Populiste et télégénique, le président du N-VA rêve de voir naître une Flamande indépendante sous sa férule
En 2003, son parti, la Nieuw Vlaams Alliantie (Nouvelle alliance flamande), qu'il avait fondé en 2001 sur les ruines du mouvement flamand, réalise un score de 3 %. Sept ans plus tard, il "pèse" près de 10 fois plus...
Son président est donc désormais un acteur incontournable, et redoutable, de la scène politique d'un pays au bord de l'implosion.
Si l'on additionne les scores de la N-VA, du Vlaams Belang et de la Liste Dedecker, 45 % de la population flamande a voté pour des formations séparatistes. Une fracture qui rend problématique la survie du pays, estiment les observateurs.
Le scrutin "a accentué la différence en termes de centre de gravité de la vie politique", estime le directeur du Centre de recherche et d'information socio-politiques, Vincent de Coorbyter, dans une interview au quotidien Le Soir. "Avec une Flandre majoritairement à droite et un paysage francophone majoritairement au centre- gauche, il y a accentuation d'un différentiel qui pose problème dans la gestion du niveau fédéral du pouvoir", ajoute-t-il.
Un redoutable stratège
Dans ce contexte, Bart de Wever (dont le nom Wever signifiant "tisserand" en flamand) a refusé le poste de premier ministre du royaume belge. Car, comme le dit "Libération", "diriger un pays dont il souhaite la disparition est un non sens". En se rapprochant du leader du PS, Elio Di Rupo, qui pourrait être appelé à diriger le gouvernement, il espère voir, en fin Machiavel, un socialiste francophone préparer l'"évaporation" qu'il appelle de ses voeux.
L'homme a déjà prouvé dans le passé qu'il est un redoutable stratège. En 2003, après sa défaite électorale, il s'allie avec Yves Leterme, leader des chrétiens-démocrates flamands. Le tandem s'empare de la Flandre en 2004, puis remporte les élections en juin 2007. Mais de Wever et ses amis refusent d'entrer au gouvernement. Lequel ne sera constitué qu'après presque 12 mois de crise.
Le N-VA a dès lors beau jeu de dénoncer l'"immobilisme" du gouvernement fédéral. Et le manque de fermeté du premier ministre Yves Leterme. De Wever ira jusqu'à comparer le cabinet Leterme au gouvernement de Vichy. Côté francophone, l'échec est attribué principalement au jusqu'au-boutisme du dirigeant flamand. La rupture intervient en octobre 2007. Le leader du N-VA a désormais les mains libres pour se préparer à son grand dessein...
Un leader médiatique...
Un dessein qu'il sait préparer méticuleusement. Cet Anversois de 39 ans, père de quatre enfants et historien de formation, n'a aucune honte à se présenter avec son embonpoint et sa coiffure que certains jugent démodée. L'opinion flamande apprécie "son opiniâtreté, son humour narquois et sa dénonciation d'un pays qui ne fonctionne plus", observe Le Monde.
"Homme intelligent, grande gueule et adepte de bons mots"
(Libération), il sait jouer à plein de l'intérêt qu'il suscite dans les médias. Il n'hésite pas à poser avec Miss Belgique (d'origine flamande) et un drapeau belge... déchiré. Il déverse 13 milliards de faux billets de 50 euros censés dénoncer les transferts financiers de la Flandre vers la Wallonie, moins prospère. En janvier 2009, il participe au jeu télévisé "L'homme le plus intelligent du monde"... qu'il a failli remporter. Et au soir de son triomphe, il sort, au début de son discours, une de ses formules dont il aime paver ses propos: "A coeur vaillant rien d'impossible". Sauf que là, il n'hésite pas à la dire en latin: "Nil Volentibus Arduum"... Ses électeurs adorent.
... et pragmatique
"Pas raciste, pas vraiment populiste", selon Le Monde, le leader du N-VA a vu le jour dans une famille de l'extrême droite flamande. Il porte ainsi, chevillé au corps le virus du nationalisme. Son parcours "est typique de celui des 'Flamingants', ces Flamands favorables à l'indépendance" (Libération), que haïssait Jacques Brel. Son père était membre de la Vlaams Nationaal Verbond (VNV), la Ligue nationale flamande, collaborationniste et proche du parti nazi. Le fils "a cependant toujours veillé à se tenir à l'écart du Vlaams Belang ou des groupuscules fascistes qui essaiment en Flandre", note Libération. Ce qui ne l'empêche pas de faire "de nombreux clins d'oeil" aux extrémistes de droite, selon la même source...
En 2001, il a fondé la N-VA avec des membres de l'aile conservatrice de la Volksunie, le parti historique du mouvement autonomiste flamand, dissous en 2001. Il en devient président en 2004.
Aujourd'hui, Bart de Wever entend se montrer résolument pragmatique. "Nous ne voulons pas la révolution. Nous ne voulons pas proclamer l'indépendance de la Flandre du jour au lendemain", répète-t-il en néerlandais, français, anglais et allemand, s'attirant pour la première fois l'attention de la presse internationale. Mais s'il se dit patient et modéré, il ne cache pas que son but ultime est une Flandre indépendante, membre à part entière de l'Union européenne.
Comme étape "intermédiaire" avant la disparition de la Belgique, il propose un pays "confédéral", où les régions auraient plus de pouvoir que le gouvernement central, réduit à s'occuper de questions comme la défense ou les affaires étrangères. Un vrai début d'"évaporation"...
Il n'hésite pas à vilipender l'obstruction du camp francophone arc-bouté, selon lui, sur l'idée qu'il peut dicter ses lois aux Flamands. "Ses études d'historien ont ancré en lui la conviction d'une revanche à prendre sur les francophones, trop longtemps dominateurs", explique Le Monde. De quoi, peut-être, inquiéter les locuteurs de la langue de Molière dans le royaume de Belgique...
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