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Coronavirus : la Tunisie prend des mesures en faveur des étrangers, notamment des Africains subsahariens

La situation de nombreux migrants dans le pays est rendue très difficile en raison du confinement total imposé à la population.

Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Migrans d'origine soudanaise à Zarzis, au sud de la Tunisie, le 23 septembre 2019. (MOSA'AB ELSHAMY/AP/SIPA / SIPA)

Les autorités tunisiennes ont pris des mesures en faveur des étrangers en Tunisie, notamment les Africains subsahariens, a-t-on appris le 8 avril 2020. Elles ont notamment prolongé les droits de séjour dans le pays en plein confinement général, institué jusqu'au 19 avril pour lutter contre le nouveau coronavirus. Au 8 avril, on comptait 24 morts dans le pays, selon un bilan officiel. Et au 7 avril, 623 contaminations avaient été enregistrées (pour une population de quelque 11 million d'habitants), toujours de source officielle. 

"Des mesures vont être appliquées pour permettre aux étrangers en Tunisie de mener une vie normale et d'être traités comme tous les autres citoyens en cette période de coronavirus", a indiqué  le ministre chargé des droits de l'Homme et des relations avec la société civile, Ayachi Hammami. "Il faut respecter les droits et la dignité de toutes les personnes sans aucune discrimination. Ce virus touche toute l'humanité, et Tunisien ou étranger ont les mêmes droits pour être soignés et pour vivre dignement", a souligné le ministre, ancien opposant à la dictature de Zine El Abidine Ben Ali. 

Concrètement, les autorités ont décidé que les titres de séjour valables au 1er mars étaient prolongés jusqu'à la fin de la crise. Il n'y aura donc pas de pénalités financières pour ceux qui auront dépassé la limite légale de séjour, ni pour les touristes restés plus de trois mois dans le pays. En mars, au début de la crise, de nombreux Français s'étaient retrouvés bloqués en Tunisie avant d'être évacués vers l'Hexagone. 12 000 d'entre eux ont ainsi été rapatriés "en quelques jours", a expliqué le Quai d'Orsay à franceinfo Afrique. Mais au 8 avril, il en restait encore environ 500, touristes et personnes voyageant dans le cadre de leur métier, selon la même source. Il n'y avait, au 9 avril, "aucun touriste français ayant réservé son séjour par l’intermédiaire d’un voyagiste (...) qui soit bloqué en Tunisie", déclarait de son côté Entreprises du Voyage (ex-Syndicat national des agents de voyage).

Vu les circonstances, les migrants clandestins peuvent désormais se déplacer sans crainte d'être arrêtés, a précisé à l'AFP une autre source gouvernementale sous couvert d'anonymat. Mais chacun doit respecter les consignes du confinement et du couvre-feu, a ajouté cette source.

Aides financières

Des étrangers en grande difficulté pourront prétendre à des aides financières, a par ailleurs affirmé Ayachi Hammami. Il a souligné que nombre d'entre eux sont sans papiers et travaillent d'une façon informelle. "Avec les mesures de confinement prises par les autorités, les Subsahariens installés en Tunisie ont perdu leurs sources de revenus. Et sont particulièrement vulnérables face à la progression de l’épidémie", confirme Jeune Afrique.

"La plupart des ressortissants subsahariens en Tunisie, vivant de petits boulots journaliers et de débrouille, ont aujourd’hui perdu leurs sources de revenus et souffrent d’un déficit d’informations", poursuit le journal. Des milliers de ressortissants subsahariens se retrouvent privés de ressources et des dizaines d'entre eux "souffrent aujourd’hui de la faim", rapporte de son côté RFI. 

La solidarité de la société tunisienne

De son côté, la société tunisienne, associations et particuliers, s'est mobilisée pour leur venir en aide. "Des initiatives citoyennes, souvent relayées par les municipalités, essentiellement en banlieue de Tunis, mais également à Sousse et Monastir, ont mis en place des collectes de dons et des circuits de distributions. Une solidarité de voisinage et d’épiciers s’est également mise en place", explique par ailleurs RFI.

Dans le même temps, une cellule solidarité africaine Covid-19 Tunisie a été créée par des représentants des étudiants et travailleurs africains. Selon RFI, elle dispose de relais dans chaque ville. Ses initiateurs ont salué "les efforts déployés par les autorités tunisiennes qui ne ménagent aucun effort pour apporter une aide considérable à l’ensemble des migrants subsahariens".

Le nombre de migrants subsahariens venus de Libye en hausse en 2019

Environ 7 000 étudiants venus d'Afrique subsaharienne résident en Tunisie, a indiqué Ayachi Hammami. D'autres sources font état de chiffres moins importants et d'une forte baisse du nombre de jeunes inscrits dans les universités depuis 2015. D'une manière générale, on compterait plus de 20 000 ressortissants de ces pays, parmi lesquels de nombreux sans-papiers, selon certaines estimations, citées par l'AFP. Le nombre de migrants, surtout des Subsahariens transitant par la Libye, avait plus que doublé au premier semestre 2019, passant de 417 à 1 008 personnes, rapporte le Forum tunisien des droits économiques (FTDES), cité par Le Figaro. Mais ce chiffre est peu fiable dans la mesure où il ne comprend que les personnes "interceptées" aux frontières.

Pour autant, les migrants ne sont pas toujours bien acceptés en Tunisie. Selon une enquête réalisée par le FTDES et rendue publique en décembre 2019, plus de la moitié (51,1%) des 962 personnes interrogées disaient avoir été victimes d'actes haineux ou racistes.

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