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Iran : un Parlement dominé par les modérés, mais sous tutelle du Guide suprême
Au lendemain de l’entrée en fonction du nouveau Parlement, la République islamique d'Iran présente plus que jamais le visage d’une «démocratie totalitaire». Flanqué de l’Assemblée des experts, chargée de nommer la plus haute autorité du pays, le Majlis (Assemblée nationale) est surtout un habillage électoral du principe de gouvernance de Velayat-e-faqih, c’est à dire la tutelle du guide.
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Dans les formes, le nouveau Parlement iranien, issu des scrutins législatifs des 26 février et 29 avril 2016, est dominé par l’alliance de modérés et réformateurs soutenant le président Hassan Rohani.
Avec 122 sièges sur les 290 du Majlis, cette coalition a réussi à se tailler la plus large part face aux 86 élus ultraconservateurs et aux 82 sièges de candidats indépendants sans avoir la majorité absolue pour autant.
Un nombre record de 17 femmes, dont 15 réformatrices
Plus encore, pour la première fois depuis la révolution islamique de 1979, cette nouvelle assemblée compte un nombre record de femmes: 17 dont 15 réformatrices contre 9 conservatrices auparavant.
Toutefois, même si le Majlis est l’expression d'une pratique démocratique du vote, le véritable exercice du pouvoir est ailleurs. Obéissant au principe de gouvernance de Velayat-e-faqih – textuellement : la tutelle de l’expert en jurisprudence islamique –, il est aux mains du Guide suprême, Ali Khamenei en l’occurrence.
C’est lui, avec l’autorité judiciaire, qui nomme les 12 clercs et juristes du Conseil des Gardiens de la Constitution, chargé de valider les candidatures aux élections législatives. Un système de filtrage qui permet un habile dosage des sièges à la source.
Le Parlement est également flanqué de l’Assemblée des experts, un organisme chargé de nommer, superviser et, le cas échéant, de démettre le Guide suprême. Constituée de 88 religieux élus pour 8 ans, la dernière a été renouvelée en même temps que le Majlis, le 26 février.
Un conservateur radical à la tête de l'Assemblée des experts
Ce 24 mai, elle a élu son nouveau président, l’Ayatollah Ahmad Janati, par 51 voix sur 85 votants. Un conservateur radical de 89 ans, connu pour ses positions anti-occidentales et qui dirige déjà le Conseil des Gardiens de la Constitution cité précédemment.
Un renforcement du pouvoir ultraconservateur conforme aux directives du guide. «La responsabilité de l’Assemblée des experts est de préserver la nature islamique et révolutionnaire du régime», avait recommandé Ali Khamenei dès le mois de mars.
Pour le Guide, cette assemblée «doit rester une assemblée révolutionnaire, penser de manière révolutionnaire et agir de manière révolutionnaire».
L’élection de l’Ayatollah Janati à la tête des experts constitue donc un revers pour le Président Hassan Rohani et l’ancien Président Akbar Hachemi Rafsandjani. Tous les deux membres réformateurs de cette Assemblée, ils soutenaient la candidature de l’Ayatollah Ebrahim Amini, pour barrer la route aux ultras, mais en vain.
A la fin, c'est toujours le Guide suprême qui gagne
Avec de tels rouages, le Guide suprême est doté de prérogatives plus importantes que dans un régime présidentiel classique ou une monarchie constitutionnelle. Outre sa tutelle sur tous les pouvoirs, il a la possibilité de convoquer un référendum ou de déclarer la guerre.
Face à une telle concentration de pouvoir et pour parodier une expression connue dans le monde du football, les élections en Iran c’est toujours réformateurs contre conservateurs, mais à la fin c’est toujours le Guide suprême qui gagne.
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