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Accord de Paris: la COP24 approche et l'équation du financement reste insoluble
La COP24, qui se tiendra en Pologne en décembre 2018, sera décisive pour l'avenir de la planète. C'est là que doivent être formalisées les règles d'application de l'Accord de Paris signé en 2015. Mais à quelques semaines du sommet, la question cruciale du financement promis par les pays riches aux moins nantis pour faire face au réchauffement climatique est loin de faire consensus.
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La COP 24, la 24e conférence des parties signataires de la Convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique (CCNUCC), qui se tiendra à Katowice, en Pologne, prend des allures de sommet de la dernière chance pour concrétiser l'Accord de Paris sur la lutte contre le réchauffement climatique. Il a été ratifié par quelque 180 pays, dont les Etats-Unis qui ont annoncé en juin 2017 leur retrait, et doit entrer en vigueur en 2020. Négocié en 2015 dans le cadre de la COP21, ce texte prévoit de contenir d'ici à 2100 le réchauffement climatique «bien en dessous de 2°C par rapport aux niveaux préindustriels» et de viser à «poursuivre les efforts pour limiter la hausse des températures à 1,5°C».
Lors du sommet de Katowice, l'objectif sera de mettre la dernière main au mode d'emploi de l'Accord de Paris, à savoir les règles et procédures pour mesurer et évaluer les engagements des Etats à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Que comptabiliser dans les actions climat? Comment en rendre compte? Quelle flexibilité accorder aux pays en développement pour appliquer ces règles? Les pays du Nord doivent-ils offrir plus de «prévisibilité» à ceux du Sud qui ont besoin des milliards promis pour mettre en place leurs politiques climat?
Les négociations continuent d'achopper sur cette question délicate de l'aide à verser aux pays émergents, ce qui risque de freiner les avancées à la COP24. Les organisateurs ont déjà pris les devants en avançant le sommet d'une journée afin de permettre aux participants de travailler davantage. La conférence de Katowice s'ouvrira le 2 décembre au lieu du 3, et s'achèvera le 14 décembre 2018 comme initialement prévu.
Les réunions préparatoires de Bonn (avril - mai 2018) et de Bangkok (septembre 2018) n'ont pas été des plus fructueuses. Les discussions qu'ont eues les experts en Thaïlande se sont soldées par des «résultats inégaux» sur l'élaboration de règles censées encadrer la mise en œuvre de l'Accord de Paris, a estimé Patricia Espinosa, la secrétaire exécutive de la CCNUCC.
«Les pays développés refusent d'adopter des règles claires sur le financement de la lutte contre le réchauffement»
La société civile, elle, n'a pas mâché ses mots à propos de ces travaux intermédiaires de Bangkok. L’accord climat de Paris «est au bord (du gouffre) parce que les pays développés refusent d'adopter des règles claires sur le financement de la lutte contre le réchauffement», déclarait Harjeet Singh, à la tête de l'ONG internationale ActionAid en septembre 2018, concernant les pourparlers thaïlandais. «S'ils restent crispés sur leurs positions et ne mettent pas la main au porte-monnaie, cela pourrait bien être la fin du traité (...), a-t-il expliqué.
A Bangkok, les pays en développement se sont ainsi insurgés contre les Etats-Unis et leurs alliés, accusés de saper les négociations visant à prévenir le réchauffement climatique. En 2009, les gouvernements des pays riches avaient accepté de recueillir 100 milliards de dollars (86 milliards d'euros) par an à l'horizon 2020 pour aider les pays vulnérables à se développer sans accroc tout en faisant face aux conséquences des changements climatiques. Alors que la COP24 approche, les désaccords demeurent sur les contributeurs à cet objectif annuel de financement. Les discussions sur ce sujet sont restées dans l'impasse à Bangkok, où les Etats-Unis, le Japon et l'Australie ont plaidé pour une certaine souplesse permettant d'inclure dans cette somme des prêts commerciaux ainsi que des garanties d'assurance et d'exportation.
«Le monde a changé depuis 2015. Nous n’avons plus les mêmes conditions internationales, les pays en développement posent la question du financement de leurs actions, parce qu’ils sont légitimes à le faire, mais aussi parce qu’un engagement a été pris, les fameux 100 milliards de dollars de Copenhague», a confié au Monde le secrétaire d’Etat polonais à l’environnement, Michal Kurtyka dans un entretien publié le 22 octobre 2018. «Ces 100 milliards de dollars sont-ils atteints, et sont-ils accessibles aux pays qui en ont besoin, d’autant qu’on parle aujourd’hui non plus de milliards, mais de milliers de milliards, nécessaires à la lutte contre le réchauffement climatique? Ce débat nous accompagnera à Katowice.»
Préserver le fonds vert de toute instrumentalisation politique
Le Fonds vert pour le climat de l'ONU (Green Climate Fund, GCF), mécanisme rattaché à la CCNUCC destiné à canaliser une bonne partie des fonds promis par les pays riches, traverse aussi des difficultés. Il peine à remplir ses coffres depuis que l'administration américaine a laissé entendre qu'elle ne verserait pas deux des trois milliards de dollars initialement promis par les Etats-Unis.
Ce fonds, géré de manière inédite à la fois par les donateurs et les bénéficiaires, avait été promis par les pays riches à la conférence de Copenhague (2009). Incarnant la confiance entre le Sud et le Nord, responsable historique du réchauffement, sa création a été essentielle au processus des négociations climat.
Le Fonds vert, «c'est l'épicentre de la mise en œuvre de l'accord de Paris», a indiqué Javier Manzanares, son directeur par intérim. Il renferme une toute petite portion des 100 milliards annuels de financements globaux promis par les pays du Nord pour que le Sud s'adapte au réchauffement et se développe sur des énergies propres. Mais il constitue un soutien majeur pour des projets peu rentables ou incertains. Le principal fonds climat au monde, à destination des pays en développement, a depuis sa mise en route en 2015 engagé 3,5 milliards de dollars dans 74 projets.
Miné également par les tensions politiques, le conseil d'administration de l'organisation avait été incapable en juillet 2018 de s'accorder sur les décisions à prendre ou les projets présentés. La tension est quelque peu retombée lors de la dernière réunion qui s'est achevée le 20 octobre 2018. Ce qui suscite un regain d'optimisme, quelques semaines avant la tenue de la COP24.
«Nous venons de terminer avec succès une réunion au cours de laquelle le Conseil d'administration a lancé le premier processus officiel de reconstitution des ressources du GCF», s'est réjoui Tosi Mpanu Mpanu, membre du conseil d'administration de l'organisation représentant la République Démocratique du Congo. «Les pays développés doivent maintenant faire preuve de leadership et fournir d'importantes ressources au Fonds pour respecter leurs engagements internationaux et répondre aux besoins croissants des pays en développement pour mettre en œuvre leurs mesures d'adaptation et d'atténuation (...) Le conseil d'administration doit travailler de concert pour que le GCF ne soit pas utilisé pour résoudre des questions politiques.»
Dans un rapport publié mi-octobre, les experts du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec) ont appelé à des transformations «rapides» et «sans précédent» si l'on veut limiter le réchauffement de la planète à 1,5°C. Le changement climatique a déjà multiplié par quatre le nombre des catastrophes liées au climat depuis les années 70. Face à l'urgence, la société civile, elle, se mobilise partout dans le monde.
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