La contamination à la dioxine en Allemagne jette une ombre sur l'alimentation des animaux de boucherie
Les produits contaminés par la dioxine, résidu de combustion qui peut être cancérigène à haute dose, sont des oeufs et des porcs.
L'affaire jette une ombre sur le menu quotidien des animaux de boucherie et crée le doute sur l'industrie de l'alimentation du bétail, accusée de manque de transparence.
L'élevage a adopté des méthodes de plus en plus industrielles depuis la fin de la Deuxième guerre mondiale en Europe, comme on peut le constater à la Semaine verte de Berlin, le plus important salon agricole au monde, qui a ouvert jeudi.
Poules, vaches et autres cochons sont souvent nourris au-delà de leurs besoins naturels, pour produire toujours plus d'oeufs, de lait et de viande, si possible à moindre coût. "Si on laissait une vache à lait simplement brouter dans les prés, elle ne survivrait pas: les quantités que les éleveurs exigent d'elles ne sont possibles qu'avec un supplément de protéines", remarque le porte-parole de la Fédération allemande de la protection des animaux.
"En moyenne, le bétail européen se nourrit aux deux tiers de matières premières (blé, fourrage, paille, herbe) et à un tiers d'aliments composés par des industriels", indique en France le Syndicat national de l'industrie de la nutrition animale.
La proportion de ces aliments composés (farine, miettes et granulés) dans les repas varie cependant énormément selon les espèces, la taille, la morphologie des bêtes et les convictions des éleveurs. Un ruminant aura toujours besoin de fourrage, mais un porc ou une volaille peut se nourrir à 100 % de produits transformés.
"La plupart des éleveurs préfèrent, pour réduire leurs frais, déléguer l'élaboration d'aliments composés à des spécialistes qui achètent et produisent en gros", explique la Fédération allemande de l'alimentation pour animaux (DVT). "Ces industriels peuvent faire des économies d'échelles, impossibles à réaliser par l'agriculteur", ajoute-t-elle. Ces fabricants sont contrôlés par les services d'hygiène, un peu comme les restaurateurs, plus ou moins fréquemment selon leurs antécédents et leur taille.
Composant principal du mélange industriel donné au bétail: les céréales (blé, orge ou maïs), qui représentent près de la moitié des matières premières mises en oeuvre. Viennent ensuite les tourteaux d'oléagineux (soja, colza, tournesol) pour environ 25% et les co-produits des industries céréalières (sons, remoulages...) pour environ 10%. S'y ajoutent des minéraux, des vitamines, des fourrages déshydratés, des graines protéagineuses. Et pour 1 à 2% environ des huiles et graisses végétales par qui le scandale de la dioxine est arrivé en Allemagne.
Dans ce cas précis, un fabricant de compléments alimentaires aurait utilisé un lot de graisses à usage industriel contenant de la dioxine pour fabriquer 3000 tonnes de graisses destinées à l'alimentation animale, livrées à des clients dans toute l'Allemagne. "Généralement, l'industriel pratique toujours des tests quand il achète ses différents produits auprès de ses fournisseurs. Mais ces derniers sont parfois longs à réaliser (dans le cas de celui à la dioxine, la durée était souvent de quatre semaines), ce qui conduisait à utiliser des composants avant même d'avoir les résultats des laboratoires", indique la DVT.
Depuis mercredi, le gouvernement fédéral a décidé d'interdire de telles pratiques, dans le cadre de mesures mises en place pour mieux protéger le consommateur. Ces dernières ne vont toutefois pas assez loin, selon le président de la Communauté de l'agriculture paysanne, l'écologiste Bernd Voss: "il n'est toujours pas obligatoire d'indiquer la provenance de tous les éléments composants les aliments pour animaux". Une porte ouverte, selon lui, à de nouveaux abus.
Les ministres de l'Agriculture de l'UE pourraient discuter lundi prochain de moyens d'actions pour éviter de nouveaux dérapages.
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