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Chine: les antibiotiques, un vrai problème de santé publique

La Chine est le plus grand consommateur mondial d'antibiotiques. Mais l’usage excessif de ces médicaments favorise le développement de super-bactéries – microbes pathogènes mutants – pharmaco-résistantes. Une réalité qui met en danger la vie de millions de Chinois.
Article rédigé par Catherine Le Brech
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 4min
Une clinique dans le village de Pingtang, dans la province d'Anjui, en Chine.  (AP Photo / Eugene Hoshiko)

«La Chine consomme presque la moitié de la production mondiale d'antibiotiques. Elle en a ingéré 162.000 tonnes en 2013, presque également répartis entre les humains (48%) et les animaux (52%)», précisait le 4 janvier 2017 Le Figaro.

Les antibiotiques – même certaines molécules destinées en dernier recours pour des infections gravissimes – y sont souvent prescrits pour des maladies bénignes à virus, bien au-dessus des niveaux recommandés, a alerté l’OMS. Dans une étude de novembre 2015, l’Organisation mondiale de la Santé révélait que «près des deux tiers des Chinois pensaient que les antibiotiques devraient être utilisés pour traiter les rhumes et la grippe, alors qu'un tiers pensait que les antibiotiques étaient efficaces contre les maux de tête».

Il faut savoir que les hôpitaux vendent les médicaments directement aux patients et que les primes des médecins dépendent de leur vente. Ceci explique en partie les prescriptions systématiques de ces traitements spécifiques ainsi que le manque de prévention et d’information aux patients, qui serait à l’origine d’un manque à gagner pour les praticiens.

Pékin prend conscience du problème
Pékin a fait le constat de la résistance de certaines super-bactéries aux traitements, liée à la prise effrénée d’antibiotiques. Le gouvernement chinois «a promis d'intensifier la recherche et le développement de nouveaux antimicrobiens et de freiner la surconsommation des médicaments existants pour lutter contre la résistance aux antimicrobiens», selon un article de Science publié en août 2016.

Un bébé malade reçoit une solution antibiotique intraveineuse dans une clinique de Suxiao, village de la province d'Anjui, en Chine. Alors que les antibiotiques ont amélioré la santé en Chine, les experts s'accordent à dire qu'ils sont surconsommés et ont des conséquences dangereuses. (AP Photo / Eugene Hoshiko)

D'où un plan, qui va dans le sens de la réforme du système de santé chinois voulue par le ministère de la Santé. Ce plan entend développer d’ici à 2020 de nouveaux antibiotiques, rendre obligatoire la vente de certains médicaments sur ordonnance et intensifier la surveillance de l'usage humain et vétérinaire de ces traitements.

Un cercle vicieux
Car la consommation humaine n’est pas la seule en cause. De leur côté, les éleveurs chinois administrent à hautes doses ces médicaments de manière préventive pour limiter la mortalité de leurs bêtes et surtout en accélérer la croissance.

Autre point noir dans le développement de la résistance aux antibiotiques, le non retraitement des déchets des usines pharmaceutiques en Chine – notamment les rejets des eaux usées – approvisionnant une grande partie du marché mondial.

L’eau est aussi polluée par les rejets humains et animaux (urine et matières fécales) dans les rivières et les champs imprégnés de quantités anormales d’antibactériens. Lesquels «contaminent» les aliments qui seront de nouveau ingérés par les humains, renforçant au passage leur résistance aux bactéries.

Une information du site ThePaper.cn, reprise par Reuters en février 2016, indiquait qu’en 2013, «plus de 50.000 tonnes d'antibiotiques avaient été déversés dans les voies navigables et le sol chinois».


Les Chinois pourraient bien en payer le prix
Les experts avertissent depuis les années 1990 du risque de développement de super-bactéries, mais jusqu’à présent peu de mesures ont été prises pour changer la donne. Pour l’OMS, la résistance aux antimicrobiens pourrait coûter 20 milliards de dollars à la Chine et causer un million de décès prématurés d'ici à 2050 dans le pays.

Le 18 novembre 2015, The Lancet tirait la sonnette d’alarme en annonçant la découverte chez l’homme et le cochon de bactéries porteuses d'un gène rendant inefficace certains antibiotiques de dernier recours.

Soigner efficacement la population, un défi pour les générations à venir
Plus globalement, une étude indépendante menée en 2016 par la Wellcome Trust à Londres (mandatée par le gouvernement britannique et dirigée par l'ancien économiste en chef de Goldman Sachs Jim O'Neill) indique «que d'ici 2050, les infections qui ne peuvent être traitées avec des antibiotiques pourraient coûter 100 milliards de dollars à l'économie mondiale et tuer 10 millions de personnes par an.»

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