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Présidentielle : Rodrigo Duterte, le Donald Trump philippin, largement favori

Les Philippins votent ce lundi pour désigner le successeur du président Benigno Aquino. Rodrigo Duterte fait figure de favori. Il a promis de tuer des milliers de criminels avant de s’octroyer une grâce. Son discours anti-élite séduit les classes populaires. Au moins 10 personnes ont péri ce matin. Des hommes armés ont attaqué un bureau de vote.
Article rédigé par Mohamed Berkani
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 4min
Rodrigo Duterte en campagne électorale (GEORGE CALVELO / ANADOLU AGENCY)
«Fils de pute», l’insulte s’adresse au pape François, lancée par le favori à la présidentielle philippine. La visite du pape avait provoqué un embouteillage sur l’une des îles de l’archipel. Raison suffisante pour Rodrigo Duterte pour s’en prendre publiquement au pape. Qualifié de Donald Trump philippin, l’avocat de 71 ans est connu pour ses excès de langage, ses provocations outrancières et ses méthodes pour le moins radicales.   
 
Des quatre candidats en lice ce lundi pour succéder au président libéral sortant Benigno Aquino, le maire de Davao, grande ville du sud du pays, fascine et révulse ses compatriotes et les militants des droits de l’Homme. Le dernier sondage, publié vendredi 6 mai 2016, le crédite de 33% de voix, loin devant ses concurrents. Le système électoral philippin permet au candidat arrivant en tête, même sans majorité absolue, d’être élu à la magistrature suprême.

 
«Merde, mon problème c’est comment mettre à manger sur la table»
Son discours populiste séduit les classes populaires et joue la carte de l’outsider contre l’élite. Aux médias qui critiquent ses sorties à l’emporte-pièce, le septuagénaire rétorque : «Lorsque je deviendrai président, par la grâce de Dieu, je servirai les gens, pas vous. Merde. Mon problème c'est les gens en bas de l'échelle. Mon  problème, c'est comment mettre à manger sur la table». Un discours qui porte ses fruits. «Il est devenu le symbole de la frustration, peut-être même du désespoir,  pour ceux qui avaient placé leurs espoirs et leur confiance dans l'élite de ce pays», analyse le politologue Ramon Casiple.
 
«Les pompes funèbres seront pleines »
 
Rodrigo Duterte a une recette personnelle pour endiguer la pauvreté : tuer des milliers de délinquants. Et de vanter son bilan à Davao. Les défenseurs des droits de l'Homme l'accusent en revanche d'avoir organisé des escadrons de la mort coupables d'avoir tué plus de 1.000 personnes. Il balaie les accusations d’un revers de la main et… promet de faire plus. «Oubliez les lois sur les droits de l'Homme! Si je suis élu président, je ferai exactement ce que j'ai fait en tant que  maire. Vous, les dealers, les braqueurs et les vauriens, vous feriez mieux de partir. Parce que je vais vous tuer». Résultat, selon lui, les pompes funèbres «vont être pleines à craquer». Une fois ces meurtres de masse accomplis, il va s’octroyer une grâce pour ne pas être poursuivi par la justice.

 
«J’étais en colère qu’ils l’aient violée, mais elle était si belle»
Le 17 avril, sa blague douteuse sur une missionnaire australienne victime de viol et meurtre a choqué jusqu’à son propre camp. La victime travaillait dans une prison de Davao lorsqu’une émeute avait éclaté. «Ils ont violé toutes les femmes (...) Il y avait cette missionnaire australienne (...) J’ai vu son visage et je me suis dit, putain, quel dommage. Ils l’ont violée, ils ont tous attendu leur tour. J’étais en colère qu’ils l’aient violée, mais elle était si belle. Je me suis dit, le maire aurait dû passer en premier».
 
Son principal concurrent Mar Roxas, candidat adoubé par le président sortant Benigno Aquino, est issu d'une puissante famille politique et a été éduqué aux Etats-Unis. Il symbolise cette élite si vilipendée par Rodrigo Duterte.
 
L’élection est-elle jouée ? Faute de machine électorale capable de mobiliser les électeurs dans plusieurs provinces, l'avance du favori dans les sondages pourrait ne pas se traduire dans les urnes, nuancent des politologues. 

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