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Le rugby à 7, l'ovalie version mondialisée

La Coupe du monde de rugby s’est achevée ce week-end sur une victoire de l’Afrique du Sud contre l’Angleterre (32-12). En neuf éditions de la compétition, seules quatre équipes différentes ont déjà remporté le Graal, la faute à une hiérarchie des nations difficile à bousculer. Dans l’antichambre du rugby à XV, le rugby à 7, devenu discipline olympique en 2016, se développe, lui, partout dans le monde.
Article rédigé par Denis Ménétrier
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 6min
  (BEN STANSALL / AFP)

En plus d’avoir parfaitement organisé cette neuvième édition de la Coupe du monde, le Japon a fait office de surprise dans la compétition, atteignant les quarts de finale. Quatre ans auparavant, lors de l’édition 2015 en Angleterre, les Brave Blossoms avaient déjà étonné le monde de l’ovalie en s’imposant dès leur premier match face à l’Afrique du Sud (34-32). Mais ces moments inattendus lors d'un Mondial sont rares et le Japon fait office d’anomalie.

La faute à une hiérarchie sclérosée en rugby à XV, où seules quatre équipes (Afrique du Sud, Australie, Angleterre et Nouvelle-Zélande) ont remporté l’une des neuf éditions de la Coupe du Monde. Où seules treize nations ont déjà atteint le stade des quarts de finale et où seules 25 se sont qualifiées pour la compétition. Le rugby à XV n’est en effet pas mondialisé, un constat que dresse Carole Gomez, membre de l’IRIS (Institut de relations internationales et stratégiques) dans son ouvrage Le rugby à la conquête du monde : Histoire et géopolitique de l’ovalie. "La fédération (World Rugby) est loin d'être internationalisée, avec seulement 124 membres en son sein alors que les fédérations de football ou de handball en comptent plus de 200", souligne la chercheuse.

En parallèle, le rugby à 7, pratique dérivée du rugby à XV créée dans la deuxième moitié du XXe siècle, fait son petit bonhomme de chemin et attire de plus en plus de joueurs sans faire de bruit. De nombreuses fédérations nationales voient le jour et le rugby à 7 brasse plus de monde : "C'est plus universel, il y a beaucoup plus de nations qui y jouent qu'au rugby à XV", explique Jérôme Daret, ancien professionnel en rugby à XV et sélectionneur de l'équipe de France de rugby à 7.

L'appât de la médaille olympique

Résultat : que ce soit dans les fédérations émergentes ou dans les fédérations historiques comme la Nouvelle-Zélande, l'Afrique du Sud ou encore l'Angleterre, "on constate une réorientation d'un certain nombre de crédits du rugby à XV vers le rugby à 7", déclare Carole Gomez avant de poursuivre : "Cette discipline est prise très au sérieux depuis quelques années." Et plus précisément depuis 2009, date à laquelle le Comité international olympique (CIO) annonce que le rugby à 7 devient une discipline olympique. En 2016, à Rio au Brésil, et pour la première fois depuis 1924, le rugby fait son retour aux Jeux Olympiques. À l'époque, les Fidji remportent l'or face à la Grande-Bretagne en finale, le pays remportant la première médaille olympique de son histoire.

En voyant l'exploit des Fidji, de multiples fédérations se tournent donc vers le rugby à 7, "dont un certain nombre n'étaient pas du tout intéressées jusque-là par le rugby", précise Carole Gomez. "Le meilleur cas, ce sont les États-Unis", souligne Jérôme Daret. "En XV, ils n'ont jamais réussi à passer un cap, mais ils font partie des meilleures nations en 7 et ont été les premiers au classement mondial pendant une bonne partie de l'année dernière. D'autres équipes sont redoutables, comme la Jamaïque, la Chine, ou l'Espagne qui a battu les All Blacks l'année dernière. On a même pris 36-0 il y a deux ans contre la Papouasie-Nouvelle-Guinée", sourit le sélectionneur français, dont l'équipe jouera sa qualification aux JO de Tokyo en juin prochain.

Briller dans un sport où la hiérarchie est réputée pour être figée

L'investissement de tous ces pays dans le rugby à 7, dont la Chine et les États-Unis, s'explique donc par la possibilité de remporter une médaille olympique. Une manière de faire briller son pays en remportant la compétition. "Le fait d'être qualifié ou d'être aux portes de la qualification pour le tournoi olympique est aussi très recherché par les pays", ajoute Carole Gomez, car les nations cherchent à rayonner par le biais du sport, là où on ne les attend pas, à savoir en rugby, discipline où la hiérarchie est réputée pour être figée.

Et si les fédérations fourmillent aujourd'hui à travers le monde, c'est précisément parce que la hiérarchie n'est pas encore fixée et que les chances d'obtenir une médaille ou de se qualifier pour le tournoi olympique sont élevées, comme l'explique Carole Gomez : "Dans le rugby à 7, tout reste à faire et si des moyens sont mis à destination par les fédérations, il est possible de faire émerger des équipes extrêmement performantes en l'espace de quelques années." C'est le cas de l'Allemagne par exemple, "qui avance très rapidement et très sérieusement", admet Jérôme Daret.

Alors que dans le monde de l'ovalie à XV, les avis divergent sur le développement de la pratique du 7, Jérôme Daret soutient l'idée que les deux disciplines doivent se compléter et être bénéfiques mutuellement : "Le rugby à 7 est un outil qui développe la pratique du haut niveau. Ça apporte énormément de choses en termes de développement technique, mental, physique, stratégique ou encore tactique."  Que du positif donc pour le rugby à 7 qui devrait continuer de se développer dans les années à venir, à condition que la discipline, prévue au programme du tournoi olympique jusqu'en 2024, soit présente aux futurs Jeux. "Les résultats des Jeux de 2016 à Rio ont été au-delà des espérances, donc le rugby à 7 est bien parti pour rester une discipline olympique", rassure Carole Gomez. Et pour en obtenir la confirmation, rendez-vous à Tokyo l'été prochain.

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