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JO 2016 : Le compère de Jérémie Azou en deux de couple poids léger, Pierre Houin, a trouvé sa place

C’est le petit nouveau de l’équipe de France d’aviron pour les JO. Dans l’ombre du duo Delayre-Azou, champion du monde du deux de couple poids léger en 2015, Pierre Houin est arrivé en pleine lumière quatre mois avant les Jeux. Il a délogé Stany Delayre et s'est envolé pour Rio. Place qu’il espère sous un soleil doré au Brésil. Il dispute ce mercredi avec son compère la demi-finale. Portrait.
Article rédigé par franceinfo
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Mieux vaut tard que jamais. Pierre Houin a sans doute songé à l'adage au moment de plonger dans ses premiers Jeux. Habitué à être la troisième roue de la moto du deux de couple poids léger derrière le duo Delayre-Azou, le jeune homme de 22 ans a gagné sa place dans l’embarcation olympique pour Rio dans le bassin de Cazaubon aux championnats de France. Le 3 avril dernier, il devance Stany Delayre et grimpe dans le bateau. Encore faut-il valider sa place définitivement. Ce sera chose faîte après les victoires en Coupe du monde à Lucerne et Poznan avec Jérémie Azou. Ce n’est qu’après la Pologne que Pierre Houin a pu souffler et ne plus craindre pour sa place. "C’est un très gros soulagement, avoue-t-il, c’est seulement depuis Poznan que ça devient plus facile humainement, c’est réglé désormais".

Le duo Azou-Houin avait été officialisé par la Fédération après Lucerne, mais il "fallait confirmer" à Poznan. "Il fallait qu’on gagne pour que je me dise que j’étais sûr d’aller aux Jeux. Dans ma tête, je n’étais pas encore inscrit, il fallait qu’on prouve qu’on pouvait s’imposer sur toutes les étapes de Coupe du monde. Le test est terminé, je réalise que je vais aux JO que maintenant", avouait-il quelques jours après l’étape polonaise. Il aurait aussi eu la politesse de ne pas s’imposer si l’expérience s’était ponctuée par un échec : "si on avait fait deuxième à Lucerne, je serai descendu moi-même du bateau", tranche-t-il.

Dur pour lui aussi

Etre l’homme qui brise le duo champion du monde en 2015 à Aiguebelette n’est pas forcément une position enviable. Pierre Houin était triste de l’issue pour le duo mythique mais ne s’excuse pas pour autant. "Les jours qui ont suivi Lucerne n’ont pas été très roses, avoue-t-il. C’est une bonne nouvelle pour ma carrière, mais Stany est sorti du bateau. J’ai tout fait pour le battre, je n’ai pas de scrupule, mais émotionnellement c’était compliqué. Cela m’a fait chier pour Stany, mais je n’allais pas dire non. C’est quelqu’un que j’ai toujours pris en exemple, je ne pensais pas encore récemment être en compétition avec lui pour aller aux JO. Mais en m’entraînant, on l’a été. C’est quelqu’un que je respecte énormément, j’étais le premier à admirer la paire Azou-Delayre, c’était les meilleurs… c’était Azou-Delayre quoi ! Mais j’ai pris ce qu’on me proposait et ce n’est pas parce que c’était eux que j’allais les épargner".

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La voix est posée mais ferme. Le jeune homme sait par où il est passé pour en arriver là. De ses débuts en 2005 avec ses potes dans le club de Toul où il a suivi son grand-frère, Philippe, il est le seul rescapé. "Ils ont tous arrêté depuis, sourit-il, pourtant ils avaient des gabarits immenses donc ce n’était pas forcément moi qu’on repérait en premier". C’est avec son inscription aux championnats de France juniors en skiff (épreuve individuelle) qui a lancé la machine. Ce fils d’une mère cuisinière et d’un père qui travaille aux Voies Navigables de France a fait les sacrifices qu’il fallait : le régime strict pour rentrer dans les clous – un rameur ne peut pas excéder 72,5kg en poids léger et la moyenne du duo ne peut pas dépasser 70kg –, le volume d’entraînement à encaisser. "C’est quelque chose de très lassant comme sport, donc c’est difficile de penser en terme de carrière", avoue-t-il.

"Si je peux aider..."

Ce n’est pas à Lucerne cette année que Pierre Houin a ramé pour la première fois avec Jérémie Azou. Le projet Rio s’est construit à trois (Azou, Delayre et Houin) et les stages hivernaux avaient servi de tests pour différentes associations. En Afrique du Sud, les deux hommes ont pu apprendre à se connaître, à développer une affinité sur le bateau. Pierre sait que c’est à lui de faire les efforts pour s’accorder avec son nouveau partenaire, "le meilleur rameur du monde, toutes catégories confondues", d’après lui. "C’est un métronome, un repère fiable sur lequel je dois me greffer, détaille-t-il, mais il ne faut pas que je me contente de le suivre, il faut que j’apporte ma touche". Justement que peut-il apporter à cette embarcation qui fonctionnait très bien sans lui ? "Ma fraîcheur physique, ma spontanéité et mon punch dès les premiers coups de rame", énumère-t-il. Qu’en pense l’autre intéressé, Jérémie Azou ? "Pierre a de grosses qualités de puncheur, il a du talent, du potentiel et cette fraîcheur qui fait qu’il a envie d’apprendre". Et pour ne rien gâcher, le jeune homme est "facile à vivre, a de l’humour". "Ca rend les stages sympas et ça évite de trouver le temps trop long entre quatre murs et dans le même bateau", sourit le grand blond.

Les deux victoires à Lucerne et Poznan ont rassuré sur le potentiel du bateau qui va encore progresser avec le stage pré-JO. Pour ses premiers Jeux, Pierre Houin se sait dans une situation enviable, celle "de participer pour gagner". La pression et le poids du passé qui entoure la paire Delayre-Azou, il préfère ne pas y penser. "Je ne suis pas en mission par rapport à ce qu’il s’est passé à Londres, Jérémie y pensera sûrement, mais ce n’est pas ma revanche. Mais si je peux aider…", glisse-t-il. A Rio, il devra toutefois vaincre une de ses craintes. Zika ? Non, c’est beaucoup plus paradoxal pour celui qui brigue une médaille d’or aux JO. "Je déteste n’être qu’entre sportifs", avoue cet étudiant en licence de commerce international à Nancy qui aimait l’université pour le melting-pot qu’elle permet et l’équilibre qu’elle lui apporte. Pourtant pendant 15 jours, il devra forcer sa nature. Et en même temps, cela se mérite une médaille olympique…

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