Le Burundi retient son souffle à l’approche d’une présidentielle à haut risque
Le Haut Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, Zeid Ra’ad Al Hussein, vient de séjourner à Bujumbura. Il tire la sonnette d’alarme. Pour lui, tous les ingrédients sont réunis pour une nouvelle explosion dans ce petit pays de l’Afrique des grands lacs. Des intimidations, des actes de violences et une hausse des discours haineux qui ont fini par alimenter « un climat de peur ». Il appelle à une intervention urgente du pouvoir.
Des milices bénéficiant d’un soutien inconditionnel du gouvernement ne cachent pas leur intention de recourir à la violence en cas d’obstacles à la candidature du président sortant. «Il faut une implication régionale parce qu’il y a risque de contagion », estime Alexis Sinduhije, un opposant burundais interrogé par Géopolis. Il est urgent, dit-il, de mettre en place «une force qui empêcherait la milice du président Nkurunziza de passer à l’acte ».
Alexis Sinduhije est un ancien journaliste et un farouche opposant au président Pierre Nkurunziza. Il a dû fuir son pays en mai 2014 alors que le pouvoir l’accusait d’insurrection armée. De violents affrontements avaient opposé dans la capitale les militants de son parti, le MSD, à la police. Depuis son lieu d’exil, il observe avec inquiétude la descente aux enfers de son pays : «Le drame du Burundi, c’est que le pays n’a connu que des pouvoirs répressifs depuis son indépendance en 1962. Toutes ethnies confondues(.....)Le président Nkurunziza n’a pas échappé à la règle. Le peuple est donc exaspéré et veut son départ. S’il se maintient par la force, il y aura une explosion. C’est certain».
L’histoire politique du Burundi a été jalonnée de massacres entre la majorité Hutu et la minorité Tutsi. Le pays peine encore à panser les plaies d’une longue et sanglante guerre civile qui a été déclenchée en 1993 après l’assassinat de Melchior Ndadaye, le premier président élu démocratiquement. La guerre ne prendra définitivement fin qu’en 2006 après la conclusion d’un accord sur le partage du pouvoir entre les deux principales ethnies du pays. Accord historique signé à Arusha (Tanzanie) par tous les protagonistes burundais.
Depuis, de nouvelles institutions acceptées par tous ont été mises en place pour gérer le pays. «L’accord d’Arusha est complet. Cet accord est encore une référence, mais il faut des gens honnêtes pour l’appliquer», fait remarquer Alexis Sinduhije.
C’est l’interprétation de cet accord qui est à l’origine de la crise. Pour l’opposition et la société civile, le président Pierre Nkurunziza a fait son temps et doit se retirer après deux mandats constitutionnels. Les partisans du chef de l’Etat affirment qu'il a parfaitement le droit de briguer un nouveau mandat.
Chacun campe sur ses positions à deux mois du scrutin.
Lancez la conversation
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour commenter.