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Rivoherizo Andriakoto, lauréat 2000, tué lors d'une rixe

Rivoherizo Andriakoto, récompensé par le prix audiovisuel 2000, pour un sujet sur le dernier bagne de Madagascar, est le seul parmi les récipiendaires à avoir été tué. Eclaircissement.
Article rédigé par Jean-Claude Rongeras
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4min
Bagnards de Nosy-Lava. Image extraite du documentaire les «Damnés de la Terre».  (DR)

Ce reporter-photographe malgache découvre en 1997 au gré de ses voyages dans son pays le bagne de Nosy-Lava, une survivance du régime colonial français. L'établissement, qui a ouvert en 1911, est géré depuis 1960 ─ date de l'indépendance ─ par les autorités malgaches.

Lorsque le producteur Djamel Sellani, alerté par les photos parues dans un journal, rencontre Rivoherizo Andriakoto, les deux hommes commencent alors à tourner ce qui aboutira au documentaire Les damnés de la terre. La mise en lumière d'un système carcéral archaïque et inhumain. Des centaines de détenus, droits communs et détenus politiques mélangés, purgent des «peines à perpète» ou «aux  travaux forcés». Exemple d'aberration: un homme condamné à cinq années en 1959 était toujours prisonnier 40 ans plus tard.
 
Des détenus grâciés après le documentaire
Face à la dénonciation de la réalité carcérale, aux portraits de gardiens ou de bagnards, le président de la République malgache de l'époque, Marc Ravalomanana, gracie en 2000 les détenus de ce bagne.  
 
L'attribution du prix Albert Londres au reporter-photographe en 2000 change son statut. Il devient rédacteur en chef d’un magazine économique d’une chaîne de télévision appartenant au président.

Devenus amis, Rivoherizo Andriakoto et Djamel Sellani sont désomais en contact régulier. Pourtant, début 2005, Sellani n’arrive plus à joindre Rivoherizo Andriakoto. En avril, après deux mois de silence, le Français finit par retrouver le numéro de téléphone de la femme d’Andriakoto. Celle-ci lui annonce la terrible nouvelle. Son mari a trouvé la mort consécutivement à un traumatisme crânien, lors d’une rixe, le 4 février 2005.

Le bagne de Nosy-Loa, extrait du documentaire "Damnés de la Terre"   (DR)
 
Le journaliste a-t-il été victime d’une simple altercation, d’une attaque, voire d'un obscur complot? Il s'avère que les personnes avec qui il se trouvait au moment des faits dans un bar sont quatre collègues ─ trois hommes et une femme ─ travaillant eux aussi à la télévision. 
 
Selon Sellani, le rapport du médecin de l'hôpital Ravoa-Hangy révèle qu'il y a eu «une grande violence». Des coups à la tête ont été «portés par une pierre». Ses collègues, qui avaient pas mal bu – mais c’est souvent le cas à Madagascar lors des soirées, précise le producteur ─ ont reconnu les faits et affirmé que tout était parti d’une querelle concernant la ligne éditoriale. Mais ils disent n'avoir pas eu l’intention de commettre un homicide. Pour Djamel Sellani, qui a travaillé à plusieurs reprises dans la Grande Ile, la violence n'est pas absente des us et coutumes locaux. 

La notoriété soudaine d’Andriakoto pouvait également avoir faire naître des jalousies. «Du jour au lendemain, un des ses meilleurs amis, photographe, ne lui a plus parlé.» De là à comprendre que des problèmes de rivalité aient pu advenir dans l’entourage de Rivoherizo, «un homme doux, plutôt timide»...!
 
A l’époque, la diffusion à Madagascar du reportage avait fait beaucoup de bruit. Le président Marc Ravalomanana avait fait dû agir dans l’urgence. La fermeture du bagne, lieu pratique par exemple pour placer des opposants à l'abri des regards, a pu déranger certaines habitudes. Comment démêler le vrai du faux ? En tous cas, en première instance, les accusés ─ lienciés de la télévision et mis à l'amende ─ n’ont écopé que de peines allant d’un à deux ans de prison, ou de relaxe. La femme du journaliste tué a, elle, fait appel...

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