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Algérie: «Contre-pouvoirs », un journalisme de résistance signé Malek Bensmail

Le documentariste Malek Bensmail ne cesse pas de questionner la société algérienne. Son dernier film «Contre-pouvoirs», une plongée dans les coulisses du quotidien francophone «El Watan», autopsie les relations entre la presse et le pouvoir politique pendant la présidentielle. Le cinéaste a réussi à donner à la parole une mémoire. Sortie française 27 janvier 2016.
Article rédigé par Mohamed Berkani
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3min
«Contre-pouvoirs», le film de Malek Bensmail. (DR/Capture d'écran de la bande annonce)

Bouteflika élu dans un fauteuil, titre El Watan au lendemain de l’élection d’Abdelaziz Bouteflika pour un 4e mandat avec 81,5% des voix en 2014. Pour accompagner ce titre, la photo du président algérien dans un fauteuil roulant. A l’annonce du résultat, un journaliste s’indigne : «Ce n’est pas un score à la soviétique mais bien à l’algérienne, on peut donner des leçons aux Soviétiques.» 
 
Dedans-dehors, dedans-dedans, la caméra de Malek Bensmail filme le quotidien des journalistes d’El Watan pendant la dernière campagne électorale. Jamais intruse, elle cherche à montrer et non à démontrer, le système politique algérien et le contre-pouvoir que représente la presse. La majeure partie du documentaire se passe dans le siège du journal, avec de rares images extérieures… prises sur le lieu du nouveau siège, en construction. Le huis-clos n’est pas étouffant, l’extérieur arrive par l’actualité qui envahit la rédaction.


Le film s’ouvre par un travelling sur la baie d’Alger avec cette phrase du président Bouteflika : «Je suis l’Algérie.» La rédaction d’El Watan, réunie autour du directeur Omar Belhouchet, est en effervescence. On comprend très vite qu’il y a plusieurs Algérie(s). «L’Algérie possède un système politique verrouillé et autoritaire. Paradoxalement, ce même "système" a permis, il y a vingt-cinq ans, l’unique liberté possible, celle de l’expression dans la presse écrite. Au cours d’une guerre civile qui a duré plus de deux décennies, les journalistes et intellectuels étaient considérés comme les ennemis à abattre. Durant cette guerre prolongée, plus d’une centaine de journalistes et intellectuels ont été tués», explique le réalisateur.

Nouveau siège d'«El Watan» à Alger. (DR )

Cette plongée en apnée a le mérite de mettre en lumière l’exercice souvent difficile, quelquefois périlleux, du métier de journaliste. Et de relever les rouages bien huilés du pouvoir politique. «Aujourd’hui, la violence contre les médias s’est quelque peu atténuée, mais les journalistes restent tout de même les adversaires ou les prisonniers des dirigeants politiques, des militaires et des personnalités influentes du pouvoir», observe Malek Bensmail.

A l'imprimerie d'«El Watan». (DR)

Une fois la caméra éteinte, le président réélu, le quotidien El Watan reçoit un terrible retour de manivelle. «On a perdu du jour au lendemain 60% de notre manne publicitaire. Les annonceurs ont subi de fortes pressions et des menaces. Au lieu de placer leur publicité sur notre journal, l’un des plus gros tirages d’Algérie (140.000 exemplaires par jour), ils la bradent dans des médias sans lecteurs, c’est irrationnel», s’indigne Omar Belhouchet.

Le directeur d'«El Watan», Omar Belhouchet, entouré de journalistes. (DR)

Les élections sont-elles jouées d’avance ? Les journalistes sont des optimistes multirécidivistes. Malek Bensmail, avec Contre-pouvoirs, s’est plus attaché à l’humain qu’à l’actualité. La parole fait œuvre de mémoire, comprendre c’est écouter. Le message du cinéaste est entendu. 

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