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La Tunisie dit non à la charia

Après des semaines de blocage politique, la Constituante tunisienne, où les islamistes d'Ennahda sont majoritaires, a adopté samedi les premiers articles de la future Constitution. Elle garantit la liberté de conscience et rejette l'islam comme source de droit, conformément à un compromis avec l'opposition.
Article rédigé par Lucas Roxo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
  (Zoubeir Souissi Reuters)

C'était un débat de longue date. Ennahda, qui avait parlé d'introduire dans la Constitution tunisienne la charia, la loi islamique, dès son arrivée au pouvoir, a finalement dû y renoncer. Le parti islamiste s'y était rangé depuis le printemps 2012, mais les événements de ces derniers mois pouvaient laisser planer le doute. 

Finalement, l'Assemblée constituante tunisienne (ANC) est parvenue à se mettre d'accord sur les premiers articles de la future Constitution. Non amendables, ils définissent la Tunisie comme une République guidée par la "primauté du droit ", un Etat "libre, indépendant, souverain " et "civil " dont la religion est l'islam.

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Deux amendements, l'un proposant l'islam et l'autre le Coran et la sunna (ensemble des paroles du Prophète, de ses actions et de ses jugements) comme "source principale de la législation ", ont été rejetés.

L'article 6 pose problème

D'autres articles ont également été adoptés, même si le doute plane quant à leur interprétation. L'ANC a ainsi consacré l'Etat comme "garant de la liberté de conscience ", malgré la vive opposition de certains élus.

Azed Badi du parti Wafa, proche des islamistes, a estimé que cette liberté permettrait "aux satanistes, à l'idolâtrie d'organiser des manifestations publiques (...) pour propager leurs croyances ". Mais ce même article a également été critiqué par des associations laïques, puisque celui-ci définit l'Etat comme "protecteur du sacré ", une formulation relativement vague. 

"Il faut lever le flou sur l'article 6 qui donne à l'Etat le droit de parrainer la religion et de protéger le sacré, ce qui peut aboutir à des interprétations menaçant la citoyenneté, les libertés ", a estimé samedi la Ligue tunisienne des droits de l'Homme. Selma Mabrouk, députée d'opposition, a elle publié un message sur Facebook pour affirmer que la constitution ne garantissait "plus la civilité de l'Etat". 

Des débats houleux

D'une manière générale, les débats autour de l'adoption de ces articles ont été agressifs, marqués par les disputes entre élus et les interruptions d'audiences. Sur cette vidéo, on voit notamment un député du Groupe démocratique se mettre à crier après avoir vu son intervention retirée, jusqu'à la suspension de la séance. 

Des médias avaient vivement critiqué le comportement des élus, le quotidien La Presse s'indignant des "scènes désolantes " de vendredi et d'un hémicycle "où tous les coups bas sont permis ".

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Vers la démission du gouvernement

La tension ressentie peut s'expliquer : élue en octobre 2011, la Constituante devait achever sa mission en un an, mais le processus a été ralenti par un climat politique délétère. Ce vote était donc la dernière chance pour faire aboutir la transition politique, et chaque groupe politique a mis toutes ses armes dans la bataille. 

A l'issue de ce processus, Ennahda s'est engagé à céder la place à un gouvernement d'indépendants dirigé par l'actuel ministre de l'Industrie, Mohamed Jomaâ. Le Premier ministre islamiste Ali Larayedh a accepté de démissionner une fois que l'ANC aura achevé ses travaux. 

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