Le conflit israélo-palestinien pèse sur l'économie de Bethléem
Un couple de touriste russophone déambule dans une boutique de souvenirs située sur la place de la Mangeoire à Bethléem. George Abu Aia, le vendeur, se désespère. En période de Noël, il réalise habituellement plus de la moitié de son chiffre d'affaires mais ce ne sera pas le cas cette année. La faute aux récents événements : "Le business n'est pas bon cette année. Beaucoup de touristes ont annulé leur voyage au moment de la guerre de Gaza cet été. Et les visiteurs qui viennent, ce ne sont pas les mêmes que les années précédentes. Ils viennent acheter uniquement des petites choses à un ou deux euros. Quelque chose qui couterait 8 euros, ils disent que c'est trop cher. Ils achètent des petites croix, c'est tout", déplore-t-il.
"Beaucoup de gens ont renoncé à venir ici à cause du climat tendu "
Dans les rues de Bethléem, quelques bus de touristes compliquent la circulation. Ils déposent leurs passagers pour quelques heures avant de les ramener à Jérusalem. "On aimerait qu'ils restent plus longtemps et qu'ils passent au moins une nuit ", lance Tony Salsa. Ce Palestinien a fondé une agence de voyage et propose des tours aux visiteurs étrangers. Il a vu environ un quart de ses réservations annulées : "On recevait beaucoup de coups de téléphone et d'e-mails de familles et de groupes qui souhaitaient venir visiter Bethléem et les lieux saints qui sont ici. Après la guerre et la situation à Jérusalem, il y a eu beaucoup d'annulations. Beaucoup de gens ont changé d'avis et ils ont renoncé à venir ici à cause du climat tendu", explique-t-il.
20% de visiteurs de moins en décembre
Selon les chiffres du ministère du Tourisme, 2,5 millions de visiteurs ont découvert la Cisjordanie en 2014. Un chiffre en recul d'environ 5% par rapport à l'année 2013 alors que le Pape François a pourtant drainé plusieurs milliers de fidèles lors de son passage en mai dernier. Sur le mois de décembre, il y aura même 20% de visiteurs de moins que l'an dernier.
Vera Baboun, la maire de Bethléem, accuse Israel de freiner le développement touristique de sa ville : "La région de Bethléem est à 82% sous contrôle israélien, il y a 22 colonies, 32 barrières au total. C'est pourquoi quand je parle de Bethléem, je raconte comment notre ville est touchée par la situation politique. Vous pouvez le voir dans les rues. Donc nous sommes inquiets. Surtout que notre économie repose uniquement sur une zone industrielle qui a de grandes difficultés à démarrer et sur le tourisme", souligne le maire.
"Les touristes ? Bien sûr qu'ils ont peur... "
Les conséquences sur l'emploi sont visibles. Le taux de chômage dans la région de Bethléem est de 26%, soit trois points de plus que la moyenne en Cisjordanie. Au restaurant The Square, qui trône en face de la basilique de la Nativité, le patron employait 18 personnes il y a encore quatre ans. Aujourd'hui, ils ne sont plus que sept à faire tourner l'établissement, dont quelques tables seulement sont occupées aujourd'hui : "La situation est très mauvaise. On ne peut pas dire qu'il y ait beaucoup de monde. On devrait être en haute-saison en cette période mais on a autant de monde qu'en saison basse. J'espère au moins que nous serons plein pour le jour de Noël. Mais regardez, tous les jours il y a un incident à Jérusalem : il y a des tirs, des morts par balles. C'est une catastrophe pour les touristes... Même moi j'ai peur d'aller à Jérusalem. Comment voulez-vous que réagissent les touristes ? Bien sûr qu'ils ont peur..."
Noël reste Noël
Avec quatre hôtels en construction en plus des 48 déjà existants, les autorités palestiniennes veulent continuer à développer les infrastructures à Bethléem. Le potentiel est "énorme ", estime Rula Maaya, la ministre palestinienne du Tourisme, une francophone. Malgré le climat morose, entre 10 et 15.000 personnes sont attendues à Bethléem le 24 décembre au soir. Le taux de réservations est de 100% dans les hôtels de la ville.
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