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Côte d’Ivoire : le «gang des microbes» suscite colère et hantise à Abidjan

Leur âge varie entre 12 et 18 ans. Ils se déplacent par petits groupes, armés de couteaux, de machettes, de haches et de gourdins. Surnommés «les microbes», ces jeunes délinquants ont créé la psychose à Abidjan. Leurs agressions se sont multipliées à la veille de la présidentielle d’octobre 2015.
Article rédigé par Martin Mateso
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Certains mineurs qui sévissent à Abidjan sont d'anciens enfants soldats démobilisés après la crise post-électorale. (Photo AFP/Sia Kambou)

Claude Larissa Abogny n’avait que 23 ans. La jeune étudiante ivoirienne a été dépouillée puis tuée à coups de machette par le gang «des microbes» alors qu’elle rentrait chez elle à Yopougon, dans la nuit du 11 au 12 août 2015. Dans la foulée, trois présumés membres d’un de ces gangs ont été tabassés et tués par la population en guise de représailles.
 
«Entraînés à la culture de la violence, ils n’ont peur de rien», écrit le journal Notre voie qui accuse le pouvoir de passivité à l’égard de «ces enfants soldats qui sèment la terreur en toute impunité». Pour le journal en ligne LG Infos, ces jeunes délinquants «ont été abandonnés à leur triste sort et sans suivi psychologique et social après la crise post-électorale de 2010 par ceux-là même qui les avaient recrutés».

Le journal Le Sursaut décrit «les microbes» comme une plaie sociale et un fléau urbain : «La brutalité avec laquelle ils opèrent effraye tous ceux qui ont eu le malheur de les croiser. Ils sont présents partout, prêts à fondre sur leurs proies comme un essaim d’abeilles. Ils dépouillent les populations qu’ils croisent de tous leurs biens. Argent, téléphones portables…», écrit le journal.
 
C'est dans cette commune d'Abobo qu'ont commencé à sévir «les microbes» durant la crise post-électrale, avant d'essaimer dans les autres quartiers d'Abidjan. (Photo AFP/Sia Kambou)

La colère gronde à Abidjan
Dans les rues d’Abidjan, la colère gronde comme en témoignent ces réactions recueillies par Ivoir.tv.net : «On a peur. On ne peut pas sortir. Les gars t’agressent. C’est dangereux», s’inquiète Odipko, étudiant. Une inquiétude partagée par Natacha, assistante de direction dans la capitale économique ivoirienne : «On nous avait dit que "les microbes" n’existaient plus. Qu’ils avaient été neutralisés. Mais nous avons été surpris fin juillet d’entendre des bruits de machettes, de couteaux. Des gens sont agressés dans la rue.»
 
La peur a poussé la population à s’organiser en comités d’auto-défense. «Il faudrait que la population se lève elle-même pour chasser "les microbes"», suggère Dike Dauala, commerçant.  Sa collègue Brou Léa acquiesce de la tête : «Franchement, la population est fatiguée. Les gens ont décidé de se lever pour réagir. C'est-à-dire attaquer "les microbes" avec les mêmes armes.» 
 
Le président ivoirien Alassane Ouattara en visite dans la ville de Dabou, le 3 août 2015.  (Photo AFP/Issouf Sanogo)

Menace sur la présidentielle d’octobre 2015
A peine sortis d’une décennie de crise, les Ivoiriens redoutent le pire. D’autant que l’opposition menace désormais de faire obstacle à la tenue de l’élection présidentielle si le gouvernement n’engage pas des discussions sur l’insécurité dans le pays qui pourrait perturber le bon déroulement du vote. Le Front populaire ivoirien note que le phénomène «des microbes» est venu alourdir un climat d’insécurité qui règne dans certaines régions où des bandits armés de Kalachnikovs et des coupeurs de route feraient la loi.
 
Opération de «désinfection» à Abidjan
La police ivoirienne a mis en garde «les colporteurs de fausses rumeurs de nature à semer la psychose dans l’esprit des populations». Le directeur général de la police annoncé que de nombreux agents allaient être déployés en tenue comme en civil dans tous les quartiers d’Abidjan pour combattre l’insécurité.
 
Une vaste opération dénommée «désinfection» a été lancée le 13 août pour démanteler le «gang des microbes» qui terrorise la capitale économique ivoirienne.

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