"Le Camp des saints", ouvrage de référence de l'extrême droite : "Ce n'est pas un mode d'emploi !", se défend son auteur
Alors que son ouvrage Le Camp des saints est largement plébiscité par les mouvements d'extrême droite du monde entier, son auteur, Jean Raspail, se défend de tout racisme. Pour lui, son ouvrage n'est qu'un roman, et non un "mode d'emploi". Franceinfo l'a rencontré.
C'est l'histoire d'un roman français de 1973 devenu un ouvrage de référence pour les mouvements d'extrême-droite du monde entier. Le Camp des saints, de Jean Raspail, raconte une invasion de migrants dans le sud de la France. Le livre est régulièrement cité par Marine Le Pen ou encore par Steve Bannon, le principal conseiller de Donald Trump à la Maison Blanche. Il aurait même inspiré le décret migratoire du président américain dont une nouvelle mouture a été publiée cette semaine.
Cité par Steve Bannon, le conseiller de Trump
Jean Raspail vit dans un immeuble cossu du XVIIe arrondissement de Paris. Grand, élégant, veste sombre, fine moustache blanche : l'écrivain ne fait pas ses 92 ans. Il prévient : sa mémoire le trahit parfois... Elle lui fera pourtant à peine défaut. Un livre est posé sur son bureau. Le Camp des saints, la dernière édition française. Une édition qui s'est vendue à 60 000 exemplaires depuis 2011 : un énorme succès.
Jean Raspail vient d'apprendre que Steve Bannon, le conseiller de Donald Trump à la Maison Blanche, citait souvent Le Camp des saints pour dénoncer les risques d'une immigration incontrôlée. Ainsi, ces deux extraits d'interviews conduites par Bannon sur le site ultra-conservateur Breitbart. "Le grand sujet, en Europe, c'est l'immigration. C'est un problème mondial. Un camp des saints ! Ce n'est pas une migration, c'est une invasion. J'appelle ça le camp des saints.", fulmine-t-il alors.
Mitterrand, Reagan, Le Pen l'avaient lu
Jean Raspail n'est pas surpris : "Cela ne m'étonne pas. Je sais que d'autres présidents l'ont lu. Reagan avait lu Le Camp des saints. En France, Mitterrand l'avait lu.", explique-t-il. L'extrême-droite française se réfère aussi à ce brûlot. Ici Marine Le Pen en 2015 sur Radio Classique renvoyait elle aussi au livre : "C'est une véritable submersion migratoire. J'appelle tous ceux qui nous écoutent à lire Le Camp des saints, de Jean Raspail." Le livre raconte une apocalypse : un million de migrants venus des Indes débarquent dans le sud de la France pour envahir le pays et détruire la civilisation occidentale chrétienne.
Pour certains, Le Camp des saints est une oeuvre "raciste"
"Il faut appeler Le Camp des Saints par son nom : un livre raciste.", écrivait ainsi Daniel Schneidermann dénonçait dans les colonnes de Libération (in Libération du 7 mars 2011, "Appeler racistes les racistes"). À l'appui de son propos, le journaliste explique notamment que "pas un seul, dans ce million d’Indiens, n’est doté par le romancier d’un visage humain, ou de réactions humaines."
Raspail se défend de tout racisme
Jean Raspail s'en défend : "Qu'est-ce-que-c'est que c'est histoire ?, fulmine l'écrivain. Ce n'est pas un mode d'emploi. C'est un roman !" Mais Raspail admet que Le Camp des saints ne pourrait pas être publié aujourd'hui. Le récit va trop loin. L'écrivain assume pourtant des convictions très à droite. "On a le droit de fermer nos frontières. Et à mon avis, on a le devoir de le faire", défend-il. Est-il fier du Camp des Saints ? "Fier, non, explique-t-il. J'ai été utile. Parce que j'ai pris à bras le corps sans m'en apercevoir ce qui est, était et sera encore très longtemps le problème du monde occidental. Ouvrez les journaux !" Le livre n'est pas un succès qu'en France et aux États-Unis : l'éditeur se félicite par exemple des ventes en Allemagne.
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