Référendum de Cameron : les anti-européens exultent
Les journaux britanniques ont tous - ou presque - fait leur une sur le discours de David Cameron. Revue de presse.
Un "pari risqué" mais qui vaut le coup d'être tenté. C'est en substance l'avis d'une majorité de la presse britannique, jeudi 24 janvier, au lendemain de la promesse de David Cameron d'organiser un référendum sur le maintien du Royaume-Uni dans l'UE d'ici 2017. Les tabloïds surtout, largement eurosceptiques, n'hésitent pas à se féliciter du discours du Premier ministre britannique.
Le Daily Mail* n'y va pas de main morte. "Oui, monsieur le Premier ministre !", se félicite le journal en une de son édition papier, ajoutant : "Maintenant, allez-y et finissez le travail". Dans son éditorial, le journaliste James Chapman salue "l'engagement historique" pris la veille par le conservateur.
Un discours historique
Dans un autre article, le tabloïd ne tarit lui non plus d'éloge vis-à-vis du Premier ministre qui a livré, selon lui, "le meilleur discours de sa carrière". "Tout ce qu'il a dit est vrai", assure-t-il, citant le "gouffre béant" entre l'UE et ses citoyens, la perte de compétitivité ou encore la lenteur de Bruxelles. "Il a envoyé un électrochoc à travers l'Europe (...)", estime-t-il, citant les réactions positives des plus eurospectiques du camp conservateur.
Le tabloïd retient aussi la réaction de l'Allemagne, perçue comme une approbation. Angela Merkel s'est en effet dit "prête à discuter des souhaits britanniques" pour l'Europe. Le Daily Telegraph*, autre parution eurosceptique, en fait d'ailleurs sa une, titrant que "Merkel évoque un accord" après la promesse de référendum. "Jusque là, on pensait que M. Cameron allait s'opposer aux autres dirigeants européens...", analyse le responsable du service politique du journal.
Le Daily Express*, lui aussi eurosceptique convaincu, note dans son éditorial que "David Cameron a l'occasion d'entrer dans l'Histoire comme un grand Premier ministre en jugeant que l'avenir du Royaume-Uni, en tant que grande puissance économique, se trouve plutôt en dehors de l'UE. (...) J'espère qu'il prendra le parti de ce journal et de ses lecteurs lorsqu'aura lieu le référendum." Autrement dit, que Cameron souhaitera le départ du Royaume-Uni de l'UE à l'heure du vote.
Critiques et appel à la prudence
Cela ne sera pas si simple, rétorquent d'autres journaux, plus critiques. Car pour qu’il défende cette position, le Premier ministre devra se montrer plus que déterminé face à Bruxelles. "D'autres dirigeants européens ont réagi avec hostilité à ses exigences", détaille The Independent, listant les réactions du ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, son homologue allemand Guido Westerwelle ou encore l'entourage de Barack Obama.
Le journal pointe aussi "l'approche très risquée" de Cameron, rapportant les critiques des travaillistes et libéraux-démocrates. "Selon eux, cet engagement prématuré risque de créer cinq ans d'incertitude" dommageables pour les créations d'emploi liées aux investissements étrangers.
Ainsi, le Guardian, journal d'opposition, conseille la prudence au Premier ministre. Ce dernier ne doit pas "sous-estimer la colère hostile que va s'attirer le Royaume-Uni en provoquant, de manière totalement gratuite, une nouvelle crise alors que celle en cours est déjà bien assez fatigante". Selon le quotidien, "Paris pourrait se montrer bien plus détendu qu'il ne le prétend quant à une sortie du Royaume-Uni." Et de conclure que "Londres n'arrivera pas à obtenir une exemption générale de tout ce qu'il n'aime pas".
Un pari politique risqué
David Cameron joue donc un jeu dangereux, estime le Financial Times dans son éditorial, bien que son annonce calme les ardeurs de Ukip, une formation eurosceptique décomplexée qui prend du pouvoir outre-Manche. Il "a refusé de dire s'il ferait campagne pour la sortie en cas d'échec des négociations [avec Bruxelles], alors qu'une large frange de son parti poussera le pays vers le départ de l'UE."
Selon la BBC*, les travaillistes et les libéraux-démocrates seront aussi en embuscade, en vue des législatives de 2015. La question est de "savoir s'ils laisseront David Cameron être le seul dirigeant d’un grand parti à proposer aux électeurs de donner leur avis sur le maintien dans l'UE après les prochaines élections." De quoi faire dire à un analyste politique de la radio publique britannique : "Bienvenue sur la première page du dernier chapitre de la plus longue et la plus sanglante saga de la politique britannique."
*Tous ces articles sont en anglais.
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