Intervention au Mali : un terrain et un ennemi difficiles à appréhender
La semaine dernière, ce sont deux colonnes de combattants
djihadistes qui ont mené une offensive vers le centre du Mali où leur avancée a
été stoppée, notamment par l'armée française. Depuis vendredi elle appuie les
troupes maliennes en lutte contre "les terroristes".
Cette offensive islamiste
a été menée par un millier d'hommes qui se sont dispersés. "Ce sont
maintenant des petits groupes qui essayent de se cacher dans des petites villes
comme cela a été fait à Diabaly" , raconte Pierre Servent, expert
militaire et ancien porte-parole au ministère de la Défense.
Ce repli n'est pas une "débandade", analyse pour sa part Jean-Charles Brisard, expert en affaire de terrorisme. Il s'agit "évidemment" d'un repli stratégique". Selon lui, "ils veulent nous entraîner dans une logique de gérilla et peuvent prolonger le conflit indéfiniment".
Un conflit "asymétrique"
Car ces petits groupes très nomades offrent une résistance
importante aux troupes françaises. "On est dans le cas de ce que l'on
appelle des conflits asymétriques" , détaille Jean-Vincent Brisset,
directeur de recherche à l'Institut de relations internationales et
stratégiques.
Selon lui il y a "d'un côté des forces classiques ; une
sorte de rouleau compresseur d'un point de vue commandement avec des
difficultés pour trouver les cibles et les adversaires. De l'autre côté on a des
gens armés de manière légère avec peu de dispositif de commandement."
Des islamistes bien équipés
Mais
ces rebelles semblent plutôt bien armés. Ils disposent notamment d'armes légères et de petits canons
antiaériens (des deux-tubes) montés sur des pick-up emportant une dizaine de
combattants. Les djihadistes se sont procuré leurs armes ces derniers mois lors
d'opérations militaires contre les armées algériennes ou mauritaniennes. Ils se
sont également servis dans "les arsenaux de l'ex-armée libyenne" détaille Eric
Dénécé, directeur du Centre français de recherche sur
le renseignement (CF2R).
Autre source d'approvisionnement pour les combattants, le
"classique" marché international clandestin. Là, "ils peuvent
trouver tout ce qu'ils veulent en armes légères et en munitions" ,
explique Eric Dénécé.
Les otages, source importante de revenus
Et ils n'ont aucun problème d'argent. Selon le directeur du CF2R, ils disposent notamment, de "la dîme prélevée au passage des
convois de trafiquants de drogue, de cigarettes et d'essence qui traversent le
Sahel" . Le trafic d'otages "considérés comme une monnaie
d'échange avec des rançons de versées" constitue également une source
importante de revenus explique Jean-Vincent Brisset
Et si les islamistes ne représentent plus une force
offensive majeure, ces combattants mobiles et éparpillés peuvent continuer à
donner des coups, frapper, essayer d'exister. Pour le moment "la France
n'a pas assez d'hommes sur le terrain et l'armée malienne n'est pas assez nombreuse
pour aller les déloger", analyse
Pierre Servent.
Un terrain d'opération compliqué
Cette intervention se déroule par ailleurs sur un terrain
d'opérations compliqué. Le nord du Mali a une superficie une fois et demie
supérieure à celle de la France. Ce sont des zones désertiques. "Lorsque
les fortes chaleurs vont arriver, cela va poser des problèmes pour les hélicoptères
car il y a moins de portance quand il fait très très chaud" , explique
Pierre Servent
Par ailleurs, l'armée française est confrontée à la question
vitale de la logistique. La France peut s'appuyer sur ses forces
prépositionnées et ses bases à N'djamena au Tchad notamment. "C'est
quand même à 2.000 km "
de la zone des opérations détaille l'expert militaire. Depuis le début de
l'intervention, des avions installés au Tchad ont d'ailleurs été installés à
Bamako. De leur côté, les forces spéciales françaises sont basées au Burkina
Faso.
De plus, souligne Pierre Servent, des avions Rafale sont
venus de France et on pu "bénéficier de quelque chose que je n'aurai
pas imaginé il y a quelques jours : le survol d'avions de combat armés français
au dessus de l'Algérie".
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