prix allaient s'envoler et que c'était une occasion qui se présentait une fois tous les cent ans."

Pour fixer le prix de départ, 3 000 euros la nuit, le couple a consulté les tarifs pratiqués pour des biens équivalents : "On a vu que le voisin de l'immeuble d'à côté proposait un certain prix donc on s'est alignés sur ce prix qui paraissait, déjà à l'époque, délirant. Et le délire s'est concrétisé !" Depuis, sur les conseils d'une conciergerie, Valérie et Vincent ont divisé le prix par deux : "Je crois qu'on va s'arrêter là parce qu'après ça représente un intérêt moindre du point de vue financier. Il y a la commission prise par le site, les frais de déplacement de meubles et les impôts bien sûr parce que toutes les sommes sont à déclarer." Le couple le constate : "Le prix reste très élevé et il n'y a pas la demande. Pas pour des prix délirants !"

"Beaucoup de fausses idées"

Face à l'absence de demandes, Charlotte* et son compagnon, propriétaires d'un appartement de 40 m2 dans le 11e arrondissement de la capitale, ont finalement renoncé : "On était prêt à le louer à partir du moment où c'était vraiment intéressant financièrement. Si ça ne l'est pas tant que ça, vu que c'est notre petit nid douillet, notre résidence principale, on a aussi envie de le préserver." Le couple reconnaît avoir fixé un tarif de départ "assez élevé" en se renseignant notamment sur internet : "On s'est alignés sur les tarifs qui étaient affichés, à savoir en moyenne 500 euros la nuitée. Nous, on l'a mis un peu en dessous : 400 euros pour un appartement de quatre couchages."

"Bien trop cher", estime finalement Charlotte. "Il y a quelques mois, il y avait beaucoup d'engouement à propos de la location d'appartements pendant les JO. Beaucoup de fausses idées sur cette période qui pourrait permettre aux Parisiens de louer leurs biens excessivement cher." Ces dernières semaines, sur les plateformes de location, le couple a remarqué une diminution des tarifs "en moyenne divisés par deux", pour des offres équivalentes.

D'après le baromètre mensuel Lycaon pour Le Parisien, en un mois les tarifs des biens mis en location pour la période des JO ont chuté de 13 %, passant de 1 021 à 886 euros en moyenne la nuit. Les annonces, elles, ne cessent d'augmenter dépassant les 11 500 biens recensés sur les principales plateformes spécialisées.

"Les hôtes fixent librement leurs prix", rappelle Airbnb

C'est aussi ce que constate Airbnb qui précise à franceinfo que l'augmentation de l'offre disponible régule le marché. La plateforme estime "une hausse des tarifs de 85% en moyenne en Île-de-France" sur la période des Jeux. Elle rappelle que "les hôtes fixent librement leur prix" et souligne qu'une page a été créée à destination des hôtes pour les aider dans leurs démarches sur la période. Un rapport du cabinet d'audit Deloitte estime que les locations généreront en moyenne 2 000 euros de revenus supplémentaires par hôte en région parisienne.

Airbnb tient, par ailleurs, à rassurer les hôtes : "Les recherches et réservations sont de plus en plus nombreuses sur la plateforme et devraient s’accentuer d’autant plus dans les semaines et mois à venir." Paris 2024 est "en passe de devenir le plus grand événement de l'histoire d'Airbnb, ajoute la plateforme. Avec plus de voyageurs séjournant chez des hôtes locaux que lors de n'importe quel événement auparavant."


*Les prénoms ont été modifiés

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