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Conseil européen suspendu : "À l'égard des opinions publiques, tout cela est assez délétère", d'après un spécialiste

Christian Lequesne, professeur de sciences politiques réagit sur franceinfo après la suspension du sommet des dirigeants européens, lundi 1er juillet.

Article rédigé par franceinfo
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Le sommet européen débuté le 30 juin a été suspendu dès le lendemain, faute d'accord.  (NICOLAS LANDEMARD / LE PICTORIUM / MAXPPP)

"On s'attendait quand même à ce que les chefs d'États montrent l'exemple et réussissent à sortir de leurs chicayas. Or, on est obligé d'avoir un nouveau rendez-vous demain. Je trouve qu'à l'égard des opinions publiques, tout cela est assez délétère" déplore lundi 1er juillet sur franceinfo Christian Lequesne, professeur de sciences politiques et chercheur au CERI (Centre de recherches internationales). Le sommet des dirigeants européens sur le partage des postes de pouvoir de l'UE a été suspendu jusqu'au mardi 2, faute de résultat concret.

franceinfo : Emmanuel Macron a déclaré que "nous donnons de l'Europe une image qui n'est pas sérieuse". Il a raison ?

Christian Lequesne : Bien sûr ! On s'attendait quand même à ce que les chefs d'États et de gouvernements montrent l'exemple et réussissent à sortir de leurs chicayas pour nommer aujourd'hui au moins le président de la Commission. Or ce n'est pas ce qu'il s'est passé, on est obligé d'avoir un nouveau rendez-vous demain. Je trouve qu'à l'égard des opinions publiques, tout cela est assez délétère.

Pourquoi est-ce si compliqué de se mettre d'accord ?

Il faut allier plusieurs critères. D'abord, il faut que les trois grandes familles politiques européennes soient représentées (socialistes, conservateurs et libéraux). Ensuite, il faut qu'il y ait un équilibre géographique (entre Sud, Nord, Est et Ouest). Et puis troisième donnée : il faut qu'il y ait un équilibre de genre, des hommes et des femmes. Tout cela rend les choses très compliquées, car en plus les partis sont à peu près équivalents : il y a quasiment autant de conservateurs, de socialistes et de libéraux parmi les chefs d'Etats et de gouvernements.

C'est une situation inédite ou pas ?

Il y a déjà eu, par le passé, des refus de présidents de la Commission. On a eu des exemples célèbres. Les Britanniques, par exemple, ont refusé un candidat belge [ndlr : en 2004, le libéral Guy Verhofstadt, à cause de son opposition à la guerre en Irak]. Mais là, ce qui rend les choses plus compliquées, c'est qu'il n'y a plus les conservateurs face aux socialistes. Vous avez un troisième parti, les libéraux centristes d’Emmanuel Macron, qui veulent jouer un rôle. Cela déplaît aux conservateurs, notamment les Allemands, qui n'ont pas aimé qu'on ne retienne pas Manfred Weber à la présidence de la Commission.

Les rapports de force entre pays jouent-ils aussi ?

Évidemment, mais au final il faut dégager une majorité. Les textes prévoient la règle de la majorité qualifiée : 21 États sur 28 doivent être d'accord. Tout doit se faire dans le compromis. J'espère que demain [mardi 2 juillet], les dirigeants se mettront d'accord. Si ce n'est pas le cas, cette nouvelle législature du Parlement européen débutera fort mal.

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