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L'Afrique du Sud agacée par un tweet de Donald Trump sur sa réforme agraire

L'Afrique du Sud est offusquée par un tweet de Donald Trump exprimant son inquiétude à propos des «confiscations de terres en Afrique du Sud» et des «meurtres de grande ampleur de fermiers blancs». Pretoria demande des explications, arguant qu'il joue le jeu de l'extrême-droite.
Article rédigé par Julie Bourdin
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Un panneau "propriété privée" à l'entrée d'une ferme à Witbank, dans la province du Mpumalanga, le 13 juillet 2018. (REUTERS/Siphiwe Sibeko/File Photo)

Le gouvernement sud-africain a reproché à Donald Trump d’alimenter les tensions raciales sur son sol suite à un tweet où il s’inquiète des «confiscations de terres» et des «tueries à grande échelle de fermiers blancs» en Afrique du Sud.

Ce commentaire arrive dans un contexte de tensions à propos du projet de réforme agraire promis par le président sud-africain Cyril Ramaphosa, qui vise à redistribuer une partie des terres agricoles appartenant à la minorité blanche au profit de la population noire défavorisée. Dans un pays encore profondément divisé un quart de siècle après la chute du régime raciste de l’apartheid, 72% des terres agricoles privées sont possédées par des Blancs, qui ne représentent que 8% de la population.

Sans surprise, les autorités de Pretoria ont promptement réagi au tweet présidentiel. «L'Afrique du Sud rejette totalement cette vision étroite qui ne vise qu'à diviser la nation et à nous rappeler notre passé colonial», a écrit le gouvernement sur Twitter, avant de promettre que sa réforme agraire serait «prudente et inclusive».

Un discours qui reprend des arguments de l’extrême droite
Le tweet de Donald Trump fait référence à une émission de la chaîne de télévision conservatrice Fox News, où le journaliste Tucker Carlson accusait Cyril Ramaphosa de chercher à «voler les terres des citoyens blancs parce qu’ils ont la mauvaise couleur de peau».

L'argument présentant les Sud-Africains blancs comme persécutés émane de groupes d’extrême-droite très controversés en Afrique du Sud. Afriforum, une association de défense de la minorité Afrikaner, s’est notamment réjoui du tweet de Donald Trump, revendiquant une responsabilité dans la propagation de cette information.

«Je crois que notre lobbying a certainement eu un impact, car nous avons parlé avec beaucoup de gens qui sont en contact avec le président Trump et nous avons parlé avec plusieurs think tanks, dont l’Institut Cato, qui a pris une position très ferme juste avant cette déclaration du président Trump », a déclaré son président Ernst Roets au journal News24. 

Le groupe mène en effet depuis plusieurs années des campagnes de lobbying en Afrique du Sud et à l’étranger, partageant des informations reprises notamment par des sites tels que Français de Souche.

Des réactions offusquées en Afrique du Sud
Les réseaux sociaux se sont enflammés à la suite du tweet de Donald Trump, de nombreux Sud-Africains exprimant leur rejet de cette perception «dangereuse» et «étroite» de leur pays.

La ministre des Affaires étrangères Lindiwe Sisulu a déploré les propos «malheureux» de Donald Trump, fondés «sur de fausses informations» et demandé des «clarifications» à Washington.

Le dirigeant du parti de gauche radicale des Combattants de la Liberté Économique (EFF) s’est exprimé avec vigueur : «Nous n’avons pas peur de vous», a-t-il lancé, qualifiant Donald Trump de «menteur pathologique».

La controverse a affecté le 23 août 2018 le cours du rand sud-africain, qui a perdu jusqu'à près de 2% dans la matinée par rapport au dollar américain, avant de se reprendre.

La question de la distribution des terres, très sensible, avait déjà suscité en mars une polémique entre l’Afrique du Sud et l’Australie. Un ministre du gouvernement de Canberra s'était attiré les foudres de Pretoria en offrant d'accueillir les agriculteurs sud-africains blancs, à ses yeux, «persécutés» dans leur pays.
 

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