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Grogne sociale, manifestations, arrestations... Ce qu'il faut savoir sur la contestation en Tunisie

Près de 780 manifestants ont été arrêtés en cinq jours de manifestations dans plusieurs villes de Tunisie. Leur mot d'ordre ? La lutte contre le plan d'austérité et la hausse des prix dans le pays. Franceinfo fait un point sur la situation.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Des manifestants à Siliana, à environ 130 kilomètres au sud de Tunis (Tunisie), le 11 janvier 2018. (FAOUZI DRIDI / AFP)

Les cailloux pleuvent à nouveau dans rues de certaines villes de Tunisie. Depuis lundi 8 janvier, de nombreux manifestants expriment leur grogne contre les mesures d'austérité et la flambée des prix des produits de première nécessité. En quelques jours, près de 780 manifestants ont déjà été arrêtés. Franceinfo fait le point sur ces manifestations, qui interviennent à l'approche du septième anniversaire de la révolution.

Quelle est la situation sur place ?

De violentes manifestations ont éclaté lundi 8 janvier, dans plusieurs villes du centre défavorisé de la Tunisie. Le mot d'ordre ? Protester contre les mesures d'austérité et le renchérissement des prix des produits de base. "On assiste depuis plusieurs années à une dégradation des fondamentaux économiques et sociaux", explique Sophie Bessis, chercheuse associée à l'Iris (Institut des relations internationales et stratégiques), à franceinfo. Et la fronde a rapidement pris de l'ampleur.

La mort d'un protestataire à Tebourba, à 30 km à l'ouest de la capitale Tunis, lundi 8 janvier, a embrasé la situation. Depuis, des milliers de manifestants se sont rassemblés tous les soirs et plusieurs heurts ont éclaté avec les forces de police. Une situation encore plus tendue à l'approche des premières élections municipales de l'après-révolution, plusieurs fois reportées.

Jeudi soir, la situation semblait s'être calmée, sauf à Siliana, une ville du nord-ouest du pays, où des dizaines de jeunes ont jeté des pierres pendant plusieurs heures. Les forces de sécurité ont alors riposté par des tirs de gaz lacrymogènes. Un nouvel appel à la manifestation a été lancé pour vendredi soir.

Qui a initié ce mouvement ?

En début d'année, c'est le mouvement "Qu'est-ce qu'on attend ?" qui a initié la fronde. Ni parti, ni association, ce réseau rassemble des activistes indépendants, d’anciens blogueurs très actifs pendant la révolution de 2011 et des militants politiques, explique RFI

"Nous nous sommes réunis, et avons décidé de lancer la campagne le 3 janvier 2018, à une date symbolique : celle de la commémoration des émeutes du pain de 1984", raconte Henda Chennaoui, journaliste indépendante de 34 ans et porte-parole de la campagne.

Il est temps de réaliser les objectifs de justice sociale de la révolution. Nos dirigeants n’ont plus d’excuses.

Henda Chennaoui, porte-parole du mouvement "Qu'est-ce qu'on attend ?"

Les autorités estiment, elles, que le mouvement est manipulé par l'opposition de gauche. Vendredi 12 janvier, quelques dizaines de membres du Front populaire ont manifesté devant le tribunal de Gafsa (sud), après l'arrestation, la veille, de deux responsables locaux du parti et d'un responsable syndical, tous accusés d'incitation aux troubles.

Comment réagissent les autorités ?

Les autorités ne comptent pas laisser le mouvement s'étendre dans tout le pays. Quitte à utiliser la méthode forte. En quatre jours de manifestations, elles ont déjà arrêté près de 780 personnes pour vols, pillages, incendies volontaires et blocages de route, a indiqué le porte-parole du ministère de l'Intérieur, Khalifa Chibani. Mais, selon lui, "l'intensité des violences a diminué par rapport aux jours précédents".

De quoi faire réagir les ONG. Dans un communiqué, publié vendredi 12 janvier, Amnesty International a demandé aux forces de sécurité de "ne pas employer une force excessive" et de "cesser de recourir à des manœuvres d'intimidation contre les manifestants pacifiques".

Le mouvement est-il comparable à celui qui a mené à la révolution de 2011 ?

La tentation est grande de comparer ce mouvement aux débuts de la révolution qui a mené à la chute du dictateur Ben Ali, le 14 janvier 2011. "Le fond des revendications reste le même que depuis 2011", souligne Selim Kharrat, analyste politique tunisien. Il faut dire que les protestataires, souvent de jeunes chômeurs, réclament avant tout "dignité" et "travail", les slogans de la révolution.

Le pays est dans un entre-deux très inconfortable, entre une démocratie qui a failli et une deuxième révolution impossible.

Hamza Meddeb, chercheur

Mais il est encore difficile de quantifier la mobilisation. La tension semble retomber plus rapidement que lors de la dernière grande vague de troubles, en 2016. La perspective d'un couvre-feu, décrété des jours durant il y a deux ans, paraît aussi s'éloigner. A moins que de nouveaux événements viennent remobiliser les manifestants.

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