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Des militants écologistes argentins interpellent Total

La Patagonie argentine serait le nouvel eldorado des gaz de schiste. Parmi les compagnies pétrolières qui forent sur place, Total, deuxième acteur du pays. Certains dénoncent une exploitation à marche forcée au détriment de l’environnement et des droits sociaux. Ils demanderont vendredi lors de l’assemblée générale des actionnaires à Paris des comptes à l’entreprise.
Article rédigé par franceinfo
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  (Puits non conventionnel de Total, en bordure de l'aire Auca Mahuida en Patagonie argentine © Observatorio Petrolero Sur)

Alors qu'en France le débat sur les gaz et huiles de schiste n'est toujours pas complètement clos, l'exploitation de ces ressources fossiles non conventionnelles s'accélère en Argentine. Total détient sur place près d’une dizaine de permis, jusque dans l’aire naturelle protégée d’Auca Mahuida. Total est présent en Argentine depuis 1978 et il s’agit du deuxième opérateur de gaz du pays. Dès 2010, la compagnie s’est lancée dans les hydrocarbures non conventionnels avant tous les autres.

Les multinationales pétrolières se disputent le nouveau "joyau" de l'industrie : la formation de Vaca Muerta, qui couvre 30.000 km², et contient d'immenses réserves potentiellement exploitables, au deuxième rang mondial pour le gaz et quatrième pour le pétrole.

Un système plus souple en Argentine

"Nous nous sommes opposés à l'octroi du permis de Total sur l'aire protégée Auca Mahuida, mais le gouvernement provincial est passé outre notre avis technique. Le puits Pampa las Yeguas et les infrastructures qui y sont liées menacent cette réserve de biodiversité, notamment des espèces telles que le nandou choique, le condor, le guanaco ou le chat andin ", explique Caroline Garcia, ingénieure en ressources naturelles et en environnement à la direction technique des aires protégées de la province du Neuquen.

Total reconnaît avoir fait un puits expérimental avec l’accord des autorités et assure avoir remis le site en état aujourd’hui. Le système d’autorisation en Argentine est plus souple qu’en France, les régions ont plus de pouvoir. Mais aujourd’hui une trentaine de communes argentines disent non à la fracturation hydraulique, technique interdite chez nous, mais elles ont du mal a faire reconnaître leur droit.

Les populations locales mises de côté

Cette province faisait déjà l’objet d’une exploitation pétrolière conventionnelle, mais avec les nouvelles techniques de recherche, elle a aiguisé l’appétit des entreprises. Elles ont obtenu de nouveaux permis de recherche de gaz et huile de schiste, qui entrent parfois en compétition avec les activités agricoles de la région. "Les compagnies pétrolières avancent à grande vitesse, sans que les populations locales n'aient jamais été consultées ni même informées. Le développement des hydrocarbures non conventionnels a lieu sur les terres de communautés mapuche et de petits paysans, entrant en concurrence avec l'élevage de petit bétail ", selon Diego di Risio de l'Observatorio Petrolero Sur, co-auteur d’un rapport sur le sujet.

La durée des concessions a été allongée à 35 ans, les compagnies pétrolières bénéficient de conditions d’exploitation et d’autorisation beaucoup plus souples qu’en France, où l’on a interdit la technique de la fracturation hydraulique. Pour les militants argentins, la mobilisation française contre les gaz de schiste est un exemple. Ils espèrent au moins, en faisant entendre leur voix vendredi à l’assemblée générale des actionnaires, montrer qu’en Argentine aussi la lutte s’organise. 

"La loi française interdit le recours à la fracturation hydraulique au nom de la protection de la santé des populations et de l'environnement, mais le gouvernement français n'a rien fait pour freiner le développement de gaz et huiles de schiste en dehors de nos frontières. Il doit agir immédiatement ", pense Juliette Renaud des Amis de la Terre, qui soutient les militants argentins. L'association a publié un dossier sur le sujet.

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