Xi Jinping en Afrique : "Il y une plus grande dépendance aujourd'hui de l'Afrique envers la Chine"
Le président chinois est arrivé samedi à Dakar pour une visite de deux jours pendant laquelle plusieurs accords bilatéraux doivent être signés. Il se rendra ensuite au Rwanda et en Afrique du Sud pour un sommet des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud).
Le président chinois, Xi Jinping, est arrivé samedi 21 juillet au Sénégal, point de départ d'une tournée d'une semaine en Afrique, pour renforcer les liens économiques entre la Chine et le continent, où Pékin multiplie les prêts bon marché en échange de ressources minières et de grands projets de construction. La Chine est ainsi devenu le premier partenaire commercial de l'Afrique.
"L'intérêt chinois pour l'Afrique n'est pas nouveau", note Ruben Nizard, économiste spécialiste de l'Afrique subsaharienne à la Coface (Compagnie française d'assurance pour le commerce extérieur) à franceinfo, dimanche 22 juillet. "Ses stocks d'investissement atteignent désormais 40 milliards de dollars", contre 49 milliards pour la France. Conséquence : les liens économiques se resserent, parfois aux dépents des normes environnementales. Tout comme les européennes et les américaines, les multinationales chinoises sont souvent pointées du doigt pour leurs entorses aux standards environnementaux. Pourtant, la Chine n'est pas prête d'abandonner le continent, assure Ruben Nizard : "Il y une plus grande dépendance aujourd'hui de l'Afrique envers la Chine."
franceinfo : Pourquoi l'Afrique interesse-t-elle autant la Chine ?
Ruben Nizard : L'intérêt chinois pour l'Afrique n'est pas nouveau. Dans un premier temps, il a été alimenté par les matières premières africaines, nécessaires au développement chinois. Mais la Chine investit de plus en plus en Afrique. Les stocks d'investissement en Afrique atteignent désormais 40 milliards de dollars et talonnent ceux de la France qui s'établissent à 49 milliards de dollars. Le déséquilibre se situe plus à d'autres endroits, au niveau de certaines vulnérabilités. La dépendance de l'Éthiopie, de la Zambie ou de l'Angola n'est pas la même que celle de la Côte d'Ivoire ou du Sénégal. Mais il y une plus grande dépendance aujourd'hui de l'Afrique envers la Chine.
Ce développement de la présence chinoise en Afrique se fait au détriment de la France et de l'Europe ?
Effectivement, c'est ce que l'on observe assez facilement via les données du commerce extérieur. Les parts de marché françaises sont en constant déclin depuis vingt ans. Les parts de marché chinoises, elles, n'ont cessé de progresser à un rythmé effréné. La France n'est pas la seule à subir le mouvement chinois.
Comment voyez-vous l'avenir de cette relation entre l'Afrique et la Chine ?
La relation entre l'Afrique et la Chine est partie pour durer. Cette visite est un exemple supplémentaire de l'intérêt chinois qui ne faiblit pas pour les pays africains. Il y a fort à parier que l'intérêt ne faiblira pas non plus au cours des années à venir. La relation de l'Europe à l'Afrique, elle, continuera d'être dictée par les divers dossiers, notamment les dossiers sécuritaires et de l'immigration. Les intérêts économiques sont aussi importants pour l'Europe qui n'a pas envie de capituler face à l'avancée chinoise. Il n'est pas simplement question d'affrontement, mais également de s'associer avec la Chine pour travailler en Afrique, en collaboration avec les pays africains.
Les multinationales sont souvent pointées du doigts pour des pratiques douteuses en matière d'écologie. Certains observateurs disent que c'est encore pire avec les entreprises chinoises.
C'est effectivement une critique qui revient de manière récurrente. Les gouvernements africains tentent également de parer à ce type de désagréments. Par rapport au droit du travail, des quotas sont mis en place pour permettre de créer de l'emploi local et éviter que l'ensemble des emplois soient pris par de la main d'oeuvre chinoise. Ça entre de plus en plus dans le débat politique et il sera de plus en plus difficile de ne pas respecter certains critères pour les entreprises chinoises, de la même manière qu'il sera plus difficile pour les multinationales européennes ou américaines [de ne pas respecter ces mêmes critères]. Les standards environnementaux ne sont par exemple pas toujours respectés. Les pays africains et la Chine sont néanmoins signataires des accords sur le climat et sont donc engagés sur une trajectoire qui les oblige à progresser dans ce domaine.
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