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Pour sauver les singes, les primatologues africains unissent leurs forces
Abidjan, la capitale ivoirienne, accueille 150 primatologues venus de toute l’Afrique jusqu'au 27 juillet. Cet événement marquera la création de la Société africaine de primatologie (SAP), «organisation africaine gérée par des Africains». Laquelle va tenter de freiner la menace d’extinction des singes et lémuriens du continent et de former des jeunes à la primatologie.
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«Les primates représentent une valeur écologique, économique, culturelle, scientifique et de conservation, mais leur situation est peu reluisante, 60% des espèces étant menacées, 75% en déclinaison, 55% menacées d’extinction tout comme 87% des espèces uniques de Madagascar, tandis que l’homme restera le seul primate sur terre, dans 50 ans, du fait de ses activités néfastes sur la nature», annonçait en janvier 2017 le professeur Inza Koné, directeur de la recherche et du développement du Centre suisse de recherches scientifiques en Côte d'Ivoire, co-organisateur de ce congrès à l’université Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan.
@AO_ASPIRE supports the African Primatological Society @AfricanPs to shift the center of #primatologist in #Africa pic.twitter.com/teyGhPYPhm
— AfriqueOne_ASPIRE (@AO_ASPIRE) July 24, 2017
Dans une interview à RFI, cet expert, à l’origine avec d'autres scientifiques d’une étude publiée en début d’année dans la revue américaine Science Advances, tirait la sonnette d’alarme: «Les primates jouent un rôle extrêmement important dans et pour les écosystèmes. D’abord en tant que pollinisateurs et en tant qu’agents disperseurs de graines. Les primates participent beaucoup à la régénération des forêts. Aussi, sans primates, beaucoup d’espèces végétales ne pourraient pas se reproduire, et beaucoup de forêts seraient vouées simplement à une mort certaine.»
Rien ne vaut «un discours qui vient d'un scientifique africain»
Si les causes de la disparition des primates sont connues – chasse, braconnage, disparition des forêts pour l’agriculture, surexploitation du bois et urbanisation à outrance…–, elles sont difficiles à endiguer, car les communautés ne sont pas toujours convaincues de l'intérêt de défendre les primates et leur environnement.
Pour ce faire, rien ne vaut «un discours qui vient d'un scientifique africain», lance le professeur Koné. A l’AFP, ce dernier évoque la domination des primatologues nord-américains ou européens dans ce milieu. Et fait le constat que leurs homologues africains sont peu connus à l'échelle internationale et n'ont pas accès aux mêmes financements. Il précise même que ces derniers dirigent rarement des projets de recherche ou de conservation, même sur leur propre continent.
Pour le scientifique américain Russell Mittermeier, spécialiste des lémuriens de Madagascar, «c'est le moment» de créer, à côté de la Société internationale de primatologie, la même organisation mais africaine (SAP), dont il sera le parrain.
Eveiller les consciences à l’environnement
La SAP a pour but avoué de permettre aux scientifiques africains «d'échanger leurs connaissances, leurs expériences, de constituer des réseaux», mais aussi de «former les jeunes primatologues», explique Rachel Ikemeh, l'une des initiatrices du projet avec le Pr Koné.
Pour Rose-Marie Randrianarison, primatologue à l'université d'Ankatso à Tananarive, une des solutions passe aussi par le fait de «sensibiliser les autorités traditionnelles, qui sont écoutées par la population» et d’«informer et impliquer les décideurs politiques».
Avec la création de la SAP, Russell Mittermeier a espoir que ce qui s’est passé au Brésil (où cohabitent 150 espèces de primates) se reproduise sur le continent africain. «En 1971, il n'y avait qu'un seul primatologue brésilien». Grâce à la création de la société nationale de primatologie brésilienne, qui a formé des jeunes, le pays comptait «plusieurs centaines de primatologues à la fin des années 1980». Un espoir de sauvegarder les primates d'Afrique grâce aux jeunes générations.
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