Attentat de Berlin : les terroristes "jouent la carte du cercle vicieux" pour "destabiliser nos sociétés", estime Pascal Boniface
L'attentat de Berlin s'inscrit dans une stratégie qui vise à attiser les affrontements à l'encontre des musulmans, estime Pascal Boniface, géopolitologue et directeur de l'Institut de relations internationales et stratégiques, mercredi sur franceinfo.
L’enquête se poursuit à Berlin pour retrouver l’auteur de l’attentat sur un marché de Noël qui a fait 12 morts et une cinquantaine de blessés, lundi. L'attaque au camion, revendiquée mardi soir par le groupe Etat islamique, fait partie d'une stratégie. Selon Pascal Boniface, géopolitologue et directeur de l’IRIS (Institut de relations internationales et stratégiques), mercredi 21 décembre sur franceinfo, le groupe terroriste veut "déstabiliser nos sociétés, semer à la fois la peur et la haine" et espère "qu’il puisse y avoir des affrontements dans les sociétés touchées par le terrorisme".
franceinfo : Quel est le but de l'organisation Etat islamique ?
Pascal Boniface : Ce n’est pas de prendre le pouvoir dans nos pays mais de déstabiliser nos sociétés. Semer à la fois la peur et la haine et espérer qu’il puisse y avoir des affrontements dans les sociétés touchées par le terrorisme. Daech souhaite instaurer un climat de peur pour essayer d’avoir une maîtrise de nos esprits. Il faut d'ailleurs saluer la dignité avec laquelle la Chancelière Angela Merkel a répondu à ce défi. Ils espèrent que ces types d’attentats provoqueront, en réaction, des incidents contre les musulmans. Eux-mêmes pourraient montrer aux musulmans qu’il n’y a pas de place pour eux dans les sociétés occidentales pour qu’ils se radicalisent à leur tour. Daech joue la carte du cercle vicieux qui, pour l’instant, n’a pas marché.
Le résultat est que l’extrême droite progresse partout en Europe. Est-ce que c'est l'objectif du groupe Etat islamique ?
Bien sûr. L’extrême droite a un discours antimusulman affirmé et cela correspond aux objectifs de Daech, qui peut dire : "Vous voyez, les responsables politiques qui gagnent du terrain disent eux-mêmes qu’il n’y a pas de place pour vous dans cette société, donc il faut soit vous battre là-bas, soit nous rejoindre en Syrie ou en Irak." Le fait que les jihadistes perdent du terrain en Syrie et en Irak va les conduire à se radicaliser encore plus, tenter de multiplier les attentats, et l’approche de Noël est en plus une date symbolique.
Les attentats en Europe, l'assassinat de l'ambassadeur russe en Turquie, est-ce que tout cela fait partie d'un plan général de l'organisation Etat islamique ?
Non, car on ne peut pas relier l'assassinat de l'ambassadeur russe en Turquie à Daech. Mais on voit qu'il y a un climat d'insécurité et Daech doit se réjouir de voir l'anxiété monter dans l'esprit occidental. Il faut cependant rappeler que ce ne sont pas nos pays qui souffrent le plus du terrorisme, c'est bien dans les pays du Proche-Orient qu'on compte le plus de victime.
Comment se sortir de cette crise terroriste, quelle est la clé ?
Il n’y en a pas vraiment, le risque zéro n’existe pas. Il faut continuer la surveillance, priver les terroristes de leur assise territoriale en Syrie et en Irak, même si ça ne résoudra pas tout. Mais il faut surtout se dire que nous sommes face à un défi de long terme. Ce n’est pas la Troisième Guerre mondiale, il ne faut pas donner cette importance au groupe Etat islamique. Il n’a pas la force du IIIe Reich, mais c’est un défi de long terme pour nos sociétés.
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