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La corruption gangrène la vie politique italienne

Les scandales politico-financiers n'en finissent pas de ternir l'image de la classe politique italienne, du sud comme du nord. Au palmarès des partis les plus corrompus, le Peuple de la liberté de Silvio Berlusconi arrive nettement en tête.
Article rédigé par Hervé Pozzo
France Télévisions
Publié
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La corruption gangrène la vie politique italienne. Dernier scandale en date, 200 millions d'euros de pots-de-vin versés par la société d'hydrocarbures nationale ENI pour des contrats en Algérie. (AFP)

Les 170 kilos de Franco Fiorito, dit «Batman», n'auront pas fait le poids face aux accusations de corruption (1,3 millions d'euros) dont il  faisait l'objet ; Batman dort aujourd'hui en prison et le Peuple de la liberté (PDL, droite), son parti,  n'en finit plus d'additionner les déconvenues, les scandales politico-financiers.

Malversations, corruption, dépenses effrénées : certains des conseillers régionaux de la région du Latium (Rome) affiliée au PDL menaient grand train dans un pays en crise, où un tiers des jeunes adultes sont sans-emploi. Dans cette même région, Vincenzo Salvatore Maruccio aurait détourné 700.000 euros. Son parti, l'Italie des valeurs, est aussi celui de l'ancien juge anticorruption Antonio Di Pietro, à l'origine de l'enquête Mani pulite (Mains propres), il y a vingt ans. Les affaires obligeront Renata Polverini, la présidente de la région, à démissionner.

Dans le Latium, toujours, l'opposition de gauche ne semble pas avoir été en reste ; le responsable du Parti démocrate (PD, gauche), Esterino Montino, aurait dépensé 4.500 euros en bouteilles de vin officiellement déstinées à des enfants handicapés. Mais le Latium n'est pas un cas isolé : la Campanie, la Calabre et la Sardaigne sont l'objet de toutes les attentions des juges. Une autre région l'est d'autant plus qu'elle est la plus peuplée et la plus riche d'Italie, la Lombardie.

Autre région, même moeurs
Roberto Formigioni, son gouverneur,  est sous le coup d'une enquête pour corruption. Fin septembre on lui reprochait d'avoir détourné 8,5 millions d'euros sous forme de remboursements de frais personnels. Quelques jours plus tard, c'est un autre élu du PDL, Domenico Zambetti, également en Lombardie, qui était arrêté pour avoir acheté des voix (4.000, à 50 euros pièce) par l'entremise de la mafia calabraise, la N'drangheta. Au total, quatorze élus ont été arrêtés dans cette prospère région.

Roberto Formigoni, président de la région Lombardie jusqu'en 2012, accusé de corruption. (DR)

C'est la fin du mythe d'une Italie du nord plus vertueuse que celle du sud. Mais le PDL n'est pas le seul parti à voir ses édiles embastillés. Le trésorier de la Ligue du Nord, Francesco Belsito, a été mis en examen en avril 2012. Il réglait les factures de la famille d'Umberto Bossi, dirigeant le mouvement jusqu'à cette affaire, grâce à la caisse du parti.

Autre monument du détournement de fond, celui initié par Luigi Lusi qui puisa  20 millions d'euros dans les caisses de la Marguerite (centre gauche), un parti inactif depuis 2008 mais que l'Etat abondait encore.

Tangentopoli 2000 ?
Opérée en 2001, la réforme de la décentralisation et les nouveaux pouvoirs financiers qu'elle accorda aux conseils régionaux devait rapprochée élus et citoyens.

Las, Mario Monti, le président démissionnaire (en décembre 2012) du Conseil italien, expliquera: «Ces scandales liés aux dépenses effrénées pour la politique appartiennent à une Italie du passé qui nous ne préférerions plus revoir dans le futur.»

D'après le livre blanc sur la corruption préparé par le gouvernement, le coût annuel du manque d'éthique d'une partie de la classe politique italienne se chiffrerait à 60 milliards d'euros. La ministre de la justice Paoloa Severino comparaît récemment cet enchaînement de scandales au Tangentopoli (la ville pot-de-vin) qui signa la fin des partis politiques historiques en Italie dans les années 90.

Giuseppe Orsi, le patron de Finmecanica, est en prison depuis le 12 février 2013, accusé de corruption. (DR)


Un des derniers scandales en date concerne des soupçons de corruption visant Giuseppe Orsi, président du groupe d'aéronautique et de défense Finmeccanica, arrêté le 12 février 2013. La presse italienne évoque des versements de pots de vins à hauteur de 51 millions d'euros pour la vente d'hélicoptères au gouvernement indien. Désormais engagé dans la course pour les éléctions générales, Mario Monti s'est exprimé sur le sujet, parlant d'une «gouvernance problématique» de l'industrie et déclarant qu'«il est nécessaire de renforcer la lutte contre la corruption».

Silvio Berlusconi, lui, justifie le versement de pots-de-vin : «Ce ne sont pas des crimes (...), c'est un phénomène qui existe et qu'il est inutile de nier.» Il apporte également son soutien à Paolo Scaroni, un autre patron italien soupçonné cette fois de «corruption internationale» lors de la négociation de contrats entre Eni (Société nationale des hydrocarbures) et le groupe pétrolier algérien Sonatrach. Cette fois, l'addition est nettement plus salée : 197 millions d'euros de commissions auraient été versées.

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