"J’ai peur qu’ils entrent et tirent sur tout le monde" : au Soudan, les militaires poursuivent les manifestants jusque dans les hôpitaux
L'armée a attaqué un centre hospitalier de la capitale soudanaise après avoir violemment réprimé le sit-in des manifestants, lundi.
Aux urgences de cet hôpital de Khartoum, des dizaines de patients déambulent, parfois en sang. Certains ont la tête ou les bras bandés, d’autres dorment par terre. Tous sont des victimes venus du sit-in. Lundi 3 juin, les militaires ont dispersé dans le sang ce rassemblement devant le siège de l'armée, où des milliers de manifestants réclamaient le transfert du pouvoir aux civils.
Même à l’hôpital, les manifestants blessés ne sont pas en sécurité. "L’hôpital a été attaqué. Les militaires ont tiré, raconte Mohamed Ibrahim Mohadjer, le fils d'un patient. On a essayé de partir, mais ils nous encerclaient. Un médecin a été blessé. Des soldats sont entrés, mais je ne pouvais rien faire, alors je me suis couché au sol."
Soudain, une nouvelle alerte. Les militaires encerclent l’hôpital et sont entrés. Chacun tente de se cacher. Certains se barricadent dans les toilettes, alors que dans le bâtiment des inconnus circulent et tentent d’ouvrir des portes. L’alerte est levée. Les soldats sont repartis. Mais la scène se répète plusieurs fois, empêchant l’établissement de fonctionner. "Je suis très inquiète, raconte Soha Mafi, dont le père attend une opération du cerveau. J’ai peur qu’ils entrent et tirent sur tout le monde, car personne ne peut les arrêter. En plus, le chirurgien de mon père ne peut pas accéder au bâtiment."
"Le Soudan se transforme en Syrie ou en Libye"
Dans cette situation chaotique, certaines bonnes volontés sont venues prêter main forte au personnel. Ahmed Ramadan s’est porté volontaire. "On a besoin de distribuer la nourriture aux patients. Mais elle ne peut pas être livrée à la cuisine à cause des militaires. On a aussi des fractures, des traumatismes, avec un besoin urgent d’opérer. Le Soudan se transforme en Syrie ou en Libye."
D’un coup les militaires repartent sans explication. Des médecins rejoignent l’hôpital et commencent le travail, priant pour qu’il n’y ait plus d’intrusion. La répression de la contestation, sur ordre du Conseil militaire au pouvoir, a fait au moins 60 morts depuis lundi, selon le dernier bilan du Comité central des médecins, proche de la contestation.
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