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BRICS: l'Inde devient le maillon fort des pays émergents

Au sein des BRICS, le club des cinq pays émergents (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud), l'Inde fait désormais figure de meneur. Après une mauvaise passe en 2013, le pays a repris du poil de la bête. Face à une Chine qui marque le pas, une Russie et un Brésil en récession, l'Inde parade avec 7,5% de croissance prévisionnelle et des finances publiques en forme grâce au pétrole bon marché.
Article rédigé par Véronique le Jeune
France Télévisions
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Dans le groupe des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), l'Inde est le seul à ne pas connaître la crise, comme ici à Calcutta en août 2015 avec la construction d'un complexe résidentiel. (REUTERS / Rupak De Chowdhuri)

Les turbulences venant de Chine n'en finissent pas de secouer les économies des autres pays émergents, présentées depuis plusieurs années comme ultra-performantes et destinées à changer l'équilibre du monde d'ici à 2050. Mais dans ce marasme, l'Inde garde la tête hors de l'eau. «Le tableau est très différent d'il y a quelques années quand l'Inde était au premier rang des inquiétudes», estime Mark Williams, économiste en chef de Capital Economics à Londres, cité par l'AFP.

En cet automne 2015, l'Inde fait donc figure de rare «point fort» de l'économie mondiale, selon le Fonds monétaire international. La troisième économie d'Asie, derrière la Chine et le Japon, qui importe 80% de son pétrole, a profité de la chute des cours pour renforcer ses finances publiques.

Cependant, il reste à faire pour consolider la situation. Les réformes clés promises par le Premier ministre indien Narendra Modi, dont la popularité reste élevée, sont bloquées par des grèves. Parmi elles, la loi facilitant l'acquisition de foncier pour les projets industriels ou l'instauration d'une TVA unique.
 
Le code du travail et la législation sur les investissements restent aussi très complexes, ce qui freine la croissance, tandis que les infrastructures sont déficientes. Tout en rivalisant avec la Chine, la taille de l'économie indienne reste cinq fois inférieure à celle de son grand voisin.

«L'Inde ne doit pas se reposer sur ses lauriers et les politiques ne devraient pas trop se congratuler», remarque encore Mark Williams, de Capital Economics. «Elle devrait croître bien plus rapidement. Elle aurait pu atteindre un taux de 9% ou 10%, à la chinoise».

Malgré tout, s'il y a bien un domaine où l'Inde devrait dépasser la Chine avant 2030, c'est celui du nombre d'habitants: 1,3 milliard contre 1,4 en Chine, aujourd'hui le plus peuplé du monde. En raison d'une fécondité plus élevée (2,3 enfants par femme en moyenne, contre 1,7), l'Inde renversera ce classement, indique une analyse bisannuelle de l'Institut français d'étude démographiques (Ined) publiée en septembre 2015.

Les autres pays émergents ne cassent plus des BRICS
Quand la Chine affichait une croissance à deux chiffres, couvrant son territoire d'autoroutes et de gratte-ciel, elle absorbait d'immenses quantités de pétrole, de charbon et d'acier, tirant les cours des matières premières vers le haut. Mais aujourd'hui les investissements publics se raréfient et les prévisions de croissance annoncent un résultat de 7,3% au lieu des 7,4% attendus.

Un atterrissage brutal menace l'Empire du Milieu et inquiète ses grands fournisseurs tels que le Brésil, l'un des ses partenaires des BRICS. Car, conséquence du manque d'appétit chinois, les prix des matières premières ont chuté, l'indice Bloomberg Commodity ayant touché un plus bas depuis 16 ans en août 2015.

Et début septembre, signe des temps, l'agence de notation Standard & Poor's a relégué le Brésil au rang d'emprunteur à haut risque, dit spéculatif. Sa note a également été abaissée de BBB- à BB+, assortie d'une perspective négative.

Autre pays classé emprunteur spéculatif, la Russie paie cher la chute des cours du pétrole, dont elle est un grand exportateur. Elle souffre par ailleurs des sanctions européennes imposées à cause de la crise ukrainienne. Le nombre de Russes vivant sous le seuil de pauvreté a grimpé à 21,7 millions, soit environ 15% de sa population.

«Le principal impact vient de l'influence de la Chine sur l'économie globale, les matières premières et les marchés financiers», analyse Oleg Kouzmin, de la banque privée Renaissance Capital à Moscou, qui prévoit un recul de 4% de l'économie russe cette année.

En Afrique du Sud, l'un des plus importants fournisseurs de minerais de la Chine, un actif sur quatre est sans emploi et, mauvaise surprise, le PIB a reculé de 1,3% au deuxième trimestre.

Sommet des BRICS à Oufa (Russie) le 9 juillet 2015. (Sergei KARPUKHIN / REUTERS)

Quel avenir pour les BRICS ?
Dès l'invention du concept par Goldman Sachs en 2001 avec l'acronyme anglo-saxon de BRIC pour Brésil, Russie, Inde, Chine, avec un S ensuite pour Afrique du Sud (qui rejoint le groupe en 2011), le côté hétéroclite de l'assemblage saute aux yeux. Cultures aux antipodes, régimes politiques antagonistes, seul un rythme de croissance pétaradant réunit les membres de ce club auquel personne ne prédit une très longue vie.

Quatorze ans plus tard, une hétérogénéité encore accrue et un essoufflement dans la traction de l'économie mondiale, les cinq fleurons demeurent un contrepoids aux puissances européennes et américaine. Ils ont même leur banque depuis juillet, dont le siège a été établi à Shanghai.

La Nouvelle Banque de Développement a pour but de financer des projets d'intérêt général et de développement durable, là où il y aura de la demande dès 2016. La large représentation des BRICS – un pays dans chaque continent – constitue indéniablement un aimant pour des émergents plus petits qu'eux. Ainsi, sur le même modèle mais non officiel, Mexique, Indonésie, Nigeria ou encore Turquie, baptisés par certains les MINT, attirent de plus en plus d'investissements étrangers.

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