Afrique du Sud : le 30 juin 1991, le régime raciste de l'apartheid était aboli
Un régime condamné par les Nations unies et qui se terminera par un compromis historique entre Nelson Mandela et Frederik de Klerk.
Apartheid. Un mot qui signifie "séparément" en afrikaans, la langue des colons d’origine hollandaise. En 1948, la Ligue des frères afrikaners arrivée au pouvoir en Afrique du Sud met en place les lois de l'apartheid. Le 30 juin 1991, le régime ségrégationniste sera aboli.
Des lois raciales
Dès mai 1948, le régime entreprend une politique de ségrégation. A commencer par la loi sur la classification (Population Registration Act), clef de voûte du système, qui définit trois groupes raciaux aux droits différents : Blancs, Noirs et métis.
La loi sur l'habitat séparé (Group Areas Act) attribue aux Sud-Africains un lieu de résidence en fonction de leur appartenance à un de ces groupes. Le pays a été subdivisé en dix bantoustans, avec l’obligation pour les Noirs de porter en permanence un laisser-passer (Pass Law) les assignant à une zone de vie et de travail.
Les lois sur la terre (Land Acts) avaient attribué aux Blancs dès 1913 et 1936 la propriété de 87% des terres. Les 13% restants destinés aux Noirs étaient divisés en bantoustans (rebaptisés Homelands en 1971).
En 1957, la loi sur l'immoralité interdit les relations sexuelles entre personnes de "races" différentes. Les mariages mixtes étaient interdits depuis 1949.
L’objectif de l’apartheid était d’institutionnaliser la suprématie blanche pour priver les Sud-Africains noirs (60% de la population en 1948, 83% en 2020) de leurs droits civiques. Mais ce pouvoir minoritaire devient de plus difficile à tenir.
La lutte clandestine
L’opposition à ce régime de discrimination s’est organisée autour du Congrès national africain (ANC) fondé en 1912, qui accueille en son sein des Noirs, des métis, mais aussi des démocrates blancs. L'ANC lance des campagnes de désobéissance civile, mais les moyens pacifiques prônés dans les années 1950 se révèlent sans effet face au puissant état policier sud-africain.
L’ANC et le Pan African Congress, créé par des dissidents de l'ANC dont un des slogans est alors "un colon, une balle", engagent ensemble la lutte armée clandestine. Mais l’arrestation et la condamnation à la prison à vie en 1964 d’une grande partie de la direction de l’ANC, dont Nelson Mandela, décapite la résistance anti-apartheid.
Pourtant les révoltes se multiplient dans le pays avec notamment les émeutes noires dans la cité dortoir de Sharpeville (1960), près de Johannesburg : la police tire sur la foule qui manifeste contre les "pass" (les laissez-passer) faisant 69 morts.
En juin 1976, les jeunes de Soweto, le township noir de Johannesburg, manifestent contre la décision de faire de l'afrikaans la langue d’enseignement. Ces émeutes lourdement réprimées marquent le début d’une résistance de masse.
Un régime condamné
Alors que la décolonisation avance à grands pas sur le continent avec l’accès à l’indépendance des dernières colonies portugaises l’Angola et le Mozambique (en 1975), le pouvoir sud-africain s’accroche à l’apartheid avec une minorité blanche de plus en plus minoritaire et divisée.
Les pays de la région, nouvellement indépendants, accueillent des milliers de jeunes exilés sud-africains dans des camps militaires d’entraînement. De retour dans leur pays, ils vont former "le fer de lance de la Nation", la branche militaire de l'ANC. La guerre larvée entre les deux camps aurait entraîné la mort de 14 000 personnes entre 1990 et 1994, selon les chiffres du Musée de l'apartheid.
Grâce à son épouse Winnie, active au sein de la résistance de Soweto, Nelson Mandela devient le symbole de la lutte anti-apartheid, et sa libération la condition pour la levée des sanctions économiques, scientifiques, culturelles et sportives, infligées par la communauté internationale.
Une Afrique du Sud nouvelle
Avec la fin du glacis soviétique, le régime sud-africain perd ses soutiens et sa fonction : un rempart contre le communisme en Afrique. De son coté, l'ANC perd le soutien soviétique.
Sans être défait militairement, le régime de la suprématie blanche est dans une impasse. Nelson Mandela engage des pourparlers secrets depuis sa prison avec le président Frederik de Klerk.
Contre les radicaux de chaque camp, les deux hommes négocient un compromis historique sans violence : le droit de vote pour la majorité noire en échange de l’impunité pour ce que l’ONU avait qualifié dès 1973 de crime contre l’humanité. Libéré en février 1990 après 27 ans de prison, Nelson Mandela deviendra en 1994, le premier président démocratiquement élu d’une nouvelle Afrique du Sud. Les lois qui régissaient l'apartheid sont abolies par le parlement sud-africain le 30 juin 1991.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.