Reportage "Je n’ai plus besoin de me demander comment je vais tout faire" : l’Allemagne veut étendre la semaine de quatre jours, initiée par Volkswagen il y a 30 ans

Qui n'a pas rêvé de travailler quatre jours par semaine tout en percevant 100% de son salaire ? Utopie ou modèle d'avenir ? L'Allemagne semble plutôt séduite. Illustration dans une entreprise du sud-ouest du pays.
Article rédigé par Sébastien Baer - Edité par Ariane Schwab
Radio France
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Temps de lecture : 3 min
Ayleen Bauser, assistante de direction, ne travaille plus le mercredi depuis le passage à la semaine de 4 jours (SEBASTIEN BAER / RADIO FRANCE)

Ce matin-là, les camions sont déjà chargés, remplis de robinets, de carrelage et de tuyaux. Dans l’atelier de cette entreprise qui installe des chauffages et des sanitaires, au sud-ouest de l'Allemagne, le patron Markus Gaßner donne les dernières instructions à sa dizaine d’ouvriers. Chacun travaille quatre jours par semaine.

Le planning est affiché sur l’ordinateur, avec des petits bâtonnets de couleur. "Chacun a son propre planning et sa propre couleur, explique le patron. Par exemple, en jaune, c’est Denis : il n’est jamais là le vendredi. Le mercredi, c’est Ayleen qui ne travaille pas." 

"On fait autant de chantiers que quand on travaillait cinq jours mais en quatre jours et la productivité a même augmenté."

Markus Gaßner, chef d’entreprise

à franceinfo

L’entreprise a été l’une des premières de la région à mettre en place la semaine de quatre jours, dès 2016 : 37 heures hebdomadaires contre 40 auparavant et sans perte de salaire. Pour gagner en efficacité, le chef d’entreprise a revu son organisation. "Nous avons changé nos processus, explique Markus Gaßner. Nous installons toujours les mêmes produits, ce qui permet aux monteurs de savoir exactement où se trouve la vis et où ils doivent la fixer. Pour la gestion des stocks, on a mis en place un scanner et un étiquetage, cela nous permet d’avoir toujours au moins cinq pièces en réserve. Comme ça, on ne manque jamais du matériel dont nous avons le plus besoin. Tout ça permet aux gars d’arriver plus vite sur les chantiers et on est plus efficaces".

Markus Gaßner a mis en place la semaine de 4 jours dans son entreprise en 2016. (SEBASTIEN BAER / RADIO FRANCE)

50 entreprises vont faire le test pendant six mois

Depuis le passage à la semaine de quatre jours, Ayleen Bauser, l’assistante de direction, ne travaille plus les mercredis. "Avant, je travaillais dans une entreprise où on faisait cinq jours par semaine, et je dois dire qu’en comparaison, la semaine de quatre jours, c’est un rêve, confie-t-elle. Je peux tranquillement faire mes courses, mon ménage, être là pour les enfants, prendre rendez-vous chez le médecin ou aller à la piscine. Je n’ai plus besoin de me demander : ‘oh mon dieu, comment je vais faire tout ça ?’".

Le patron fait le point une fois par mois avec son équipe sur la semaine de quatre jours mais jusqu’à présent, personne n’a remis en cause ce modèle. Le puissant syndicat IG Metall souhaiterait même l’étendre à la filière sidérurgique. 

Mauvaise idée, affirme Holger Schäffer, expert du marché du travail à l’institut d’économie de Cologne. "C’est une discussion complétement absurde. On manque de main-d’œuvre et on veut travailler encore moins, ce qui aggrave la pénurie, critique-t-il.

"C’est exactement l’inverse de ce dont nous avons besoin. Nous devons discuter de mesures et d’idées pour inciter les gens à travailler plus."

Holger Schäffer, expert du marché du travail

à franceinfo

En Allemagne, ce modèle de réduction du temps de travail, apparu pour la première fois en 1994, au sein du groupe Volkswagen, séduit pourtant. Comme d'autres pays européens, elle réfléchit à élargir ce dispositif censé améliorer la productivité des entreprises et surtout rendre les salariés plus heureux. Dans le cadre d’une étude, 50 entreprises s’apprêtent à l’expérimenter pendant six mois. Huit Allemands sur dix plébiscitent ce modèle de travail.

L'Allemagne veut étendre la semaine de 4 jours : reportage de Sébastien Baer

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