: Reportage "En quelques secondes, j'étais agressé et jeté au sol" : en Italie, le fléau des violences contre les soignants dans un système de santé à bout de souffle
En Italie, la violence contre les soignants atteint des niveaux alarmants. Une cinquantaine d’agressions par jour sont recensées en moyenne dans tout le pays, en premier lieu aux urgences. À Foggia, dans les Pouilles, dans le sud du pays, avec trois agressions en une semaine en cette rentrée à l’hôpital, cette violence a pris un tour radical. Une manifestation y était organisée cette semaine.
Un taxi se dirige vers l’hôpital de Foggia. Et surprise, la violence contre les soignants, le chauffeur ne la justifie pas mais il la comprend. "Ce n'est pas possible d'aller à l'hôpital à 8h du matin et d'en sortir à 8h le lendemain. Ce n'est pas possible !", martèle-t-il.
Et ces propos ne sont pas isolés. L'impatience qui vire à la violence, cet infirmier l’a subie lors d’une garde de nuit début septembre pendant des examens préalables au passage du médecin. "À un certain moment, la personne s'est impatientée et a commencé à s'agiter, raconte-t-il. Et en quelques secondes, j'étais agressé et jeté au sol." Les urgences et les soignantes sont en première ligne. "Nous avons toutes été agressées, verbalement ou physiquement, au fil des années", lâche le docteur Rosalba Fiorile, presque fataliste.
Délais d'attente interminables
La colère peut s’expliquer, reconnaissent les médecins. On soumet au président de l’Ordre des chirurgiens les propos du chauffeur de taxi. "Il n'est pas tombé sur un mauvais médecin, mais une mauvaise structure, incapable de donner une réponse immédiate à ses besoins de santé."
À travers ces agressions, l’Italie fait le compte très brutalement avec les carences de son système de santé. Les délais d’attente sont interminables, il manque au moins 65 000 infirmiers et infirmières, selon la Cour des comptes. Rapporté à la richesse nationale, l’Italie dépense nettement moins que ses voisins pour la santé. Le privé gagne du terrain face au public.
"Quand un malade de cancer n'a pas d'endroit pour passer les derniers instants de sa vie auprès de ses proches, il reste à l'hôpital, qui n'est pas fait pour ça, explique le professeur Serviddio, qui dirige le service de médecine interne à Foggia. Le système de santé public se résume à l'hôpital."
"Nous manifestons non pas pour qu'on envoie l'armée à l'hôpital, mais pour qu'on déploie les activités de l'hôpital sur tout le territoire."
Gaetano Serviddio, directeur du service de médecine interne à Foggiaà franceinfo
Envoyer l’armée patrouiller près de l’hôpital, c’est ce qu’envisage le préfet de Vibo Valentia, tout au sud du pays, pour mettre fin aux violences contre les soignants.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.