Paris 2024 : après son titre olympique, comment l'équipe de France de volley est devenue l'une des nations phare du circuit mondial

L'équipe de France, tenante du titre, fait son entrée en lice dimanche à 17 heures face à la Serbie pour son premier match de poules.
Article rédigé par Apolline Merle
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 6 min
L'équipe de France célèbre sa victoire face au Brésil lors de la Ligue des nations, à Manille (Philippines), le 23 juin 2024. (JAM STA ROSA / AFP)

Il y a trois ans, l'équipe de France de volley créait la surprise. Mal embarquée dès les phases de poules avec trois défaites, elle a pourtant décroché l'or olympique à Tokyo, le 7 août 2021 face à la Russie. Un premier titre historique pour les Bleus. Fort de ce nouveau statut, les Tricolores ont depuis changé de dimension et n'ont fait qu'engranger de l'expérience pour confirmer leur niveau. Ils ont notamment gagné deux Ligues des nations sous l'égide de l'entraîneur italien Andrea Giani, arrivé au printemps 2022 : en 2022 et, plus récemment, le 30 juin dernier.  

Si l'équipe alignée à Paris est à 80% la même que celle titrée à Tokyo, elle n'en reste pas moins quelque peu différente. "Depuis 2021, ils ont mûri dans le haut niveau, observe l'ancien entraîneur des Bleus Laurent Tillie, champion olympique et consultant pour France Télévisions. Même si on avait de bons résultats avant [champions d'Europe en 2015, Ligue mondiale en 2015 et 2017], ils sont restés en haut depuis leur titre et continuent à viser les podiums à chaque compétition. C'est la marque de la haute performance."

Jean Patry en action lors du match de la Ligue des nations opposant la France et le Japon, le 22 juin 2024 à Manille (Philippines). (AARON FAVILA / AP)

Un point de vue partagé par le passeur et capitaine, Benjamin Toniutti. "Certains joueurs ont évolué individuellement dans leurs clubs comme Barthélémy Chinenyeze, qui est devenu l'un des meilleurs centraux du monde, ou encore Jean Patry, qui a réalisé une grosse saison." Ce que confirme le principal concerné. "Après les Jeux, j'ai fait le choix de partir en Pologne, pour son championnat relevé, dans une équipe qui avait de fortes attentes afin d'être prêt pour Paris", acquiesce Patry, pointu des Bleus, récent vice-champion d'Europe avec son club de Jastrzebski. 

Si les Jeux olympiques de Tokyo ont acté l'âge de la maturité, les Jeux de Paris doivent être ceux de la confirmation pour cette équipe de France. "La médaille d'or a été une surprise générale, reconnaît Laurent Tillie. Nous étions au bord du précipice et nous avons gagné l'or avec une équipe un peu miraculée. Aujourd'hui, on voit une équipe plus solide, plus experte, plus déterminante au bloc, plus agressive et plus mûre dans l'atteinte des objectifs qu'en 2021."

Un jeu atypique peaufiné

Et cette palette de jeu n'a fait que s'améliorer. A Tokyo, ils ont dévoilé au monde leur jeu atypique, basé sur l'instinct et le grain de folie. "Les autres équipes n'aiment pas nous affronter, car nous sommes durs à jouer, avec cette folie, cette énergie et cette imprévisibilité aussi, observe l'attaquant Kevin Tillie. Aujourd'hui, nous sommes dans la même lignée, avec un noyau dur qui a gagné en expérience et l'arrivée de nouveaux joueurs qui viennent améliorer le groupe. Cela nous permet de constituer un banc très fort." A tel point que le "jeu à la française", né avec cette équipe de France, s'est forgé une réputation à l'étranger.

"Les Français ont toujours été connus pour être techniques de manière générale, mais depuis une petite dizaine d'années, on a vraiment créé un style particulier, qui nous démarque."

Kévin Tillie, attaquant de l'équipe de France

à franceinfo: sport

"C'est un jeu que l'on a été obligés de développer, basé sur la technique, la patience et la motivation des joueurs, décortique Laurent Tillie. Car nous n'étions pas les plus forts, donc il a fallu être malins et très solidaires, en dehors et sur le terrain. C'est un fonds de jeu qui use les équipes adverses et qui donne de l'euphorie à l'équipe de France. Les joueurs ont accepté leur identité et sont fiers aujourd'hui de jouer comme cela." Depuis, l'équipe de France n'a pas changé sa recette, mais l'a travaillée sous la houlette d'Andrea Giani, pour élever encore son niveau.

L'entraîneur italien Andrea Giani, sélectionneur de l'équipe de France, lors du match pour la médaille de bronze au championnat d'Europe, à Rome, le 16 septembre 2023. (INSIDEFOTO / SHUTTERSTOCK / SIPA)

A son arrivée à la tête du staff, l'ancien central de la Nazionale, deux fois médaillé d'argent aux Jeux olympiques et triple champion du monde, a ainsi ajouté sa patte à ce French flair version volley. "La créativité est, certes, importante pour l'équipe, mais il est nécessaire de savoir la doser, tout en respectant un cadre", remarque l'entraîneur, fidèle aux méthodes utilisées en Italie.

"Il a apporté plus d'analyses, avec des plans de jeu, de manière à être un peu plus structuré, ainsi qu'une discipline et de la rigueur à suivre des consignes, confirme Jean Patry. Au début, ça a un peu coincé, mais on a réussi à conserver nos automatismes tout en appliquant une discipline sur le terrain. La victoire en Ligue des nations a consolidé ce travail".

Désillusions et manque de continuité

Mais les trois ans séparant Tokyo et Paris n'ont pas été un long fleuve tranquille. Si les Bleus ont remporté une Ligue des nations en 2022 et se sont installés dans le top 10 mondial, ils ont toutefois été éliminés en quart de finale du Mondial la même année et ont terminé au pied du podium à l'Euro l'année suivante. "A Tokyo, nous avions atteint un pic inédit. Mais ensuite, on a connu des désillusions, où on manquait de continuité dans les résultats", admet Jean Patry.

"On s'est un peu perdus. Peut-être qu'il s'agissait d'un contrecoup après les Jeux. Nous en avons tiré les leçons. La Ligue des nations nous a fait du bien et nous a repositionnés dans une lignée de victoire juste avant les Jeux."

Jean Patry, pointu de l'équipe de France

à franceinfo: sport

Après une année 2023 sans titre, Andrea Giani a pris acte de ce passage difficile et a mis en place tout un tas d'ajustements au sein de l'équipe. "Nous avons beaucoup travaillé l'attaque, le bloc et le service, où nous commettions trop d'erreurs, explique l'entraîneur italien. Nous avons aussi travaillé l'attitude au tie-break, car il est important de montrer aux équipes adverses notre force mentale." Le coach transalpin a incité les joueurs "à prendre des responsabilités individuelles à l'attaque et au retour". En parallèle, Andrea Giani a aussi entrepris cette saison des visites à ses joueurs dans leurs clubs respectifs pour mieux les suivre et planifier l'année 2024 selon leurs besoins. 

Malgré leur victoire il y a quelques semaines en Ligue des nations, les Bleus ne se voient pas comme favoris à leur succession à Paris, tant la densité est forte au sein des meilleures équipes mondiales. "Nous savons que nous sommes capables de gagner, mais nous avons peu de marge, admet Benjamin Toniutti. Sur les 12 équipes du tournoi olympique, 11 sont capables de faire une médaille."

Preuve en est : seuls l'URSS (1964 et 1968) et les Etats-Unis (1984 et 1988) ont réalisé le doublé olympique. "L'Italie, la Russie, le Brésil et les Etats-Unis trustent 70% des médailles [chez les hommes] et 60% des médailles d'or [10/15 aux JO]", approfondit encore Laurent Tillie. Qu'importent les statistiques, les Bleus comptent bien puiser dans le soutien de leur public pour se transcender et conserver leur titre. "Quand on joue en France, nous avons une énergie complémentaire qui se dégage, glisse Jean Patry. Nous allons transformer cette attente et cette pression des Jeux à la maison en réelle force." Pour continuer à écrire l'histoire.

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