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Un adieu aux larmes pour Laura Flessel

L’épéiste guadeloupéenne a tiré sa révérence sur une défaite en huitièmes de finale. Très émue à l’issue de son match, elle n’a pas pu retenir ses sanglots devant la presse. La plus célèbre escrimeuse française restera à jamais la première tricolore championne olympique d’épée.
Article rédigé par Grégory Jouin
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 6min
 

Soutenu par tout un pays, son clan habituel, les membres de la fédération mais aussi la Ministre des Sports et le Président de la République François Hollande, Laura Flessel a pourtant échoué sur l’ultime objectif de sa brillante carrière, à savoir rapporter une sixième médaille olympique.

La double championne olympique d’Atlanta a pourtant livré l’un des plus émouvants combats de son parcours, d’abord en se qualifiant pour les JO -au dernier moment, ce qui n’était pas évident, ensuite en embêtant longtemps Simona Gherman, championne d’Europe 2012, finalement victorieuse 15-13. Flessel a même tenu à s’en aller sur une ultime touche simultanée, histoire de dire « je ne pars pas sur un point perdu ».

"De la tristesse, forcément"

« La Guêpe » peut se targuer de ne pas avoir fait de figuration aujourd’hui. A 40 ans, elle n’a plus ses jambes de feu mais elle suscite toujours le respect de ses concurrentes. Elle quitte la grande scène du sport de haut niveau non sans regret mais avec le sentiment du devoir accompli.

« C’était l’aventure », a-t-elle confié après avoir reculé d’un pas devant la nuée de micros tendus. « Forcément on est déçu quand on perd. Je me suis battue, elle était plus forte. Mais pendant tout le match, j’ai senti des ondes positives, des vibrations, des encouragements qui m’ont permis de remonter », a-t-elle poursuivi. « A ce moment-là, je ne pensais qu’à ce match et pas à l’après-match. Mais une fois que l’arbitre a dit halte, c’est terminé. On sait que c’est le dernier match, les dernières touches… », a ajouté la native des Abymes, des trémolos dans la voix. Toute l’émotion accumulée depuis quelques jours retombe d’un coup et la championne au visage de guerrière laisse place à une femme ultra sensible.

"De l'expérience à donner"

« La vie continue », poursuit-elle difficilement. « Ce n’est pas dur de quitter les Jeux comme ça », reprend-elle. « Parce que je suis honorée. C’est 25 ans de carrière, c’est pas un divorce. C’est juste l’arrêt. On pose les épées mais je reste toujours à côté de l’escrime. Et puis l’épée dame va repartir et j’ai mon expérience à donner ». Puis elle continue, en pleurs : « C’est une grosse passion, forcément il y a de la tristesse. Mais il y a du bonheur parce que j’aime cette discipline. Je sais par où je suis passée. Après Pékin, je suis repartie pour un tour. J’ai eu ma qualif’ à l’arrache. Mais je me suis battue ».
« Il y a toujours une dernière mais en tous cas je remercie tous les fans français pour les encouragements » (son nom a été scandé à plusieurs reprises durant ses deux matches).

« Et demain j’enfilerai mon manteau de capitaine d’équipe », a-t-elle souligné. « Ce soir je suis à la retraite. Je m’étais préparée, mais quand on fait un truc toute sa vie, c’est dur de savoir que c’est fini ». « Mais je peux partir la tête haute, je suis fière de ce que j’ai accompli. J’aurais aimé donner encore plus de bonheur mais ce n’est pas le cas. En tous cas je vous aime tous », a-t-elle lâché devant un aréopage de journalistes autant peinés qu’elle. « Ces 25 ans, c’est de la joie, des larmes. Ce sont des prises de tête, des victoires, du bronze, de l’or et de l’amitié, voilà ».

Lamour : "Ca vaut une médaille"

« C’était fort en émotions », a expliqué sa nièce, présente pour l’occasion (comme Marie-Eva, la maman de Laura). « Parce qu’on suivait chaque mouvement, chaque geste. Malheureusement, elle n’a pas réussi à aller jusqu’au bout. C’était un peu triste pour nous mais c’est une victoire pour elle », a encore dit la collégienne. « Elle a fait cinq Jeux Olympiques déjà ». « Elle n’a plus rien à prouver », a enchainé sa belle sœur Anne. On est fiers d’elle et ça reste la meilleure pour nous. Quand elle est revenue de 6-10 à 10-10, on y a cru. C’est vraiment elle. Elle est toujours une grande championne ».

Jean-François Lamour a également tenu à rendre hommage à la plus célèbre escrimeuse : « C’est beaucoup d’émotion », a dit l’ancien Ministre des Sports. « C’est une grande championne qui referme aujourd’hui tout un pan de sa vie. Elle savait que ce serait difficile mais elle le fait de très belle manière. Elle a eu la combativité et les mots qu’il fallait ensuite pour quitter la piste. Elle a beaucoup apporté à l’escrime. Et au-delà de ça, c’est une personne attachante qui a toujours été au combat, qui s’est toujours remis en question. Le plus douloureux, c’est maintenant : enlever sa veste définitivement et remettre son arme dans la house. C’est un vrai grand moment de douleur. C’est sûr que c’est mieux de partir sur une médaille, mais ce qu’elle vient de faire, la manière dont elle l’a fait, ça vaut une médaille ».

Le dernier tour de Laura Flessel...

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