Législatives en Grande-Bretagne : Theresa May "a entièrement perdu la face" vis-à-vis de ses partenaires européens
Pour Agnès Alexandre-Collier, professeure en civilisation britannique à l'Université de Bourgogne, "elle ne s'attendait pas du tout à ce résultat".
Theresa May, Première ministre britannique, va-t-elle démissionner ? La question se pose après son échec aux élections législatives où elle sort fragilisée. Le parti conservateur a perdu sa majorité absolue. Les tories remporteraient 314 sièges, contre 262 au parti travailliste. Le leader de l'opposition, Jeremy Corbyn, qui a appelé à la démission de sa rivale. Theresa May devait prendre la parole à 11h, heure française.
"Le pari est raté. Elle ne s'attendait pas du tout à ce résultat", a réagi sur franceinfo vendredi 9 juin, Agnès Alexandre-Collier, professeure en civilisation britannique à l'Université de Bourgogne. "Elle a perdu son pari et par rapport à ses partenaires européens, elle a entièrement perdu la face", a-t-elle ajouté. "Tout est à refaire. On est face à une crise qui va jouer contre le gouvernement britannique".
franceinfo : Quelle est votre première analyse sur les élections législatives en Grande-Bretagne et la situation personnelle de Theresa May ?
Agnès Alexandre-Collier : Le pari est raté et puis on a l'impression qu'elle fait la même chose que David Cameron. Elle ne s'attendait pas du tout à ce résultat. Quand elle a annoncé ces élections, les sondages annonçaient un raz-de-marée électoral, on parlait de 395 sièges pour les conservateurs.
En l'espace de quelques semaines, c'est la dégringolade. Je crois qu'elle a pêché par excès d'optimisme, devant les sondages.
Agnès Alexandre-Collier, professeure en civilisation britannique à l'Université de Bourgogneà franceinfo
Elle a estimé que c'était assez solide pour lui permettre de remporter les élections. Je crois que Theresa May a fait une mauvaise campagne. Sur la forme, elle n'a pas assisté aux débats télévisés, alors que tous les leaders des autres partis étaient présents, elle a envoyé sa ministre de l'Intérieur. Elle est revenue sur un certain nombre d'engagements électoraux. Elle avait déjà changé d'avis sur le Brexit car elle avait fait campagne dans un premier temps contre le Brexit. Theresa May a cette image d'indécision on la surnomme, d'ailleurs "May or May not". C'est cette image qui s'est révélée derrière cette apparence de dame de fer. Mécaniquement Jeremy Corbyn, le leader travailliste était présenté comme l'homme du peuple, proche des gens, plutôt à l'aise dans les débats télévisés évoquant des sujets dont veulent entendre parler les Britanniques, la santé, l'éducation, les services publics, les domaines de bases qui concernent le citoyen moyen.
Avec les alliances possibles, Jeremy Corbyn peut-il se retrouver au 10 Downing Street ?
Absolument, si les conservateurs n'arrivent pas à trouver d'alliés et leurs seuls alliés possibles auxquels on peut penser ce sont les unionistes d'Ulster, ils sont environ dix d'après les estimations. C'est un peu léger pour former une coalition. On parle aussi d'une coalition entre le SNP et les travaillistes, mais ils sont un peu en difficultés pour former ce type de coalition. C'est quand même une hypothèse à envisager. Tout dépend des négociations qui seront menées entre le parti majoritaire et les petits partis. Les travaillistes pourraient se rapprocher en effet du SNP, ou des quelques libéraux démocrates déçus de leur coalition passée avec les conservateurs. Tous les scénarios sont possibles.
Les conservateurs peuvent-ils se débarrasser de Theresa May pour mettre un autre leader à sa place ?
Je crois que c'est une hypothèse tout à fait probable, car elle a annoncé que quels que soient les résultats, son parti assurerait la stabilité. Ça veut dire que le parti a gagné, même si moi j'ai échoué. L'élection britannique élit un parti et pas un individu, elle peut tout à fait démissionner. Mais qui prendrait la suite ? C'est la question. Elle a non seulement perdu son pari et par rapport à ses partenaires européens, elle a entièrement perdu la face. Tout est à refaire. On est face à une crise qui va jouer contre le gouvernement britannique.
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