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Coronavirus en Algérie : la semoule, les spéculateurs et les cyberpoliciers

Depuis plus de deux semaines, les 44 millions d'Algériens font face à une sévère pénurie de semoule à la suite d'achats massifs résultat de la diffusion d'infox. 

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Vue d'une rue d'Alger vide, en raison du confinement, le 2 avril 2020.  (BILLAL BENSALEM / NURPHOTO)

Spéculation, marché noir, rumeurs... Souvent des spéculateurs cherchent à profiter des crises pour s'enrichir. L'épidémie de Covid-19 n'échappe pas à la règle en Afrique du Nord, déclenchant une répression tous azimuts. Depuis plus de deux semaines, les 44 millions d'Algériens font face à une sévère pénurie de semoule à la suite d'achats massifs de cette denrée de base provoqués par une rumeur très relayée sur Facebook faisant état d'une rupture des stocks.

Jamais de ma vie je n'ai acheté un sac de semoule de 25 kilos, mais là j'ai peur que la situation n'empire et que les boulangers baissent rideaux par peur de la maladie

Fawzi, entrepreneur

à l'AFP

"Il s'agit d'un réflexe humain. La population surstocke, mais certains tentent (aussi) d'en profiter", déclare à l'AFP Karim Khelouiati, un expert en cybersécurité qui surveille le web. Le président Abdelmadjid Tebboune a eu beau tenter de rassurer, évoquant des stocks de semoule suffisants "pour quatre ou cinq mois", des foules s'agglutinaient devant les minoteries pour s'approvisionner directement.

Le ministère du Commerce a décidé, le 7 avril, d'interdire cette vente directe à la population. La distribution de semoule repasse désormais par les grossistes, les grandes surfaces et les épiceries de quartier.

Le président a exhorté les citoyens "patriotes" à dénoncer publiquement les accapareurs, tandis que les gendarmes encouragent la population à leur signaler "tout acte de spéculation, de monopole et de fraude", tout en multipliant les opérations de contrôle.

Du 22 mars au 1er avril, plus de 2 500 personnes ont été arrêtées pour avoir stocké des aliments de base et des produits parapharmaceutiques à des fins spéculatives, selon la gendarmerie. Durant cette période, plus de 5 000 tonnes de vivres et quelque 219 000 articles de pharmacie ont par ailleurs été saisis.

(Interdiction immédiate de la vente directe de la semoule aux citoyens, agence officielle APS) 

Cyber-répression 

En Algérie, la nation d'Afrique du Nord la plus affectée par la pandémie (230 morts et 1 666 cas déclarés), internet est devenu un vecteur de fausses informations qui "contribuent à semer la confusion", dénonçait récemment à la télévision le colonel de gendarmerie Abdelkader Zighed. La semaine dernière, une rumeur évoquant la fermeture imminente des stations-service a enflammé la toile, provoquant des bouchons dans la plupart des villes. En fait, seule était concernée Blida, près d'Alger, premier foyer de la pandémie. 

La gendarmerie algérienne a formé des équipes de "cyber-enquêteurs" qui traquent les colporteurs de fausses nouvelles. Cette cyber-répression a permis de "neutraliser de nombreux opportunistes" publiant de fausses informations, s'est félicité le colonel Zighed.

Entrave à la liberté

Certains médias algériens ont toutefois mis en garde contre le risque d'entrave à la liberté de la presse et d'expression. Le 1er avril, deux responsables et une journaliste du quotidien Sawt Al Akher ont été interpellés pour avoir fait état d'erreurs supposées dans les tests de dépistage. Inculpés, ils ont été remis en liberté, mais sous contrôle judiciaire.

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