Egypte : plus de 80 morts dans le "vendredi de colère"
Les islamistes ont appelé à mettre fin aux manifestations vendredi après des heurts meurtriers. Mais ils ont demandé à leurs partisans de défiler quotidiennement dès samedi.
L'Egypte a vécu une nouvelle journée de violence, vendredi 16 août. Deux jours après la dispersion sanglante de leurs campements au Caire, les Frères musulmans ont appelé à des manifestations dans le cadre d'un "vendredi de la colère". Ces rassemblements ont de nouveau été dispersés par la force par l'armée et la police. Au moins 83 personnes ont été tuées dans tout le pays, pour l'essentiel des partisans du président islamiste déchu Mohamed Morsi. Voici le récit de cette journée meurtrière.
Les manifestations débutent après la grande prière
Les Frères musulmans appellent à des rassemblements, au Caire, après la grande prière du vendredi. "Les défilés contre le coup d'Etat partiront de toutes les mosquées du Caire et se dirigeront vers la place Ramsès après la prière pour un 'vendredi de la colère'", précise le porte-parole de la confrérie islamiste.
Le pouvoir dénonce un "complot terroriste"
Loin de chercher l'apaisement, le pouvoir égyptien, mis en place par l'armée, déclare se battre contre un "complot terroriste malveillant" des Frères musulmans pour justifier la répression. Il annonce avoir autorisé la police à tirer à balles réelles sur quiconque s'en prendrait à des bâtiments officiels ou aux forces de l'ordre. En fin de matinée, l'armée se déploie aux abords des "installations vitales", selon la télévision d'Etat.
Tamarrod, le principal mouvement à l'origine des manifestations qui ont conduit à la destitution de Mohamed Morsi, appelle pour sa part les Egyptiens à former des "comités populaires". Leur objectif : défendre le pays contre ce qu'il appelle le "terrorisme" des Frères musulmans.
La police et l'armée tirent sur les manifestants au Caire
Des milliers de manifestants répondent à l'appel des islamistes et descendent dans les rues. Rapidement, les chars se dirigent vers les manifestants. Les forces de l'ordre tirent sur les manifestants dans la capitale. Des hommes tirent au fusil d'assaut depuis un toit. D'autres sautent d'un pont pour éviter les balles. Dans deux morgues improvisées dans des mosquées du centre de la capitale, un correspondant de l'AFP et des témoins comptent au moins 39 corps. Le parti de la Liberté et de la Justice, le bras politique des Frères musulmans, fait état de 130 morts dans la capitale seule.
D'autres grandes villes du pays s'embrasent
Comme mercredi, les violences s'étendent à plusieurs grandes villes du pays. Des tirs sont entendus à Alexandrie (dans le nord de l'Egypte), Beni Soueif et Fayoum au sud du Caire, et dans la ville touristique de Hurghada sur la mer Rouge. Le ministère de l'Intérieur fait état de plusieurs attaques des pro-Morsi contre des postes de police. Des sources médicales et de sécurité annoncent 44 morts dans différentes autres provinces.
Le retour au calme avec le couvre-feu ?
A 19 heures, le couvre-feu, instauré mercredi, entre en vigueur dans 14 des 27 provinces du pays, dont celles des deux plus grandes villes, Le Caire et Alexandrie. Les autorités multiplient les appels à la population, notamment via la télévision d'Etat, à respecter cette mesure, pour laquelle tout contrevenant risque la prison.
Les images retransmises en direct par des chaînes locales montrent tout autre chose. Dans la soirée, des heurts et des incendies éclatent en plusieurs endroits du Caire. A Suez, dix personnes sont tuées par les forces de l'ordre, lors d'une manifestation bravant le couvre-feu, selon des sources de sécurité.
En fin de soirée, au Caire, la police assiège une mosquée où sont retranchés des islamistes. Des coups de feu retentissent, selon des responsables de la sécurité.
Les islamistes appellent à défiler tous les jours
Une heure après l'entrée en vigueur du couvre-feu, l'Alliance contre le coup d'Etat, la coalition islamiste égyptienne, appelle à mettre fin aux manifestations, avec la dernière prière de la soirée. Mais les islamistes demandent aux partisans du président déchu de manifester quotidiennement et "pacifiquement", à partir de samedi, pour dénoncer le "massacre" de mercredi.
L'Europe se concerte pour parler d'une seule voix
Les dirigeants des principaux pays européens ont entamé des consultations afin de tenter de définir une position commune. François Hollande s'est entretenu successivement par téléphone avec la chancelière allemande Angela Merkel, avec le président du Conseil italien Enrico Letta et avec le Premier ministre britannique David Cameron.
Paris, Londres, Berlin et Rome ont appelé à une réunion d'urgence des ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne et ont évoqué une possible révision des relations diplomatiques avec l'Egypte.
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