Covid-19 : le confinement des capitales africaines nourrit un exode des populations vers les campagnes
Certains choisissent de retourner dans leurs villages afin de continuer à nourrir leurs familles.
Une dizaine de pays ont ordonné le confinement des capitales et des grandes villes, bousculant le quotidien de millions d'Africains. Pour continuer à nourrir leur familles, beaucoup doivent choisir entre rejoindre leurs villages en province ou rester travailler confinés dans la capitale. Pour les travailleurs du secteur informel, sans revenus garantis, se nourrir semble plus accessible à la campagne qu'à la ville.
Fuir un confinement impossible
A Madagascar, une partie de la population a commencé à quitter la capitale dès l'annonce imminente de son confinement. Depuis plusieurs jours, des milliers de Malgaches ont pris la route laissant derrière eux Antananarivo. De longues files de marcheurs se sont formées sur la route nationale 7.
Beaucoup ont préféré partir plutôt que "de tourner en rond en ville le ventre vide", comme le dit Richard Rakotoarisoa interrogé par l'AFP. "On a arrêté de travailler pour respecter la discipline du confinement, alors qu'on doit manger et nourrir nos enfants, explique le père de famille âgé de 30 ans. Pour moi, c'était être indiscipliné ou partir." Alors, avant l'aube, il a pris ses deux enfants et un vélo chargé de quelques bagages pour rejoindre la ville d'Antsirabe, sa femme et le reste de sa famille, à plus de 150 km et trois jours de marche de là.
Dans notre village, nos parents sont agriculteurs. Alors on pourra vivre des produits de nos terres. Dans la capitale, le confinement nous oblige à attendre que la famine nous emporte
Richard Rakotoarisoaà l'AFP
Seule précaution, les autorités sanitaires malgaches ont mis en place un barrage, au sud de la capitale, avec un médecin muni d'un thermomètre, pour tenter de détecter d'éventuels contaminés "en fuite".
Sur la route de l'exode
Comme Madagascar, l'Afrique du Sud, la Côte d'Ivoire, le Burkina Faso, le Niger ou la République démocratique du Congo (RDC) ont choisi d'isoler leurs plus grandes villes.
Le président de RDC Félix Tshisekedi a ainsi interdit les déplacements aériens, fluviaux et terrestres entre sa capitale Kinshasa et ses 10 millions d'habitants et le reste du pays. Déjà un cas de coronavirus a été confirmé le 27 mars dans la province d'Ituri (nord-est), le premier dépisté hors de Kinshasa.
En Côte d’Ivoire, le grand Abidjan est officiellement isolé du reste du pays depuis le 30 mars. Le gouvernement a interdit la circulation de personnes entre la capitale économique et l’intérieur du pays, dans le but de ralentir la progression de l’épidémie de coronavirus, mais certains Abidjanais ont anticipé la mesure et pris la route pour l'intérieur du pays.
Un peut partout sur le continent africain, la pandémie de Covid-19 a provoqué les mêmes scènes. Au Kenya, dès la confirmation du premier cas le 13 mars dernier, des habitants de Nairobi sont partis en voiture ou ont pris d'assaut les "matatu" (minibus) à destination des campagnes. "La ville n'est pas sûre pour nous, c'est pour ça que je rentre au village avec ma famille", confie à l'AFP Erry Musyoka, le gérant d'un magasin d'électronique de Nairobi, en partance avec son épouse et ses deux enfants pour Kitui, à 150 km à l'Est.
Pour lutter contre le coronavirus, le Kenya ou encore le Sénégal n'ont imposé qu'un couvre-feu nocturne à la population, entré en vigueur le 27 mars 2020. Mais un ordre de confinement plus draconien n'est plus qu'une question de temps. "Je ne vais pas attendre, je vais dans mon village à Kisii", dans le sud-ouest du Kenya, lance l'avocat Johnson Makori. "On reviendra quand le problème sera réglé."
Le risque d'une dissémination plus rapide du virus
De nombreux pays africains tente de freiner ces migrations internes redoutant que cet exode ne transporte encore plus rapidement le virus dans les petites villes et les villages.
Au Gabon, qui a déclaré officiellement sept cas et un mort dans la capitale Libreville et ses alentours, le gouvernement a suspendu les vols nationaux, les trains de passagers et prié les habitants de limiter leurs déplacements vers l'intérieur du pays.
"Ces mesures doivent freiner la propagation du virus (...) dans les villages où résident la plupart des personnes âgées que l'on sait plus vulnérables", explique le Dr Guy Patrick Obiang Ndong, porte-parole du comité gabonais de pilotage de lutte contre le coronavirus. L'état déplorable des routes du pays a toutefois achevé de dissuader nombre de candidats au voyage...
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.