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Bulgarie: le torchon brûle avec la Turquie à l'occasion des élections à Sofia
La Turquie, en pleine campagne électorale, s’en prend successivement à de nombreux pays d’Europe. Après l’Allemagne et les Pays-Bas, c’est la Bulgarie qui subit les foudres d’Ankara. Mais cette fois, la question est plus sensible car les deux pays ont une frontière commune et la Bulgarie compte une importante minorité turque.
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Le président bulgare Rumen Radev a accusé le 17 mars 2017 la Turquie voisine d'«ingérence inadmissible» dans la campagne électorale pour les élections législatives anticipées du 26 mars dans son pays, et prévenu que son gouvernement ne l'accepterait pas. Car si la Turquie est bien en campagne pour son référendum sur la présidentialisation du régime voulue par M.Erdogan, la Bulgarie est, elle, à la veille de voter pour élire ses députés.
Et la Bulgarie estime qu’Ankara soutient le nouveau parti de la minorité turque Dost (ami en turc). En pleine campagne électorale, les deux grands partis en lice en ont profité pour déconcer une telle intervention dans les affaires intérieures bulgares. «Nous sommes catégoriquement opposés à l'ingérence d'un pays étranger dans nos affaires intérieures», a déclaré Kornelia Ninova, chef du parti socialiste bulgare (PSB). «Cette ingérence est inacceptable», lui a fait écho Boïko Borissov, ancien Premier ministre et chef des conservateurs.
Tout vient du fait que le ministre turc des Affaires sociales, Mehmet Muezzinoglu, a appelé les citoyens bulgares d'origine turque à voter pour Dost.
Une minorité turque très sollicitée
Dost, soutenu par Ankara, ambitionne de concurrencer le traditionnel parti de la minorité turque bulgare, le Mouvement pour les droits et libertés (MDL) à l'attitude pour le moins réservée vis-à-vis de Recep Tayyip Erdogan. Réservée au point que le leader historique de la minorité turque de Bulgarie, Ahmed Dogan, a accusé le président turc de chercher à rétablir le «sultanat» ottoman, qualifiant de «folie» le référendum institutionnel organisé par Ankara en avril.
Le MDL est la troisième formation du parlement sortant. Or, les sondages mettent au coude-à-coude les deux camps (conservateurs et socialistes) en lice pour ces élections, d'où leur sensibilité sur les interventions extérieures.
La présence d'une forte minorité turque de Bulgarie est liée à l'histoire du pays qui a longtemps été une partie de l'empire ottoman. Elle est évaluée à quelque 700.000 personnes, soit un peu moins de 10% de la population. On comprend mieux les pressions turques et les réactions bulgares quand on sait qu'environ 60.000 de ces Bulgares peuvent voter en Turquie et que de nombreux Bulgares installés en Turquie rentrent spécialement en Bulgarie lors des consultations électorales. Un tourisme électoral contesté par les nationalistes bulgares.
Si à l’approche des élections, tous les camps ont intérêt à jouer sur la fibre nationaliste, les relations entre les deux pays sont plutôt consensuelles. Pour preuve, «sept ressortissants turcs recherchés pour leurs liens présumés avec le prédicateur Fethullah Gülen ont été remis sans autre forme de procès aux autorités turques», rapportait un journal bulgare relayé par Courrier International.(Nouvelle fenêtre)
Il faut dire que la Bulgarie, porte d'entrée de l'Union européenne, a une frontière de près de 260 km avec la Turquie et que le contrôle des migrations entre la Turquie et la Bulgarie dépend beaucoup du bon vouloir d’Ankara.
Sur le plan économique, la Turquie est le troisième client de la Bulgarie (derrière l'Allemagne et l'Italie) et son cinquième fournisseur.
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