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Journaliste enlevé au Mali : la vidéo d'Olivier Dubois "prouve que les jihadistes ont envie de négocier", selon le journaliste Anthony Fouchard

"C'est un très bon signal, assure le journaliste. Publier cette vidéo prouve qu'ils ont a priori changé d'avis, qu'ils veulent rendre ça officiel et entrer en négociations."

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Vidéo du journaliste Olivier Dubois annonçant son enlèvement au Mali, diffusée sur Twitter, le 5 mai 2021. (CAPTURE D'ECRAN)

"Cette vidéo, c'est un très bon signal, parce que cela prouve que les jihadistes ont envie de négocier", a réagi mercredi 5 mai sur franceinfo Anthony Fouchard, journaliste indépendant, membre du collectif Youpress, correspondant de RFI et France 24 au Mali de 2016 à 2018, alors qu'un journaliste français, Olivier Dubois, collaborateur de divers médias, affirme dans une vidéo circulant mercredi sur les réseaux sociaux avoir été enlevé début avril au Mali par des jihadistes affiliés à Al-Qaïda. Anthony Fouchard tient à souligner que le reportage d'Olivier Dubois "était préparé, même s'il était effectivement dangereux."

franceinfo : Quel est votre sentiment après la diffusion de cette vidéo ?

Anthony Fouchard : C'est un soulagement cette vidéo. Cela fait plus d'un mois qu'Olivier Dubois est porté disparu. Plus d'un mois que ses proches et que ses collègues sont au courant de cet enlèvement. Et cela fait plus d'un mois que les autorités françaises et les proches d'Olivier ont choisi de ne pas ébruiter cette nouvelle pour essayer de donner une chance à ces premières opérations de recherches, à défaut de parler de négociations. Cette vidéo, c'est un très bon signal. Parce que cela prouve que les jihadistes ont envie de négocier, ce qu'ils avaient absolument arrêté de faire de manière officielle depuis décembre 2018. Si vous vous souvenez de cette période, c'est l'échec des négociations pour Sophie Pétronin. Et à partir de ce moment-là, le Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (GSIM) annonce ne plus communiquer sur les affaires relatives aux otages. Là, publier cette vidéo prouve qu'ils ont a priori changé d'avis, qu'ils veulent rendre ça officiel et entrer en négociations.

Un journaliste est une monnaie d'échange précieuse ?

Exactement. Très précieuse. 206 prisonniers échangés en octobre dernier contre Sophie Pétronin, Soumaïla Cissé, un homme politique malien, et deux otages italiens. 206 prisonniers, la plupart présumés jihadistes, plus une rançon de 2 millions d'euros. Et là, vous avez un journaliste français à nouveau aux mains de ce groupe qui détient cinq autres otages occidentaux a minima. C'est sans compter les dizaines d'otages maliens, nigériens ou burkinabés qui sont détenus dans le plus total anonymat dans toute la région sahélienne.

Pour un journaliste, aller à la rencontre d'un groupe comme celui-là, n'est pas un comportement de tête brûlée. Aller chercher ces informations, c'est l'essence même du travail de journaliste ?

Non seulement c'est l'essence même, mais c'est ce que faisait Olivier, ce que je fais au Mali, ce que bon nombre de collègues font dans beaucoup de pays difficiles. Et il convient de préciser ici qu'Olivier, 46 ans, était extrêmement expérimenté et surtout habitué de ces sujets liés au terrorisme. Son intermédiaire, son fixeur, celui qui lui a facilité ce rendez-vous, avait déjà prouvé par le passé sa capacité à entrer en contact avec des cadres et des hauts responsables de la sphère jihadiste, notamment celle liée à Al-Qaïda. Il n'est donc pas allé comme ça en prenant un avion et en disant, je vais rencontrer quelqu'un avec un drapeau noir dans le désert. C'était préparé. Il a été a priori piégé. C'est un des risques inhérents à ce métier. Et malheureusement, on n'est jamais à l'abri d'une surprise, même si le mot est sûrement mal choisi. Mais ce reportage-là, comme tous les autres, était préparé, même s'il était effectivement dangereux.

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