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Chili: la poupée qui scandalise un pays où les droits des femmes sont bafoués

La présidente chilienne Michelle Bachelet et les associations sont montées au créneau pour dénoncer le cadeau sexiste offert par une association d'entrepreneurs au ministre de l'Economie. La polémique fait rage dans un pays où les femmes se battent encore pour leurs droits.
Article rédigé par Falila Gbadamassi
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le ministre chilien de l'Economie, Luis Felipe Cespedes (au centre), reçoit une poupée gonflable du président de l'Association d'exportateurs de produits manufacturés et de services (Asexma), Roberto Fantuzz (à gauche), durant un dîner de Noël, le 13 décembre 2016 à Santiago, la capitale du Chili.  (GEORGE CADENAS / AFP)

 
Une poupée gonflable pour Noël? C’est le cadeau qu’a reçu le 13 décembre 2016 Luis Felipe Céspedes, le ministre chilien de l'Economie, de la part l'Association d'exportateurs de produits manufacturés et de services (Asexma). Le présent était accompagné d’un mot: «Pour stimuler l'économie.»

Le cadeau et le mot, aussi douteux l'un que l'autre, ont créé la polémique dès le lendemain. La présidente socialiste Michelle Bachelet est montée au créneau sur Twitter. La chef de l'Etat, ex-présidente d'ONU Femmes, a dénoncé la démarche. «La lutte pour le respect de la femme a été un principe essentiel au cours de mes deux mandats», a-t-elle rappelé.

(La lutte pour le respect des femmes a été un principe essentiel au cours de mes deux mandats. Ce qui est arrivé au dîner Asexma ne peut pas être toléré)

«Asexma a offert au ministre une poupée, parce que pour eux l'économie c'est comme les femmes, il faut la stimuler», a critiqué le Mouvement pour les droits sexuels et reproductifs (Miles), fustigeant un cadeau «sexiste et misogyne» et un «spectacle dénigrant». 


Le ministre, qui avait reçu le cadeau avec un grand sourire, et le président d'Asexma, Roberto Fantuzzi, ont tous les deux fait amende honorable dans un pays où les associations féministes se mobilisent contre la culture machiste. 

Un ministère de la Femme depuis juin 2016
Le Chili est un pays plein de contradictions en ce qui concerne les droits des femmes. Il a élu deux fois une présidente, mais ne dispose d'un ministre de la Femme et de l'Egalité des genres que depuis juin 2016. La création du ministère était une promesse de campagne de la candidate Michelle Bachelet qui a promu à sa tête Claudia Pascual, une communiste et une féministe. Réagissant à la polémique, cette dernière a déclaré: «Dans notre pays, nous rejetons et condamnons toutes les situations dans lesquelles les femmes sont utilisées comme objets sexuels à des fins de promotion.» 

De l'enfance à l'âge adulte, le droit des Chiliennes est régulièrement bafoué. «Les Chiliennes travaillent moins que leurs pairs masculins  52% contre 73% , et gagnent, à travail égal, 29,7% de moins que les hommes, selon le rapport Género y Salarios, de l’INE (Institut national des statistiques). Sans compter que les Chiliennes sont placées dans une position défavorable face à la loi, dans les instances de prises de décision ou dans la participation à la chose publique», souligne Terriennes, le site de TV5 consacré à la condition féminine dans le monde.  
 
En dépit des propositions de Michelle Bachelet pour amender la loi, le Chili fait encore partie des six pays au monde (les autres sont le Salvador, le Vatican, le Nicaragua, la République dominicaine et Malte) où l'avortement est interdit, même si la vie de la femme est en danger, en cas de viol ou si le fœtus n'est pas viable.

Le 25 novembre 2016, les femmes battaient encore le pavé pour protester contre les violences qui leur sont faites dans leur pays, à l'instar de nombreux pays d'Amérique Latine.

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